C’était un dimanche, ça je m’en souviens bien, remarquez que tout autre jour de la semaine aurait pu faire l’affaire. J’étais en train d’essayer d’établir pour un monsieur qui s’intéressait à la généalogie, une liste de mes ancêtres. Par un pur hasard, il se trouvait que sans le connaître, nos familles respectives devaient avoir une ascendance commune. Très bien renseigné le bonhomme, il m’a appris que ma grand-mère paternelle qui portait le même patronyme que le sien était une famille dont les origines remontaient à 2000 ans dans ce qui est l’Iran actuelle. Soit dit en passant, la théorie de la pureté de la race me fait doucement rigoler. Je devais pour cela aller dans plusieurs cimetières rechercher les dates fatidiques de quelques personnes qui de loin ou de près ont fait partie de ma famille. Muni de quelques renseignements sur la date des décès, j’ai parcouru trois endroits différents et j’ai pu obtenir ce que je cherchais. Heureusement , c’était pas trop loin. Sur le chemin du retour, moi et ma belle petite voiture, nous regagnions d’une humeur joyeuse le home sweet home. En passant dans un village, je vois une jeune femme qui faisait de l’auto-stop. J’en ai tellement fait dans ma jeunesse, que je ne peux pas décemment les laisser au bord de la route, juste retour des choses. De plus, cette personne était plutôt jolie, en jupe, et visiblement ses jambes n’étaient pas nues. Là, vous imaginez tout de suite le fond de ma pensée, je continue tout droit bien sûr. Mais non, mais non, je m’arrête et j’accepte de la déposer une quinzaine de kilomètres plus loin. Dès qu’elle fut à l’intérieur, quelque chose me frappa. Plutôt ce fut mes narines qui m’avertirent. Comme je l’appris par la suite, c’était une étrangère, une Allemande, qui venait apprendre notre belle langue. Pour cela, elle avait choisi de séjourner dans une ferme, en aidant le paysan aux travaux. J’imagine que vous savez faire la différence olfactive entre une employée agricole et celle qui travaille au rayon parfumerie des Galeries Lafayette. Donc une odeur d’écurie commence à se répandre, je ne dirais pas joyeusement, dans ma bagnole. Pour couronner le tout, je pense que le dimanche à la ferme, après la sortie de l’église, on avait l’habitude d’écluser quelques verres de gnôle pour fêter ça. Et visiblement, pendant ces libations, le propriétaire n’avait pas demandé à la miss d’aller amener Pâquerette au taureau. Elle en était assez imbibée et l’odeur de ces fruits du verger distillés est plutôt tenace. Alors me voilà embarqué avec une passagère qui sent bon le terroir tous azimuts. J’en prenais plus avec le nez qu’avec un aspirateur. Heureusement que je ne suis pas tombé dans un contrôle de police, car pour sûr, il me faisaient souffler dans le ballon. Restait quand même un petit espoir, et les jambes de la demoiselle? Je dus déchanter bien vite, car le jupe qui était remontée assez haut, ne laissait pas de doute sur la présence de collants. Connaissant son pédigree, je ne l’imaginais pas trop aller traire Pâquerette en porte-jarretelles. De toute façon, les vaches et même le taureau s’en foutent.
Le problème avec cette histoire, c’est qu’il est difficile de mettre une illustration en rapport avec un texte qui ne parle pas de bas. Alors pour contourner l’obstacle, je vais l’illustrer avec ma pensée juste au moment ou j’aperçois la fille au bord de la route.On peut rêver!
Nous avons vu récemment l’histoire de cet avion perdu dans les Andes où les survivants durent manger de la chair humaine pour survivre.
N’allez surtout pas croire que c’est une première, manger son prochain est aussi vieux que l’existence de l’homme sur notre très bizarre planète. Chez les Cannibales, c’était une pratique relativement courante. L’existence de cette vilaine habitude fut rapportée par Christophe Colomb lors de son séjour à Saint Domingue. Il s’agissait surtout d’une coutume guerrière qui consistait à manger les vaincus, principalement pour assumer définitivement sa suprématie.
Sous nos latitudes, il va sans dire que cette pratique n’existe pas, en théorie du moins. Il ne faut pourtant pas grand doute qu’ici et là, on a mis cela en pratique.
Plusieurs assassins en série pratiquèrent le cannibalisme de façon plus ou moins avouée. Dans ces cas, en humour noir on peut dire que c’était pour leur consommation personnelle. Mais il existe aussi un moyen encore pire, c’est de faire manger de la chair humaine à l’insu du consommateur.
A moins d’être un consommateur averti, bien peu de gens sont capables de différencier un morceau de viande et son animal d’origine. L’exercice est déjà difficile quand la viande est entière, mais quand elle est hachée cela relève presque de la haute voltige. La preuve évidente, ce sont les scandales qui ont éclaté ces dernières années, avec des plats étant à base de ceci alors qu’ils étaient à base de cela. L’industrie alimentaire, à part nous infliger de mauvaises habitudes, nous fait avaler n’importe.
Dans cette bonne ville de Paris, il y a une histoire qui a longtemps circulé et qui circule encore. Elle est ancienne, et on ne sait plus très bien quand elle s’est déroulée, mais on en trouve de nombreuses mentions à travers divers ouvrages. Voici le résumé de cette histoire dans un ouvrage datant du 19ème siècle.
La rue de Marmousets existe encore, c’est aujourd’hui une très courte artère, jadis plus longue, de quelques mètres dans le 13e. Autrefois, il y avait dans Paris des noms de rues qui étaient plutôt gratinés. Mais pour bien comprendre, il faut se rappeler un peu d’histoire.
Ce bon Louis IX, dit Saint Louis, a une aversion pour la prostitution. Il en interdit la pratique dans ce qui était alors Paris intra-muros. Ces braves dames et leur suite durent alors s’exiler au delà des fortifications, en gros le quartier du Sentier actuel vers le Boulevard Sébastopol et la rue Saint-Denis. Bien sûr, par la suite Paris s’étendit et avala toutes ces rues pour en faire la ville actuelle. Mais le quartier resta dédié au commerce du sexe, la rue Siant-Denis est encore une rue où l’on fait le commerce du sexe, mais ce n’est plus une rue entièrement dédiée à cela. Jusqu’au 19ème siècle perdurèrent des noms de rues dont le nom de baptême fut choisi au coin du bons sens par rapport au activités qui faisaient la réputation les lieux. On y trouvait notamment:
La rue Gratte-Cul, devenue Dussoubs
La rue du Tire-Boudin, devenue Mary Stuart
La rue du Poil au Cul devenue Pélican
La rue Pute-y-Muse devenue Petit-Musc
La rue des Vertus, nom d’origine donné par ironie… n’a pas changé de nom!
Comme la plupart des villes qui ont des siècles d’existence, on peut remarquer qu’elles savent s’entourer d’un certain folklore local. Paris ne fait pas exception à la règle, c’est même très prononcé, alliant l’esprit latin à une certaine envie de fronde toujours très présent dans la mentalité du représentant local. Fait plutôt rarissime, la ville possède un parler très structuré et vaste, l’argot. Pour une partie, on y trouve des mots typiques, mais dans l’autre c’est un détournement avéré des mots courants. De quoi rendre fou, le touriste qui carbure au français académique. Imaginez ce que peut donner dans l’esprit d’un touriste qui entend l’expression « elle est allé aux asperges », il va très certainement penser qu’une personne va acheter des asperges ou va faire son marché s’il a un peu d’imagination. Dans la réalité, l’expression veut dire que la personne va se prostituer. Il faut admettre que l’expression argotique est nettement plus rigolote. Ne parle pas l’argot qui veut, mais sans le savoir nous connaissons quand même un certain nombre de ces mots pour les avoir entendus dans un film ou dans une chanson. Bon nombre de mots ont passé dans le langage courant et même franchi les frontières des pays francophones alentours. Avec un peu d’imagination et de volonté, on peut deviner la signification quand ils se glissent dans une conversation. Par exemple, dans l’expression « carmer l’apéro », carmer veut bien sous-entendre payer l’apéro.
L’argot n’est pas né par hasard. A l’origine c’était un parlé employé à bon escient par les malfaiteurs, le milieu, pour n’être compris que par les gens du même bord. Il connut un regain d’utilité pendant l’occupation allemande, employé par les résistants et autres personnes en mal avec les Allemands pour pouvoir converser sans trop de risques, car les oreilles ennemies pouvaient traîner dans le coin. Il peut y avoir aussi un argot propre à une profession, un groupe social, qui ne sera pas forcément clairement compris par ceux d’un autre groupe. Parler et comprendre parfaitement l’argot est comme posséder une autre langue, bien qu’elle ne soit pas reconnue officiellement, c’est sans doute son charme le plus cocasse.
Prenons quelques exemples, mots propres et expressions figurées, avec un endroit que l’on connaît bien : le bistrot.
Bistrot : le café, le restaurant. Sans doute un des mots d’argot les plus connus dans le monde entier.
Loufiat : le serveur typiquement parisien
Chômeur : un verre d’eau car les sans emploi n’ont en principe pas les moyens de se payer du vrai.
Rhabiller la fillette : remplir un verre vide.
Pompette : ivre.
Avoir les lunettes en peau de saucisson : ne plus y voir très clair en étant ivre.
Dégobiller : par extension à dégoupiller, vomir en ayant trop bu.
Consolante : quand le patron d’un bistrot encaisse les consommations.
Coup de l’étrier : boire un dernier dernier verre avant de partir.
Jaja : vin mais plutôt de basse qualité.
Boire en Suisse : boire tout seul.
Paris ne serait rien sans quelques photos. Il n’y a qu’à piocher dans la vaste collection des photos anciennes, bien plus intéressantes que celles d’aujourd’hui. Non seulement elles donnent une idée de hier, mais aussi de la manière de vivre d’alors. C’est parfois assez marrant.
Le genre de prise de vue presque impensable aujourd’hui. Vous remarquerez au dessus de l’enseigne de la pharmacie, une publicité vantant l’allégresse du vin. On est dans les années 50.
Un bout de rue où les piétons traversent ces fameux passages cloutés. Il est indiqué qu’elle a été prise dans les années 50 sans plus de précisions. Mais l’histoire est un vaste domaine où chacun peut selon ses connaissances préciser certains détails et apporter quelques lumières C’est justement mon cas pour cette photo.
Sur l’espèce de cabane qui est derrière le monsieur, nous trouvons une publicité qui concerne la chanteuse Brenda Lee et la mention « Dynamite ». Connaissant mes classiques du rock and roll par coeur, je peux avancer que ce disque dont il s’agit probablement d’une pub pour la publication française, date de 1958. On peut donc avancer que cette photo date de 1958 – 59, mais pas avant. On peut aussi supposer que cette édifice qui a l’air de faire partie d’un chantier n’est pas resté des années à cet endroit, donc la date donnée est assez précise.
Même remarque pour cette image. Sur le kiosque on voit mentionnée le nom de Dalida sur une affiche. En sachant qu’elle est surtout connue depuis 1957…
Des bagnoles qui feraient la joie des collectionneurs et pourtant banales à l’époque
Paris est assurément la ville qui a enfanté le plus de chansons. Citez-moi des chansons qui contiennent des noms de villes. Vous en trouverez certainement, Londres, Rome, New York, San Francisco, cela existe. Un des critères de jugement pour la popularité est certainement celles qui sont créés par des artistes étrangers. Il est plus facile pour un Italien d’écrire une chanson sur Rome ou Venise, ou un Américain d’en faire une sur New York. Mais qu’un étranger fasse une chanson sur Paris et qu’en plus elle devienne un standard, c’est un hommage rendu à la ville. Remarquez qu’un chanson peut rendre hommage à Paris sans forcément avoir son nom sans le titre. Les célèbres chansons « Pigalle » ou « Ménilmontand » ne peuvent être dissociées de Paris. Mais avant tout, s’il y a un instrument qui symbolise Paris, c’est bien le piano à bretelles. Un des plus célèbres airs de musette, enregistré pendant l’occupation par Tony Murena
Dans le style des reprises voici la superbe version, un peu jazzy, du « Sous Le Ciel De Paris » par Andy Williams
Pour les création originales, la superbe chanson toute romantique de Paul Anka « Les Filles De Paris »
Une des plus célèbres chansons anglophones sur Paris fut composée par Cole Porter dans les années 20. Il en existe des centaines de versions. Voici celle d’un des plus grands crooners de tous les temps, Bing Crosby.
Je n’ai jamais caché ma préférence pour le cinéma français des années 30. Ce n’est pas la seule période intéressante, mais celle-là aligne les grands films plus que tout autre. Entre Marcel Carné, Jean Renoir, Julien Duvivier et quelques autres, il y a de quoi se scotcher à l’écran. Depuis que le cinéma parle, vers la fin des années 20, il a conservé cette aspect un peu théâtral de l’acteur, une grande partie vient de là, en y ajoutant une voix qui est son autre carte de visite. La trilogie de Pagnol est presque plus gravée dans les mémoires par les voix que par les interprétations. Avec « Le Jour Se Lève » Marcel Carné explore le monde ouvrier de l’immédiat après Front populaire. Ce qui attire en premier lieu l’oeil du spectateur, c’est sans doute le décor. Des banlieues enfumées par les usines, le matin gris qui se lève alors que le monde se rend à son travail. C’est la place rêvée pour qu’un drame se déroule, il va d’ailleurs se construire sous les yeux du spectateur. L’histoire de déroule à l’envers, on assiste par de nombreux retours en arrière aux faits qui vont y conduire, des flashbacks, une technique peu expérimentée à l’époque. François (Jean Gabin) est un ouvrier pas trop mécontent de son sort. Il fait un travail pénible de sableur dans une usine avec son collègue Gaston (Bernard Blier). Il tombe amoureux de Françoise (Jacqueline Laurent), une jeune fleuriste qui ne répond pas de manière empressée à ses avances. Un autre homme Valentin, un baratineur dresseur de chiens (Jules Berry), a également des vues sur elle. Il n’hésite pas à la faire passer pour sa fille afin de décourager François, tout en lui proférant des menaces. La maîtresse de Valentin, Clara (Arletty), tente de le consoler à sa manière et de le mettre en garde, elle qui le connaît bien. Ainsi, le drame peut se nouer qui ira jusqu’à l’assassinat de Valentin par François. L’interprétation est majestueuse, Gabin tient là un de ses grand rôles. La scène finale est un moment d’anthologie. Jules Berry dans son rôle de cynique est toujours parfait. On aime le détester. Comme dans beaucoup de ses apparitions, on voit l’homme du théâtre, parfois jouant comme il le sent et non comme on veut qu’il joue. Arletty est dans son premier rôle dramatique, elle ne démérite pas, égale à sa légende. Carné qui a déjà entamé une collaboration avec Jacques Prévert poursuit avec lui. Il signe les dialogues parfois savoureux du film. Il aura encore l’occasion de rencontrer sur sa route quelques grandes réussites du cinéma de cette époque, qui deviendront mythiques aussi grâce à lui. Tant par son ambiance, par ses scènes remarquables, ses dialogues, ce film restera à jamais un moment inoubliable. Il passe d’autant mieux à la postérité qu’il semble toujours trouver un public pour l’aduler. Il peut aussi se regarder comme un documentaire hors du temps, la vie dans les années 30, ses joies, mais plus encore, ses drames.
Autour du film
Le film fut à sa sortie assez fraîchement accueilli par le public qui ne comprenait pas trop la narration du film en flashback. Par la suite, une introduction expliquait le déroulement du film.
La censure fit supprimer une scène du film où Arletty était nue.
Tourné dans un contexte difficile, la guerre approchait, il fut au début de l’occupation, pour finalement ressortir en 1942. Il connut alors un succès plus conséquent.
La maison où habite Gabin est construite spécialement pour le film. Il n’y a pas de mur à l’arrière, ce qui permettra à la caméra de faire des plans en sautant allègrement les étages. Il y a aussi de nombreux décors érigés spécialement pour le film.
Jacqueline Laurent a été imposé à Carné par Prévert dont il était l’amant à l’époque.
En hommage un film, une rue à Boulogne-Billancourt porte le nom du film.
Avec : Jean Gabin (François), Jules Berry (Valentin), Arletty (Clara), Mady Berry (La concierge), René Génin (Le concierge), Arthur Devère (M. Gerbois), René Bergeron (Le patron du café), Bernard Blier (Gaston), Marcel Pérès. 1h33.