Lundi en nylon sans avoir la trouille

Cinéma

La Grande Frousse, plus tard La Cité de l’indicible peur est un film de Jean-Pierre Mocky en noir et blanc, réalisé en 1964. Il est inspiré du roman de Jean Ray,  La Cité de l’indicible peur écrit pendant la guerre. Jean Ray (1887-1964) est le plus important auteur fantastique belge du siècle passé. Connu pour nombres de romans d’obédience noires et d’épouvante, il écrivit aussi la suite des enquêtes d’Harry Dickson.

Mocky raconte qu’on lui avait suggéré de réaliser un film fantastique, ce genre étant peu couru dans le cinéma français, sans toutefois recourir à Dracula ou à Frankenstein. C’est ainsi que le roman de Jean Ray finit par être adopté. Dans l’histoire originale, la trame se situe dans une ville anglaise, Ingersham. C’est une assez belle étude de moeurs sur quelques citoyens résidents, chacun ayant ses petits secrets et mesquineries, mais s’intéressant en premier lieu à ce que fait le voisin. Une ambiance sinistre et la peur semble régner sur la cité, mais personne ne saurait dire au juste pourquoi. On craint sans trop savoir ce qu’il y a à craindre, sinon  un fantôme ou un monstre dont on suppose qu’il existe dans quelque coin caché guettant sa proie. Mythe ou réalité, c’est ce que devra découvrir le personnage central du roman.

Mocky transpose son déroulement en France en Auvergne, à Barges mais en réalité Salers, tout en s’inspirant assez librement de l’histoire originale. Il garde néanmoins les personnages quelquefois savoureux de l’histoire, tout en les francisant tant pour le nom que pour le caractère. Un des grandes forces du film pour les cinéphiles, c’est l’apparition d’une multitude d’acteurs de renom dans des séquences plus ou moins brèves, se caricaturant eux-mêmes avec un certain plaisir. Le rôle principal est tenu par Bourvil, et ma foi on le sent très à l’aise dans ce rôle, c’est même un l’un des se très bons rôles. Le terme de comédie fantastique convient assez bien à la classification du film, on se prête à rire et à sourire tout au long de l’histoire.

Le plot du film

L’inspecteur Triquet (Bourvil), un farfelu pistonné par son oncle chef de la police, réussit bien malgré-lui l’arrestation de Mickey le bénédictin, un redoutable criminel et faux-monnayeur. Sur le point d’être guillotiné, il parvient  à s’enfuir. En se basant sur la théorie que l’assassin revient toujours sur les lieux de son crime, Triquet et son collègue Virgus (Marcel Pérès) se lancent à sa poursuite en se partageant les villes où il a commis ses méfaits. C’est ainsi que Triquet arrive à Barges et commence une enquête qui se voudrait discrète en questionnant les gens sur un chauve frileux qui déteste la cassoulet et qui séjournerait le village, ce qui correspond à la personnalité de Mickey le bénédictin. On le suit dans ses pérégrinations et sa rencontre avec les habitants pittoresques et souvent un peu fêlés de Barges. Bien vite son rôle de flic est découvert, mais la population qui se méprend sur ses capacités d’enquêteur, lui demande d’arrêter la bête maléfique qui hante le village et ses alentours. Il y parvient toujours sans faire vraiment exprès et on découvre qu’il s’agit d’un notable du coin. Il est fêté par la population, mais peu après commence une série de meurtres véritables, et la c’est beaucoup plus difficile pour Triquet et son flair proverbial.

Distribution

  • Bourvil : L’inspecteur Simon Triquet
  • Véronique Nordey : Livina, la secrétaire du maire
  • Francis Blanche : M. Franqui
  • Jean-Louis Barrault : M. Douve, employé de mairie
  • Jacques Dufilho : M. Gosseran, le jardinier
  • Victor Francen : M. Clabert, le docteur alcoolique
  • René-Louis Lafforgue : Le boucher
  • Roger Legris : M. Paul, le pharmacien
  • Jean Poiret : Le brigadier Loupiac
  • Raymond Rouleau : M. Chabriant, le maire
  • Marcel Pérès : L’inspecteur Virgus
  • Joë Davray : Mickey le bénédictin
  • Jenny Orléans : Mme Gosseran
  • Fred Pasquali : Le chef de la police et oncle de Simon
  • Rudy Lenoir : Le patron du café et le coiffeur
  • Jean-Claude Remoleux : L’homme à l’imperméable
  • Pierre Durou : Le chef de gare de Barges
  • Virginie Valois : Dorothée, la sœur de Livina
  • Léonce Corne : Antoine, le brigadier
  • Claude Mansard : Le bourreau décapité
  • Lisette Lebon : Une employée au bordel
  • Michel Duplaix : Le contrôleur bègue
  • Pierre Raffo : Un cavalier noir
  • Gérard Hoffmann : Un cavalier noir
  • Jo Labarrère : Un cavalier noir
  • Dominique Zardi : L’infirmier du commissariat
  • Philippe Castelli : Le photographe
  • Max Desrau : Le petit journaliste
  • Maria-Rosa Rodriguez : Gilda
  • François Cadet : L’adjoint du bourreau
  • Michel Nastorg
  • Luc Andrieux
  • Maritin
  • André Muletin
  • César Torrès
  • Avec le concours de la population locale de Salers.

Je suis arrivé à ce film justement parce que j’avais lu le roman de Jean Ray quand j’étais adolescent, j’ai commencé à lire du fantastique vers l’âge de 13 ans et j’avais Ray en point de mire, j’avais adoré. l’histoire. Je suis pratiquement toujours déçu quand je vois un film tiré d’un roman, la dissonance entre le récit de Ray et le film m’a fait buter sur le même  phénomène. Mais pour une fois, j’ai réussi à faire abstraction et j’ai fini par trouver le film délectable. Sans doute la maestria de Mocky y est pour quelque chose, il se pose quand même comme un cinéaste de premier plan et le choix des acteurs est idéal pour faire tourner le carrousel des acteurs qui passent sous vos yeux.

A propos du film.

René-Louis Lafforgue qui joue le rôle du boucher chante aussi la chanson du générique dont Mocky a écrit les parole.

A sa sortie le film ne connut qu’un succès mitigé dans son titre original imposé par la production, ce qui fâcha Mocky. Mais il connut une seconde vague d’intérêt en 1972 sous le titre original du roman. De manière générale la critique considère ce film comme une oeuvre majeure dans la filmographie de Mocky.