Un cuvée dans le garage

Un voyage dans les obscurités garage punk sixties. Les Américains furent les rois dans ce domaine. Tout bled perdu au fin fond d’un état et qui avait au moins 500 habitants, avait son studio d’enregistrement. Très souvent, de petits groupes du coin acquirent une certaine dextérité musicale et surtout n’avaient guère d’autres distractions pour passer le temps. Le deal, c’était de se faire remarquer par un label de plus grande envergure et signer un contra. Pour cela, des directeurs artistiques sillonnaient les campagnes à la recherches de ces perles rares. Quelquefois ils en trouvaient, et beaucoup plus rarement ils parvenaient à en faire des plus ou moins grosses vedettes. Rien ne s’est vraiment perdu, car ces disques furent compilés dans des centaines de galettes vinyles dans les années 70 et 80. Moi-même, j’en possède une belle collection, certaines depuis 40 ans. Je les considère vraiment comme le testament de la part obscure des sixties. Voici une sélection dans n’importe quel ordre, le seul pont commun c’est que ce sont des groupes américains d’époque entre garage et début du psychédélique.

Bas nylons et descente à Harlem

Encore une de ces chansons qui semblent devoir rester dans l’ombre, mais qui comme par magie réussissent a devenir des classiques, à tel point que même les grandes stars s’y collent. C’est même pour moi une histoire qui m’a fait jouer à Madame Irma, car j’avais imaginé cette chanson dans le répertoire des Rolling Stones. Ils m’ont fait patienter une vingtaine d’années, mais ils ont fini par l’enregistrer, cette chanson s’appelle « Harlem Shuffle ».

L’avènement de cette chanson est une suite de faits divers propres au showbiz, on se réunit, de sépare, se retrouve. C’est le duo Bob & Earl qui créa la version originale en 1963. Avant cela, ils furent deux membres d’un groupe de R&B noir des années 50, les Hollywood Flames, qui eut une succès assez conséquent avec « Buzz, Buzz, Buzz en 1957. Le Bob du duo entama une carrière solo sous le nom de Bobby Day. Il connu un succès conséquent en créant au moins 3 classiques du genre, « Rockin’ Robin' », « Little Bitty Pretty One », « Over And Over », que l’on retrouvera plus tard au répertoire des Hollies, des Paramounts (pré Procol Harum), Dave Clark Five, qui classa sa version en tête du hit parade US (« Les Yeux Bleus » dans l’adaptation française de Sacha Distel). Bobby Day retrouve son compère Earl Nelson au début des années 1960 et enregistres quelques singles sans trop de succès. Bobby Day redémarre un carrière solo  et Nelson cherche un autre Bob qu’il trouve en la personne de Bobby Relf. C’est cette mouture qui enregistrera « Harlem Shuffle », dont ils sont d’ailleurs les compositeurs. Le futur et fameux Barry White en fera l’arrangement. Sans être un grand succès à sa sortie, le disque se fera quand même assez bien remarquer pour susciter quelques reprises, surtout après à la forte poussée de la tendance R&B en 1966. Malgré tout en 1969, une réédition du disque en Angleterre propulsera le titre dans le top ten, lui assurant une nouvelle et plus définitive visibilité. Et puis, bien évidemment la reprise des Rolling Stone en 1986 lui donnera un parfum d’éternité Selon certaines sources, George Harrison aurait affirmé que c’était sa chanson préférée. La chanson apparaît dans un classement établi par le Daily Telegraph qui énumère les 50 meilleures chanson enregistrées par un duo.

La version originale, 1963.

Une version un peu garage, les Fabulous Flippers, USA 1965.

La version qui m’a fait découvrir ce titre, Doc Thomas Group un première mouture de Mott The hoople, 1966.

Sans doute la première version par quelqu’un de très connu, les Righteous Brothers, 1967.

A ma connaissance, il n’y a jamais eu de version française, toutefois l’excellent Vigon l’enregistra en 1967.

Terry Knight & The Pack ou Fabulous Pack, une mouture de Grand Funk Railroad, 1967.

Le version du groupe anglais The Action vers 1969.

La même année, la résurrection d’un ancien groupe, créateurs de « You’ll Never Do It Baby » repris par les Pretty Things.

Une version disco, 1979.

La version des Rolling Stones, 1986.

Quand on écoute « Harlem Shuffle » on a toujours 20 ans,

Bas nylons et idées noires à la cour

On connaît plutôt bien la vie de Louis XIV, il a tout fait pour entrer dans l’histoire, mais même avec tout l’éclairage que l’on possède, certaines zones restent dans l’ombre et permettent aux historiens d’y aller de leurs hypothèses. Certaines apparaîtront farfelues cela ne fait pas de doute, mais parmi toutes ces fanfaronnades, il doit bien y en avoir une qui cerne la vérité d’assez près. Et même pourquoi pas la plus farfelue ne serait-elle pas la vérité ? Je ne vais pas ici me transposer à l’historien et y aller de mes convictions et de ma « vérité », je n’ai pas cette prétention.

Un des rares portraits qui existent d’elle, vers 1700

La Mauresse de Moret est entrée dans la petite ou moyenne histoire, elle reste encore une de ces énigmes historiques qui fait encore saliver les historiens. C’est une religieuse métisse que l’on ne connaît que sous le nom de soeur Louise Marie Thérèse, remarquez que les deux derniers prénoms sont ceux de la première femme de Louis XIV. Ce qui a intrigué les contemporains du roi de France et les historiens, c’est qu’elle reçut la visite dans son couvent d’un tas de personnages influents ou célébrités de son temps. On cite Saint-Simon, la femme du frère du Louis XIV, Philippe d’Orléans, dite princesse palatine. On remarque aussi Voltaire, ainsi que toute la smala royale, la reine Marie Thérèse d’Autriche, plus tard Madame de Maintenon, le roi en personne, sans oublier nombre de princes et de princesses. On sait aussi que Louis XIV, lui attribua officiellement une rente. Ce qui semble assez étonnant pour une religieuse métisse non ?

Marie-Thérèse d’Autriche, 1ère femme de Louis XIV

Voilà les bases sur lesquelles partent les historiens pour éclairer cette zone d’ombre. Trois hypothèses reviennent fréquemment, c’est probablement l’une d’entre elles qui doit avoir les accents de vérité.

Première hypothèse : elle serait la fille de la reine qui aurait fauté avec quelque amant de passage ou personnage de la cour de race noire ou maure, peut-être son très jeune page, un nabot noir qui disparut mystérieusement peu après, ceci selon certaines sources invérifiables. Elle serait en réalité Marie Anne de France, troisième enfant de la reine qui officiellement mourut un mois après sa naissance en 1661, et qui aurait alors survécu. L’enterrement officiel ne serait alors qu’un simulacre destiné à cacher la chose. Il faut prendre en compte que lorsque la reine accouchait, il y avait à peine moins de monde qu’au carnaval de Nice dans la chambre où elle accouchait. En effet, une naissance royale devait avoir nombre de témoins, ceci afin de certifier que l’enfant était bien de descendance royale, les cocufiages étant réservés. Des ambassadeurs étaient aussi présents, car un manque de descendance pouvait attirer les prétentions de royaumes étrangers, les cousinages et autres liens familiaux étaient relativement courants dans la noblesse. Un enfant noir naissant aurait sans doute attiré l’attention de l’entourage, bien qu’ils n’étaient pas tous autour du lit royal, on pouvait encore par subterfuge le dissimuler en créant une situation d’urgence, un grand malaise de la reine par exemple. Toujours selon le bruits qui coururent, Madame de Motteville aurait vu l’enfant et se serait trouvé mal en voyant qu’il était noir. Cette théorie, pas complètement irréaliste mais qui souffre quand même de points assez obscurs,  est sans doute la plus partagée par ceux qui ne sont pas spécialistes en histoire, il y a un petit côté libertinage à la française qui flatte l’ego.

Louis XVI

Deuxième hypothèse : ce serait bien une fille de Louis XIV, mais conçue avec une personne de couleur. Ce cher Louis était un chaud lapin, s’il y a bien un point où les historiens sont tous d’accord, c’est celui-là, il aurait eu une relation discrète avec cette personne. Tombée enceinte, le roi qui était plutôt beau joueur en la matière, aurait assumé sa « faute ». Seulement il y avait certaines nuances, il leur donnait le « titre » de bâtard royal, surtout ceux qu’il avait avec de nobles dames, il le fit quelquefois. Pour les autres c’était une pension qu’il attribuait, encore une fois selon son bon vouloir. Dans le cas qui nous occupe ici, les choses vont un peu plus loin, elle semble entourée d’une certaine aura, vu le nombre de visiteurs auréolés qu’elle recevait. Certes, elle fut cachée, on ne la vit jamais à la cour, mais Louis XIV qui n’était pas à un caprice près, aurait pu l’assumer. Le problème vient peut-être de la couleur, si les enfants hors lit conjugal se portaient assez bien, il n’en allait pas de même pour ses descendants officiels, ils moururent tous avant lui. Alors imaginons un enfant officiel d’une autre race aurait pu quelque peu brouiller les cartes royales, surtout qu’elle mourut bien après lui, probablement en 1732. Selon certaines sources, la religieuse affirma elle-même être une fille royale. Mais encore une fois on ne possède pas de vraie certitude, quelques indices assez frêles, et la pièce qui manque au puzzle, qui fut la mère ? Possiblement une comédienne noire, chose qui existait à la cour. Cette deuxième théorie a aussi ses partisans, là on s’approche plus du travail d’historien, une analyse ADN pourrait apporter des éclaircissements, si on pouvait réunir les éléments nécessaires.

Troisième hypothèse : elle ne serait pas de sang royal mais une protégée de Louis XIV, la piste de la soeur d’une religieuse noire, ou une simple orpheline est évoquée, Le roi ou quelqu’un de son entourage l’aurait protégée pour des raisons inconnues. Rappelons que les rois de France étaient persuadés d’être des représentants de droit divin et élus par Dieu sur cette bonne vieille terre. Louis XIV mena bien une vie de débauche, mais sous l’influence de la très pieuse Madame de Maintenon notamment, il se racheta quelque peu une conduite un peu plus vertueuse les trente dernières années de sa vie. Le fait d’avoir parrainé, converti au catholicisme par le baptême , fait entrer dans les ordres, une personne probablement avec des racines musulmanes, pouvait sembler à ses yeux comme une dette envers le ciel. La piste de la fille d’une couple de serviteurs maures qui aurait demandé à Madame de Maintenon de s’occuper de leur fille par nécessité est également proposée. Cette dernière dont les générosité n’est pas qu’une légende pourrait l’avoir fait en la faisant entrer au couvent mais on se heurte alors aux visites de la reine Marie-Thérèse, antérieures à l’mancipation à la cour de Madame de Maintenon. Ces dernières pistes sont souvent évoquées par ceux qui ne croient pas à la filiation royale. Il est vrai que c’est la plus simple en apparence, mais elle n’explique pas ou mal, l’intérêt de la famille royale et la noblesse à son égard.

Madame de Maintenon

Bien entendu, il peut exister à côté de ces hypothèses, toutes sortes d’affirmation plus ou moins farfelues, chacun peut y aller de sa petite théorie. C’est un fait d’histoire resté mystérieux et qui probablement le restera. La seule certitude reste que cette étrange personne a réellement existé, qu’il existe des documents qui semblent prouver que Louis XIV lui versa une pension. Le reste n’est que rumeurs de l’époque, et Dieu sait si on avait le temps de parler à une époque où les gens qui ne travaillaient pas n’avaient pas grand chose d’autre à faire. La vérité a existé à quelque part, des gens savaient, mais plus de 300 ans après il ne reste même plus des souvenirs.