Bas nylons et lignes d’enfances

 

Si je prends mon cas personnel et que je remonte à mon enfance, la lecture était un moyen de s’évader même si l’on n’était pas en prison. Ce que furent mes lectures jusqu’à l’âge de 12 ans peuvent se résumer à deux ou trois tendances. La BD que je n’aborderai pas ici, les journaux magazines qui ne sont pas très éloignés de la BD, et surtout le livre sous forme de littérature pour la jeunesse. Durant ces années, j’ai toujours haï la littérature classique Hugo, Balzac, Dumas, je l’aborderai plus tard à l’âge adulte, sans que cela devienne pour autant une véritable passion, les livres éducatifs, scientifiques, d’histoire, les éclipseront même pas mal. En quantité de nombres de livres différents lus du même auteur, il y en a deux qui surclassent les autres, Enid Blyton et San-Antonio. Le second n’a rien à voir avec l’enfance, je dois avoir commencé à lire les premiers vers l’âge de 16 ans, mais avec Blyton on est en plein dedans. Tous héros confondus cela doit approcher la centaine (plus de 150 pour San-Antonio), par contre je n’ai jamais abordé les histoires écrites pour les très petits, je suis resté partiellement dans la tranche adolescence. A titre purement récréatif, il m’arrive encore d’en relire aujourd’hui, ce que j’en ai gardé et ce qu’ils m’inspirent aujourd’hui, c’est justement ce que je vais aborder.

Le Club des Cinq (Famous Five) est bien entendu la série la plus connue et la plus populaire, je les ai tous lus. Sur la vingtaine d’histoires parues, je n’en garderai que quatre ou cinq, « en randonnée », « va camper », « se distingue », « en péril », « aux sports d’hiver ». Si j’aime ce choix c’est parce que les histoires se passent dans des endroits isolés, coins perdus, maisons solitaires.

Le Clan des Sept (Secret Seven) est le pendant en moins bien du Club des Cinq. En lisant la série phare on ne pouvait manquer de glisser vers celle-ci. Les histoires sont plus courtes et l’intrigue plus ténue, mais ce n’est pas dénué de charme. C’est également une assez longue série puisque qu’il y a un quinzaine de volumes en traduction française.

Série Mystère, plus tard les Cinq détectives (Five-Find Outers). Sans aucun doute la série la plus humoristique de Blyton. Elle est aussi laissée dans son contexte original, contrairement aux précédents où l’intrigue est transposée en France, elle se déroule dans un village anglais. Il aurait été assez difficile de l’exporter car une des vedettes de la série est le représentant local de la loi, Mr Groody, un policier typiquement anglais jusqu’à la caricature. Dans chaque histoire, il y a une énigme à élucider, mais les cinq détectives emmenés par Fatty (Blyton affirma qu’elle s’est inspirée d’un personnage réel) , un jeune débrouillard qui veut entrer dans la police quand il sera grand, vont mettre leur matière grise à contribution. Ce sera toujours au détriment de celui dont c’est en principe le travail, Mr Groody. Il est vrai que ce dernier n’est pas très futé, imbu de sa personne et irascible de caractère. Le comique de l’histoire réside principalement dans la manière qu’ont les enfants pour l’envoyer sur de mauvaises pistes et lui jouer des tour pendables. Dans un des volumes, Mr Groody déniche lui-même de véritables indices, mais croyant à une nouvelle farce des enfants, les apporte en main propres aux détectives. Il faut préciser que Fatty est un as du travesti, il n’a pas son pareil pour se transformer en gitane diseuse de bonne aventure, ou en vieillard à la voix chevrotante et même en ventriloque. C’est aussi une assez longue série avec des enquêtes plutôt bien ficelées.

Serie Mystère (Barney Mysteries). C’est peut-être un des regrets que l’on peut avoir avec cette série, elle ne contient que six histoires. Blyton a imaginé pour une fois un personnage un peu décalé, pas très conformiste et orphelin, Toufou et son chien qui imite en tout son maître. Il est cousin des deux autres héros de ces aventures, Roger et Nelly.  La série débute par la rencontre d’un jeune vagabond avec une guenon, un enfant de la balle, à la recherche de son père. C’est une suite d’histoires qui s’enchaînent, mais dont chaque volume est indépendant. Dans l’histoire initiale, Le Mystère du vieux manoir, ils devront chercher la raison des mystérieux bruits qui résonnent la nuit dans un manoir isolé. C’est une assez belle description d’un lieu abandonné où les habitants on « eu des malheurs ». Malheureusement l’adaptation française a supprimé des chapitres de l’édition originale. Dans la série, une autre histoire est très proche par l’ambiance Le Mystère de monsieur personne où l’équipe est dans un manoir isolé par les chutes de neiges. Un bonhomme de neige semble avoir pris vie et un mystérieux personnage vient au milieu de la nuit faire aller le heurtoir de la porte d’entrée qui fait trembler tout la maison. Il semble aussi avoir la faculté de passer à travers les murs. J’adore cette série.

Série Mystère, plus tard Arthur & Cie (Adventure Series). Pour une fois cela se terminera par un mariage. En effet, une des personnages dont les héros feront connaissance dans la première aventure, Le Mystère de l’île aux mouettes, est un détective qui finira par épouser la femme qui a la charge des enfants. Il se retrouveront pour huit aventures dont Le Mystère du nid d’aigle, est l’une des meilleures.

Série Mystère, plus tard les 4 Arnaud (Secret Series). Une autre équipe qui connaît d’autres aventures. La première Le Mystère de l’île verte, est assez décalée, mais c’est pour moi une très bon récit. Des enfants confiés par les parents partis en voyage à des gens qui s’avèrent malveillants (c’est fou dans l’oeuvre de Blyton ce que les parents voyagent ou ne sont pas toujours très responsables), décident de les fuir et de se réfugier sur une île au milieu d’un lac en attendant qu’ils reviennent. Un enfant du voisinage pas toujours bien traité, s’enfuit avec eux en emmenant avec lui sa vache, Pâquerette, qui s’avère très bonne nageuse.  Ils y séjourneront presque une année en se débouillant avec les moyens du bord, mais devront surtout tenter de passer inaperçus sur cette île qui n’est pas au milieu du Pacifique. Il est bien évident qu’on les recherche ou alors ce sont des touristes qui estiment que l’île est l’endroit rêvé pour faire un pique-nique. Se camoufler dans les arbres est relativement facile, mais les vaches c’est bien connu, ne grimpent pas aux arbres. On peut imaginer que l’auteure s’est inspirée d’un autre célèbre Robinson. Les autres aventures de cette famille sont plaisantes et se déroulent plutôt à l’étranger.

Blyton a écrit d’autres livres qui rentent dans la catégorie Mystère. Mais ce sont des récits uniques avec des personnages qui changent à chaque histoire. On peut s’attarder sur Le Mystère du message secret, Le Mystère de la péniche, Le Mystère du flambeau d’argent. On y retrouve l’ambiance Blyton, les passages secrets, les souterrains, les châteaux en ruines, les enfants qui doivent se débrouiller contre les adultes malveillants.

On a pas mal reproché de choses à Blyton, mais je crois que son succès est sa meilleure carte de visite. Il faut toujours avoir à l’oeil, et c’est nécessaire d’en avoir au moins un pour la lire, que ce sont avant tout des récits destinés à l’enfance. Si j’avais un reproche à lui faire, ce serait celui de ne pas les avoir rendu, en glissant quelques détails de plus dans son récit, plus vraisemblables. Ces détails, je les ai remarqués que j’ai relu les histoires à l’âge adulte, enfant je n’y avais vu que du feu. Par exemple dans une des aventures, une ligne de chemin de fer aboutit dans un endroit pratiquement désert en sortant d’un tunnel, il y a une gare, de multiples aiguillages, des dépôts etc… Dans le fil de l’histoire on append que la ligne a été abandonnée il y a bien longtemps faute de voyageurs. Mais quelle compagnie de chemin de fer percerait un tunnel, construirait tout une infrastructure, pour amener le train dans un endroit où il n’y a qu’en tout ou pour tout une maison qui se trouve au moins à deux kilomètres ? Une précision du genre : « jadis il y avait une mine de charbon » justifierait la présence de cette gare. Dans la même histoire, une locomotive à vapeur passe de l’état d’arrêt total à celui de marche. On peut gager que Mme Blyton ne devait pas souvent chauffer de l’eau pour son thé, car elle aurait remarqué que pour que la vapeur se produise, il faut du temps. Et pour une locomotive, c’est beaucoup plus long. Il faut allumer la chaudière en y mettant du charbon, attendre que la vapeur se fasse, que la pression soit au top, ensuite elle peut partir. Mais bon ce n’est pas plus décalé que d’autres récits destinés à la jeunesse.

Je lisais un commentaire à propos d’un livre de la série. Il disait que si il l’avait lu pour la première fois à 25 ans, il l’aurait jeté par la fenêtre. Mais comme il le relisait après l’avoir adoré en étant jeune, c’était une merveille de le relire.  Je crois que cela résume bien le sujet. On devrait tous garder une partie d’enfance à quelque part, relire Blyton est un moyen d’y parvenir comme si on relisait un Tintin pour le centième fois. Certes bien des histoires, sinon toutes, supportent mal le passage du temps, il serait pour le moins incongru de voir le Club des Cinq ou le commissaire Maigret avec des téléphones portables, ou Robinson Crusoé regardant la télévision.  En Angleterre, il y a un site anglophone qui réunit tous les fans de Blyton et ce ne sont pas que des écoliers qui le fréquentent. Il y a une dizaine d’années, de jeunes Français ont tourné en amateurs une adaptation du Club des Cinq en randonnée. Le film est visible sur Youtube et il a déjà été vu plus de 1 700 000 fois. De là à dire que plus personne ne s’intéresse à ces aventures, il y a un pas que je ne franchirai pas. Le meilleur conseil que je puisse vous donner si vous désirez vous lancer dans l’aventure, c’est de privilégier les veilles éditions, années 50 ou 60, avec les illustration d’époque, elles illustrent et collent au plus juste le fil de l’histoire à l’époque où elle se déroule. De plus, les brocantes en sont amplement fournies à des prix souvent dérisoires, je défie quiconque de ne pas trouver un livre de Blyton dans n’importe quel marché aux puces.

4 réflexions sur “Bas nylons et lignes d’enfances

  1. Bonjour M. Boss,
    Avec ce post, vous tombez en plein dans mon enfance, j’ai dévoré toute la collection du Club des cinq et du Clan des sept, avec une préférence pour le club des cinq, en revanche je n’ai pas lu la série « Le Mystère » car j’étais passé à la Bibliothèque verte …avec les livres de Georges BAYARD et la série « MICHEL » qui touchait les plus grands !!!
    Et comme vous ça m’arrive de les parcourir quand je vais chez ma mère, ils sont encore sur une étagère, et comme vous dites, ces livres font partie de nous mêmes, c’est pareil pour la musique et les disques qui sont ancrés en nous.
    Bonne fin de semaine
    cooldan

    • Hello Cooldan,
      J’ai aussi un peu tâté du Michel, je dois avoir lu les 5 premiers. il y avait les Alice qui n’étaient pas mal non plus. J’ai assez vite bifurqué vers d’autres lectures grâce à un copain d’école qui avait une frère plus âgé que lui qui lui filait des bouquins. J’ai découvert en particulier la littérature fantastique, Jean Ray, Claude Seignolle, Lovecraft et ce qui paraissait au Fleuve Noir dans la série « Angoisse ». J’ai aussi eu deux profs à l’école qui me conseillaient quelques livres pas piqués des vers pour l’époque, je crois que c’est le second qui m’a aiguillé sur San-Antonio. Après, j’ai découvert d’autres horizons, les livres d’histoire et scientifiques en font partie.
      Mais je suis toujours revenu régulièrement vers mes premières lectures, comme vous dites c’est ancré en nous au même titre que la musique.
      Bon week-end

  2. Bonjour Mr Boss

    Sympa ce retour sur les héros den notre jeunesse.
    Le seul livre de Enid Blyton que j’ai lu était « Boum et le clown » vers l’âge de 10 ans environ.
    J’étais plus intéressé par les BD d’aventures style « Bob Morane  » ou « Rahan » de Lécureux que par les livres pour enfants.
    Mais je me souviens que la TV passait dans l’émission du mercredi après-midi (les Visiteurs du Mercredi) des épisodes produits par la TV anglaise et adaptés d’un roman du Club des Cinq (il y avait un chien appelé Dagobert, il me semble).
    Les grands classiques littéraires, je ne les ai lus que partiellement et surtout en classe de Seconde et Première. Mais je préférais en voir l’adaptation ciné comme « Notre-Dame de Paris de Jean Delannoy avec la sculpturale Sophia Loren et Anthony Quinn. Même si parfois le réalisateur se permet des « arrangements » avec l’œuvre ! C’est un choix.
    Bonne journée. Peter.

    • Hello Peter,
      En effet toutes les histoires du CD5 ont fait l’objet d’adaptations pour le télévision, même deux fois avec des acteurs différents à 20 ans d’intervalle. Il y a bien un chien qui s’appelle Dagobert,
      Bob Morane, je n’ai jamais pu m’y mettre, ça ne passait pas. L’auteur est toujours en vie, li a fêté des 100 ans, cela doit bien l’avoir conservé.
      Les classiques à l’écran, il y a du bon et du mauvais, mais une histoire comme les « Misérables » qui fait 2000 pages, comment l’adapter sans trahir ? Pour être honnête, je n’ai jamais vu un film supérieur au livre, parmi ceux que j’ai lus bien sûr. Par contre, j’ai bien aimé certains films dont je n’ai pas lu le livre dont l’histoire est tirée. Je crois qu’il faut séparer les deux, les images qui naissent dans notre esprit à la lecture d’un livre seront toujours trahies pas l’écran et les images de l’écran se figent dans les mots.
      Bon week-end

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