En passant

Bas nylons et une bagnole qui roule en Finlande

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Au tournant des sixties, l’option pour les teenagers de parvenir à la célébrité en jouant de la musique devint obsessionnelle pour une partie d’entre eux. C’est le cas en Angleterre, ainsi que pour de nombreux autres pays. Ce qui emballa la machine, c’est que les jeunes deviennent des consommateurs, le marché est intéressant et la situation sociale fait qu’il y a un boum consumériste d’après-guerre, l’argent circule. Jusqu’en 1960, l’Angleterre a son propre marché musical, on observe surtout ce qui se passe aux USA et parfois on importe les hits américains via des artistes locaux, ou alors on s’inspire du style. Il en va ainsi pour le skiffle, mélange de jazz et de folklore américain. Le rock and roll est relativement peu présent du point de vue production locale. Seuls Tommy Steele et Cliff Richard peuvent prétendre, avec quelques personnages plus secondaires comme Vince Taylor ou Wee Willie Harris, à se coller une étiquette rock. Comme consolation, pas mal d’artistes anglais trouvent un débouché en Allemagne sur les bases américaines encore stationnées dans le pays. L’armée US veut divertir ses soldats  et ne regarde pas à la dépense, on fait naturellement appel aux Anglais, géographiquement très proches et parlant la même langue. On sait que les Beatles font partie de cette équipe, plus spécialement trois d’entre eux. A partir de 1963, quand ils commencent à conquérir musicalement le monde, reléguant les USA au second plan pendant deux ou trois ans, la demande en produits musicaux anglais se fait plus pressante. Comme on ne peut pas cloner les Beatles, tout les sujets de sa majesté qui font de la musique sont les bienvenus. Un nombre incroyable d’artistes, surtout des groupes, trouvent un emploi plus ou moins lucratif. Le marché devient vite encombré, il faut essayer de décrocher un contrat ou aller voir ailleurs.
Nous allons parcourir, du moins partiellement, la carrière d’un de ces groupes qui trouva le succès ailleurs. Si je m’arrête sur eux, c’est qu’ils furent plutôt du genre intéressant, ils surent faire de très originales reprises, à côté d’un répertoire assez important de compositions originales, dont un album entier. Ils ont immanquablement un style et un son personnel. J’en ai déjà parlé ici, il s’agit des Renegades. Pendant longtemps, j’ai ignoré pas mal de choses sur eux. J’avais en tout et pour tout, le EP paru en France. Dans les années 1970, lors de voyages en Italie, j’ai découvert pas mal de pressages italiens, et un vendeur m’a confirmé qu’ils avaient eu pas mal de succès dans le pays. Verrs la fin des années 1980, j’ai eu un échange avec un collectionneur finlandais qui m’a appris toute l’importance qu’à eu ce groupe en Finlande. Mieux que ça, il m’a fourni une discographie de ce qui avait été publié là-bas. Il m’a même refilé un CD qui regroupait les deux premiers albums finlandais. Cerise sur le gateau, il m’a envoyé une vidéo VHS avec le groupe en live, celle que je vous propose plus bas. Par la suite, j’ai complété avec les vinyles dont plusieurs publications allemandes et trois albums d’époque dont deux allemands et un hollandais. En 1998, je suis allé à la foire aux disques de MIlan, coup de chance Kim Brown était présent, du moins ça m’avait l’air d’être lui. Je lui ai demandé et il m’a répondu oui. Malheureusement, je n’avais rien à faire signer, ni rien pour faire une photo. et après l’échange de quelques mots, il a du partir. Dommage, j’aurais bien bu un pot avec lui.
Ils viennent de Birmingham et se formèrent en 1960. Le groupe original se compose de Denys Gibson (1945-2016), guitare solo; Kim Brown (1945-2011), chant, guitare rythmique, claviers; Ian Mallet (1945-2007), basse; Graham Johnson, (1946- ), seul survivant, batterie. Les débuts sont très modestes, à part se produire sur des scènes locales, l’horizon est bouché. En 1964, ils ont la possibilité d’enregistrer un album de reprises de hits, mais ils ne sont même pas crédités. Un de leurs enregistrements apparaît aussi sur un album d’artistes divers dédié aux groupes de Birmingham « Brum Beat ». Les choses s’accélèrent quand ils ont la possibilité de se produire en Finlande. Ils reçoivent un accueil triomphal, ce qui décide un producteur local de leur signer un contrat. Ils sont assez remuants sur scène et ont adopté comme tenue de scène les uniformes de l’armée nordiste de la guerre de Sécession. La Finlande a trouvé un succédané aux Beatles qui ne se produiront jamais dans ce pays. Ils mettent en boîte un morceau qui deviendra leur titre fétiche « Cadillac ». C’est une réécriture de « Brand New Cadillac » de Vince Taylor, dont ils ont changé le rythme et aussi adapté les paroles. C’est un gros succès local, qui dépassera largement les frontières du pays et les fera connaître pratiquement dans toute l’Europe. Deux groupes suédois, les Shamrocks (avec lesquels les Renegades échangeront des compositions), les Hep Stars (avec Benny Anderson futur Abba), en feront des succès personnels via leur propres versions, no 1 en Suède pour les Hep Stars. Un grand nombre de groupes en réaliseront aussi une adaptation. Parallèlement, ils entament aussi une carrière fructueuse en Italie, en quelque sorte leur troisième patrie. Ils sortiront plusieurs albums et des enregistrements en italien dont une version de « Cadillac ». Denys Gibson quitte le groupe en 1966 remplacé par Joe Dunnett et Mick Webley en septembre 1967.  Sous leur nom, ils continueront d’enregistrer jusqu’en 1970, des titres moins intéressants. Par la suite, Kim Brown et Graham Johnson continueront dans un groupe de rock revival très populaire en Italie. Kim & The Cadillacs. En 1987, ils se reforment pour jouer en Finlande, ils arrivent à remplir des salles de 5000 personnes. Graham Johnson, le seul survivant, est encore accueilli en héros en Finlade, il vit en Italie, la télévision finlandise lui a même consacré un reportage en 2019. Le groupe a encore de nombreux fans dans le pays et ce qui pourrait fortement ressembler à un culte.
Nous allons explorer la discographie du groupe entre 1964 et 1967, je vous mettrai les commentaires adéquats avec les clips.

1964 – Une reprise de « Love Me Do » des Beatles sur l’album « The Mersey Sound » où ils ne sont pas crédités. On devine déjà le son qui sera le leur plus tard.

Le titre qui figure sur la compilation « Brum Beat » version rock d’une mélodie classique de Brahms.

Clip en playback du fameux « Cadillac ». Numéro 2 en Finlande,

Face B de « Cadillac » dans de nombreux pays. Un original un peu pompé sur le « Dr Feelgood » de Johnny Kidd.

Second single Finlande, reprise d’un traditionnel folk.

Troisième single Finlande, un très bel original.

Une de leurs plus belles réussites et un de leurs plus emblématiques enregistrements. Un dépoussiérage total d’un vieux titre de Bill Haley (historiquement ce titre était la face A de « Rock Around The Clock » avant que les radios se décident pour programmer l’autre face. Tourné en Finlande, le clip est sur le playback du titre. C’est assez décadent pour l’époque. Y’a de l’ambiance !

Reprise de « Take A Heart » des Sorrows, bien dans leur style. Ce titre figure aussi sur le seul EP français paru chez Riviera avec « Cadillac »

Un très bel original des Renegades qui fait partie de ces échanges de titres enregistré avec les Shamrocks, titre publié en France sur le premier EP des Shamrocks avec leur version de « Cadillac »

Ici c’est l’inverse ce sont les Renegades qui reprennent un titre des Shamrocks.

Un titre original qui figure sur le troisième album finlandais.

La chanson qu’ils présentèrent au festival de San Remo en Italie, en même temps que les Yardbirds autres concurrents. C’est bien sûr enregistré en italien. Clip sur le palyback.

Un titre du troisième album finlandais « Pop », un album entièrement composé d’originaux signés par le groupe.

Documents

Heureusement, il existe pas mal de petits films qui retracent le parcours des Renegades, en voici quelques uns.

« Cadillac » en live en 1965 en Finlande, un petit moment de folie. Monter le son, car c’est assez faible. C’est le problème avec les gens qui ont toujours le volume à coin. Il manque juste un petit bout à la fin.

Une reprise de « Long Tall Shorty » en live. Ca bouge pas mal. Ils devaient avoir pas mal de présence sur scène.

En vrai live, « Take A Heart » à peine différent de la version studio.

Seven Daffodils en live. Le son n’est pas top et les commentaires en surimpression ne sont pas les miens. Il faut aller la voir sur Yiutube, elle n’est pas en partage

Clip de 2001 en Finlande, trois membres originaux sauf Denys Gibson remplacé par Trutz Groth.

Graham Johnson aujourd’hui

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2 réflexions sur “Bas nylons et une bagnole qui roule en Finlande

  1. Bonjour M.Boss
    Merci pour ce voyage en Finlande , il est vrai que je ne connaissais pas grand chose de ce groupe , je dois l’avouer je suis passer un peu au travers !!
    Très intéressant cependant.
    Bonne semaine
    cooldan

    • Hello Cooldan,
      Comme je l’ai dit, pendant longtemps mes seules connaissances se sont limitées au EP français. Bien qu’avec mes copains de l’époque, on flashait tous sur « Cadillac » et aussi pas mal de groupes qui l’ont repris comme les Shamrocks. Assez bizarrement, personne ne l’a repris en adaptation française. Enfin j’ai rattrapé le temps perdu, mais c’est un groupe que j’aime bien et que je trouve assez classe. Comme quoi s’ils n’avaient pas eu de succès en Finlande, ou aurait loupé quelque chose.
      Bonne semaine

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