Je suppose que vous connaissez Mr Bertillon, l’inventeur de l’anthropométrie. C’est grâce à lui que vous avez peut être fait un séjour en prison. Même s’il n’est pas dans vos intentions de le remercier, il vous reste quand même la possibilité d’admirer son travail. car il a été mis en pratique dans le monde entier. En 1886, il a donné une conférence sur l’évolution de la population à Paris au cours des siècles. Jusqu’alors on avait une idée assez vague du nombre d’habitants que pouvait compter la ville et de qui elle se composait. La seule chose qui est certaine, c’est qu’à travers les siècles les villes se sont développées au gré des fantaisies d’un monde en constant mouvement. Pourquoi ici plutôt que là, la question reste ouverte. Une situation en bord de rivière ou de fleuve est une probabilité à tenir en compte. Par exemple, on sait très bien que l’Egypte dépendait presque entièrement du Nil et des crues pour rythmer la vie et les récoltes. Les Romains furent un peu plus entreprenants dans ce domaine et bâtirent leurs fameux aqueducs afin d’amener l’eau dans des endroits où elle manquait. On peut remarquer sur une carte géographique que la plupart des villes sont construites dans un endroit où il y a de l’eau, rivière, lac, embouchure dans la mer. Heureusement, l’eau a la faculté de couler et de parcourir des milliers de kilomètres, ce qui permet d’avoir de l’eau dans un endroit où il ne pleut pas ou pas beaucoup. La chaîne des Alpes sert de château d’eau pour une grande partie de l’Europe. Comme illustration à ce propos, notons qu’en Suisse il y a une localité, Pompaples, que l’on surnomme Le milieu du Monde. La raison en est simple et humoristique. Une petite rivière se sépare en deux près d’un moulin, un bras ira se jeter dans la mer du Nord, l’autre dans la Méditerranée. L’endroit est immortalisé dans une poème de Paul Budry :
« A Pompaples est une fontaine dont l’eau fuit au Rhône et au Rhin, lorsque j’y vais pleurer ma peine, nord et sud savent mon chagrin. »
Les villes ont toujours constitué un carrefour pour la culture, c’est un de ses multiples attraits. Imaginons Victor Hugo écrivant ses romans dans un coin reculé des Cévennes et ne quittant pas ce lieu, il est plus que probable qu’il serait inconnu aujourd’hui. Mais regardons plus en détail l’étude de Bertillon. que ne fait d’ailleurs pas allusion à la présence de Paris au bord de la Seine. Je ne sais pas quel parallèle on peut tirer entre son étude et la situation d’aujourd’hui. Mais si l’on se réfère à certains clichés actuels,, tout n’est pas si différent maintenant. Il est certain que où que l’on se trouve, on est toujours l’étranger de quelqu’un. Ces petites guerres que l’on se faisait entre villages, merveilleusement racontées par Louis Pergaud dans La Guerre des boutons, en sont le premier échelon.
Sources Galliva, BNF, DP