Après la dure période de l’occupation, où l’on risquait une descente de la gestapo pour avoir écouté du jazz, il ne se passait pas grand chose pour les amoureux de musique. Tous les artistes qui cartonnaient avant 1940 avaient dû plus ou moins mettre leur carrière en berne. Tout restait à recréer. Pour certains, comme Edith Piaf ou Charles Trenet, tout allait redémarrer assez vite et ils créeront même quelques unes de leurs plus célèbres chansons. Il y avait, si l’on peut dire, de la place. Le plus célèbre orchestre français d’avant-guerre, celui de Ray Ventura tenta bien sûr le coup, en revenant d’un exil un peu forcé. Celui qui réussit le mieux son coup, reste Jacques Helian.
Ce n’est pas à proprement parler un débutant. Né en 1912, il fit partie, entre-autres, de l’orchestre de Ray Ventura. Jouant du saxophone et de la clarinette, il a fait ses classes avec son beau-frère, le futur grand chef d’orchestre Raymond Legrand et père de Michel Legrand. En 1939, il est soldat et fait plus tard prisonnier. Libéré en 1943, il monte son propre orchestre, qui fera ses débuts à la radio. Très vite, il enregistre des airs qui vont devenir célèbres comme « Fleur De Paris ». Parmi les faits les plus évidents, son orchestre voit défiler son lot de futures personnages très populaires comme Zappy Max ou Ginette Garcin. Le style de Jacques Hélian importe dans une certaine mesure le swing des USA, mais son répertoire est aussi teinté de musiques plus exotiques ou romantiques à la manière latine. Les chansons humoristiques ne sont pas absentes non plus. Il est vrai que dans le contexte de l’époque, on regarde moins à la perfection du style, les puristes ne sont pas légion. On veut surtout s’amuser, et l’orchestre répond tout à fait à cette demande. Il créa néanmoins deux chansons qui resteront très célèbres. L’une est le fameux « C’est Si Bon » reprise par une pléiade d’artistes. L’autre fait partie d’un domaine plus proche de la chanson scout, qui n’a pas chanté ou entendu quelques couplets de « Etoile Des Neiges », qui lui rapporta d’ailleurs un disque d’or. Pendant une dizaine d’années, il fut immensément populaire, surtout à travers la radio, très écoutée. Peu de personnes possédaient de quoi écouter les 78 tours, qui étaient la panacée des années 40. Il apparut aussi dans quelques films. Son étoile pâlira peu à peu, remplacée par des musiques plus dirigées vers les artistes solistes et l’émergence de la chanson française traditionnelle. Il meurt en 1986.
En résumé, Jacques Hélian fut une passerelle entre une musique qui avait usé à doses modérées le swing cher à certains et une musique populaire de bon aloi. Il est plus une référence pour les passionnés de chansons légères que comme un importateur du jazz
en France.