En passant

Bas nylons et une certaine Marianne

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Retournons un peu à l’histoire, celle qui ne figure dans les livres que par les grandes lignes, mais qui s’étale dans les journaux d’époque dont nous ne retiendrons que l’humour. Explorons un magazine hebdomadaire qui s’appelle Marianne, fondé par Gaston Gallimard, l’éditeur. C’est un ancêtre sans lien avec celui du même nom qui existe aujourd’hui. Il paraîtra entre 1932 et 1940. Assez orienté à gauche, pacifiste, il veut rassembler une élite intellectuelle francophone et sans frontières du même bord. Il ne sera jamais un phénomène de ventes, se limitant à un tirage de 60000 exemplaires. On y retrouve des plumes plus ou moins prestigieuses, mais qui comptent dans un domaine ou un autre. Antoine de Saint-Exupéry, Georges Auric, Julien Benda, Pierre Mac Orlan, Jean Rostand, Henri Troyat, Herbert George Wells, Marlène Dietrich, Marie Bonaparte, Suzanne Chantal, Marcel Aymé, contribuèrent dans ses colonnes.

Dans un numéro daté du 12 juin 1940, la date a toute son importance, il se positionne sur les faits avérés à cette date. Pour rappel, nous sommes en pleine invasion allemande, à une dizaine de jours de la signature de l’armistice, et avec un jour de plus, de la visite d’un certain célèbre moustachu à Paris. Il faut bien avoir à l’esprit qu’une revue ne se prépare pas à la dernière minute, et que l’avance de l’armée allemande se fait au pas de charge. Donc, il existe un certain décalage entre ce que les pages pouvaient afficher avec un optimisme modéré, et la réalité du terrain. Ils n’étaient d’ailleurs pas les seuls. L’humour, les dessins humoristiques, les caricatures sont résolument anti-allemands. Seul point noir du numéro, on reconnaît là un certain utopisme de gauche qui choisit bien ses adversaires mais pas toujours bien ses amis, il fait presque l’éloge de Pétain et du général Huntziger, qui deviendront de vilains collabos. Comme promis, je ne m’en tiendrai qu’aux illustrations qui valent tous les discours, en commençant par un dessin du célèbre Dubout qui nous explique sa vision de la fameuse « cinquième colonne ». Ce numéro sera en fait le dernier dans cette formule. Après une tentative de relancer le magazine en zone libre, de manière plus conventionnelle, il disparût définitivement au mois d’août. J’ai gardé les images dans leurs dimensions originales, vous pouvez cliquer dessus pour une meilleure vue.

Source Gallica, BNP, DP

4 réflexions sur “Bas nylons et une certaine Marianne

  1. Bonjour Mr Boss,

    « Vice pacem para bellum » ! « Si tu veux la paix, prépares la guerre » !
    Curieux paradoxe.
    Le jeu de mot et l’ironie tentent de dissiper le malaise de ce cruel conflit qui s’engagera partout en Europe.
    La deuxième, troisième et quatrième image me rappelle mon cours d’Histoire de Seconde (1983) où un caricaturiste résumait l’invasion de l’URSS en 1941, en trois dessins : un salut des troupes réelles, puis en second, des soldats fantomatiques couverts de neige et en derniers des croix gammées enneigées marchant au pas de l’oie, pour personnifier l’enlisement , réel et figuré, de cette opération.
    Seul note drôle : Dubout dont la galerie de personnages fait penser à l’univers pagnolesque. D’ailleurs, en juin prochain, ce douloureux épisode de notre Histoire sera certainement d’actualité… pour mémoire !
    La guerre de 1870 fut un désastre pour nous par excès de confiance de notre état-major et une impréparation des troupes et, avec le recul du temps, on s’aperçoit que l’Histoire a rejoué le même scénario…
    On dit souvent qu’elle devrait nous être profitable et pourtant il arrive que l’on retombe dans les ornières du passé !
    Bon WE. Peter.

    • Hello Peter,
      C’est sûr que bien des époques et pays n’ont pas su regarder le passé, on recommence les mêmes erreurs. Toutes les excuses sont bonnes pour désigner un ennemi, le pire c’est les gens qui marchent à fond dans la combine. Je m’intéresse surtout à la politique pour la critiquer, je n’adhère à aucune tendance q’elle soit de gauche et encore moins de droite, elles ne sont parfaites en aucun cas. Si j’ai peut-être un ennemi, cela doit être forcément quelqu’un que je connais en vrai, pas un mec qui habite dans le pays à côté ou à 5000 kilomètres de moi. Ca c’est la politique qui veut m’entraîner là-dedans, très souvent pour des raisons qui nous sont cachées, souvent des intérêts économiques ou de pure domination idéologique. Me battre pour ça, jamais !
      Je sais que l’on peut vivre en bonne intelligence avec des gens qui proviennent de différentes cultures. J’ai des copains, noirs, musulmans, orientaux. Quand on se rencontre, on parle surtout justement de culture, de musique, on échange notre vécu, on confronte nos idées tout à fait cordialement et on rigole bien. Je ne vais pas changer quoi que ce soit dans mon attitude, si d’aventure on me le désignait comme ennemi. Lors d’un de mes anniversaires, j’avais invité une couple d’homosexuels que je connais. Ils étaient là au même titre que les autres, ce sont des amis, malgré leur différence. Je peux même affirmer que ce sont eux qui ont amené les plus beaux cadeaux. autant du point de vue bon goût que financièrement parlant. Alors…
      Pour parler dessin et Dubout, son dessin résume mieux que mille mots ce qu’il pensait. J’ai quelques copains qui sont dans la caricature et la satire politique, je les admire car je sais qu’ils ont une vision très fine de la société. Ils lancent une idée et c’est un peu à nous de trouver la suite et les réponses. Cela pousse souvent à la réflexion, plus qu’un discours où les paroles s’envolent.
      Bon week-end.

  2. Bonsoir Mr Boss,

    C’est juste. La méconnaissance des gens et des choses nourrissent la méfiance voire l’hostilité. Et c’est bien dommage. Et je pense que la réciproque est vraie.
    Tout cela est orchestré à des fins de profit, matériels ou immatériels. Et le passé regorge de tels exemples. Bref.
    La satire de la société dans son ensemble est un exercice d’analyse très fouillé qui n’est pas à la portée de tout le monde. Nos humoristes s’y essaient avec des fortunes diverses.
    En ce domaine, en leur temps, les écrivains du Grand Siècle ont excellé. En particulier, Molière avec sa verve prolifique a su critiquer la société bourgeoise, notamment dans sa pièce « le Misanthrope » ou « Tartuffe » qui lui valut quelques problèmes avec les instances religieuses notamment..
    De son côté, et d’une manière plus feutrée, Jean de La Fontaine, au travers de ses « Fables », fustige les travers de notre société en les transposant dans le monde animal où ils sont personnifiés. Habile stratagème !
    Mais le Roi n’est pas dupe et malgré les critiques de son entourage, il protège les artistes qui servent, malgré la teneur de leurs écrits parfois, sa gloire personnelle.
    « Le rire, c’est le pain du pauvre et il est rare ! » (cf. dialogue dans « Le Fou du Roi » –
    M. Leeb -1987).
    Et en cela, la société restera toujours un terreau favorable pour les artistes de tous poils.
    Bon WE. Peter.

  3. Hello Peter,
    En effet, les humoristes manquent parfois leurs cibles. Bien sûr Molière est Molière et La Fontaine sont toujours d’actualité et des références sûres. Je pense aussi que Louis XIV tout roi qu’il était ne manquait pas d’un certain humour. Saint-Simon qui ne le portait pas trop dans son coeur, lui a toujours concédé d’être un homme juste.
    Bonne semaine

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