Au temps du vinyle, la production phonographique française est assez minimaliste par rapport à un pays comme les USA. Cela ne veut pas dire qu’elle n’existe pas. Malgré tout, une immense partie de cette production restera dans l’ombre, par manque de soutien de la presse spécialisée, par manque de diffusion radiophonique, par manque promotion. Je me souviens d’avoir vu chez les disquaires des représentants de maison de disques faire la promotion de nouveautés du catalogue. Ils n’avaient rien de différent des autres représentants, sauf qu’ils vendaient ou faisaient la promotion des disques au lieu de brosses ou d’assurances. Il y avait ce qui était en demande, les fameux succès du moment, et des trucs moins connus ou inconnus qu’il fallait essayer de refiler au disquaire en vantant la marchandise, charge à lui d’en souligner les mérites auprès d’une clientèle dont il connaissait les goûts.
Malgré cela une très grande partie de cette production est restée inconnue, ne s’est pas ou mal vendue, c’est en général ces disques qui font le bonheur des encyclopédistes, même certains sont devenus de très estimables pièces de collection. Allons faire un tour dans ces publications dont la plupart vous sont inconnues, autant les chansons que les artistes, à moins que vous n’ayez été un chasseur de disques averti pour quelques uns d’entre eux. Toutes les publication dont je parle ici ont bien été éditées en France et sont uniquement des 45 tours.
Pour varier, nous irons faire un tour en Allemagne selon le même principe. Durant les sixties le scène musicale allemande fut beaucoup plus animée qu’en France, ici les groupes sont presque une exception, tandis qu’outre-Rhin c’est le contraire. Mais on retrouve le même phénomène, ne devient pas star qui veut, les fonds de tiroir et les obscurités existent aussi. Je parle uniquement de 45 tours et si certains des artistes que je cite ici ne devinrent jamais des stars, les plus chanceux d’entre eux eurent une renommée locale. Ce qui est encore plus certain, c’est qu’ils furent complètement ignorés en France-
1965 – The Details / What Shall I Do. Dans les sixties le label Bellaphon était plutôt un label mineur, signant des artistes secondaires sans vraiment que ceux-ci éclatent au niveau national. Voici un exemple de 1965 sur ce label, un de ces groupes qui existaient parmi des centaines sur la scène musicale allemande très prolifique. Ce disque, je l’ai découvert grâce à un collectionneur allemand, et comble de bonheur il en avait une copie à double. C’est musicalement assez proche du garage punk américain. Toutefois au moins une licence Bellaphon fut publiée par President en France (Casey Jones & Governors). Plus tard au tournant des seventies, le label se hissa au rang de major, publiant notamment le label Chess et en 1977 les fameuses bandes des Beatles au Star-Club.
1967 – The Savages / Why Don’t You Say. Même label, autre groupe avec un nom plutôt prétentieux quand on écoute leur musique.
1965 – The Kentuckys / Uncle Willy. Encore du Ballaphon avec la reprise d’un titre R&B assez obscur popularisé par Zoot Money et Brian Poole & les Tremoloes. Ce groupe obtint une petite popularité en Allemagne, un peu parce qu’ils avaient des cheveux plus longs que la moyenne et aussi habillés en femmes pour la rigolade. Cette version est plutôt bonne.
1965 – The Rollicks / Das Totenschiff. Le hit des Islanders repris en France par Sacha Distel & Sheila (Un Bateau S’en Va), ici en instrumental. Les Rollicks eurent un petit goût de succès avec leur reprise du « Let’s Go » des Routers.
Frederic & Rangers / I’m On The Outside. Ce groupe fit deux tentatives phonographiques dont celle-ci. Peu connus même en Allemagne. Cela fait au moins 50 ans que je n’avais pas entendu ce disque que j’avais jadis possédé.
1966 – The Faces / Cry Cry Cry. Un de ces groupes surtout connus pour avoir occupé la scène du Star-Club de Hambourg. Très souvent en dehors de celle-ci ils n’étaient pas grand chose. J’ai eu la chance de rencontrer le batteur de ce groupe en 2002 en Allemagne, Mr Niels Taby. On a un peu discuté entre deux bières, très sympathique, il m’a signalé que sa grande passion c’était Johnny Kidd. A part ça une belle reprise du titre de Bobby Bland.
1966 – Ian & Zodiacs / No Money No Honey. Un groupe d’origine anglaise assez ambitieux qui publia quelques belles galettes surtout en Allemagne avec des succès modérés.
1965 – The Blizzards / I’m Your Guy. A l’étranger ils sont surtout connus pour avoir enregistré en allemand une cover de « Heart Full Of Soul » des Yardbirds. Mais ils chantent aussi en anglais et c’est pas mal du tout.
1968 – The Blackbirds / No Destination. Une petite perle alors que la musique se faisait un peu plus planante. De tous les disques que je vous ai proposés ici, c’est certainement celui que j’ai écouté des centaines de fois, eh ou ça fait 50 ans.
1964 – The Javalins / Scherben. La tentation d’une carrière en Allemagne n’était pas le fait uniquement des Anglais. Ce groupe était bel et bien hollandais, mais testa le coup en Allemagne avec une adaptation toute germanique de « Bits And Pieces » de Dave Clark Five.
1967 – The Ones / Lady Greengrass / Love Of Mine. C’est une des plus prestigieuses pièces de collection du label Star-Club pour au moins deux raisons. La première c’est que cela n’a pas marché, la seconde c’est que ce groupe est une première mouture des célèbres Tangerine Dream. Et que c’est beau !!!
1966 – The Rebbels / Come Back. Après avoir joué le jeu des albums de reprises quelque chose de plus original, du beat et de la fuzz guitar. C’est toujours un de ces disques, qui sans être exceptionnel se trouve très bien dans une collection pour les amateurs du genre. Je le possède même avec une pochette aux couleurs alternées dont je n’ai vu mention nulle part, le lettrage est violet au lieu d’être rouge. Le monde est plein de mystères…