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Allons nous promener du côte de Versailles, pas tellement pour y parler de rois et de reines, mais pour ouvrir une porte sur l’étrange. Voilà plus de cent ans, l’innocente promenade de deux Anglaises souleva un intérêt passionné de la part de tous les amateurs de paranormal. L’histoire parut dans les journaux, un livre fut publié en Angleterre et il connut un beau succès. Bien des années plus tard, il fut traduit en français et même Jean Cocteau y fut mêlé.
C’est une histoire de voyage dans le temps, sujet cher aux amateurs de science fiction. C’est pourtant une réalité dont vous pouvez constater le résultat en regardant dans le ciel quand il est visible. Vous voyez des milliers d’étoiles dont la lumière a mis un certain nombre d’années pour parvenir à vos yeux. De quelques minutes pour la lumière du Soleil, à des milliards d’années pour les plus lointaines. Prenons une étoile que l’on peut considérer comme voisine, puisqu’elle n’est qu’à environ quatre années lumière de nous, Proxima Centaure. Si vous la regardez et que soudain vous la voyez exploser à ce moment précis, cette explosion a eu lieu il y a environ quatre ans. Donc, vous voyez maintenant quelque chose qui s’est produit dans le passé. Tout en étant dans le présent, vous avez voyagé dans le passé. C’est déjà une vieille théorie et une certitude, le passé arrive jusqu’à nous via la vitesse de la lumière. Pour rappel, ce que l’on nomme années lumières, est basé sur la distance qu’elle parcourt en une année, car elle se déplace, mais à une vitesse fantastique. Nos yeux perçoivent la lumière, mais ne se rendent pas compte quelle n’est pas immobile dans l’espace. Le son le fait aussi et c’est plus perceptible pour nous, car le son voyage très lentement par rapport à la lumière et aussi la distance qu’il parcourt est proportionnelle à son amplitude. Peu de chance d’entendre un âne braire à 2 km, par contre un gros avion qui est à 8000 mètres d’altitude au dessus de vous, vous risquez de percevoir son ronronnement quand il y a du silence autour de vous. C’est en partie aussi vrai pour la lumière, plus le faisceau lumineux est grand, plus on l’apercevra de loin, mais la lumière continuera sa course dans l’espace. Elle durera pour un observateur lointain ce qu’aura duré le phénomène qui l’a engendré. On peut comparer le phénomène à une flèche lumineuse qui se déplace dans l’espace, la pointe sera le début du phénomène et la queue la fin. La lumière est aussi un peu plus « magique », par une nuit noire vous pourrez voir la lumière d’une lampe de poche à des kilomètres, le bout rougeoyant de votre cigarette est perceptible à des centaines de mètres et pourtant ce n’est pas grand. A supposer que votre voisin a une bagnole qui enclenche simultanément le moteur et les phares quand il tourne la clef de contact et que ce garage se trouve à 337 mètres de votre point de vision, il va se passer ceci: vous verrez les phares s’allumer presque instantanément et le bruit du moteur vous parviendra au bout d’une seconde, 337 mètres étant la distance que parcourt le son en une seconde par temps calme.
Je reprends une photo que j’avais déjà publiée pour monter l’efficacité d’un zoom photographie. Cette maison se trouve à vol d’oiseau à 7 km de l’endroit où je prenais la photographie. Supposons que j’ai braqué le zoom en pleine nuit et qu’une personne fume devant la maison toutes lumières éteintes à l’intérieur. Il est fort possible que j’aperçoive la lumière de sa cigarette, surtout s’il tire dessus. Ce petit pont lumineux aura voyagé jusqu’à moi pour que mon objectif puisse déceler sa présence.
Maintenant regardons un des aspects du voyage dans le temps. Cela n’a rien à voir avec les théories d’Einstein, Rosen, ou Hawking. Eux par le calcul étudient le voyage dans le temps avec la relativité, tout se passe un peu dans l’espace. Ils affirment que ce voyage est possible, autant dans le passé que vers le futur, mais il nécessite des moyens que nous n’avons pas ou pas encore, et même s’ils seront possibles un jour avec les avancées de la science. Alors au lieu de regarder en l’air, regardons parterre et essayons de transposer ces phénomènes sur terre. Laissons de côté le son pour l’instant. Pouvons-nous apercevoir au présent un événement terrestre qui s’est produit il y a plus de 100 ans? Difficile d’apporter un certitude, alors quand on n’en a pas, on peut faire des théories, comme Einstein. Abandonnons le sens qui s’appelle vision et parlons de celui de l’odorat. Le nôtre n’est pas très développé, mais il nous permet d’identifier quelques centaines ou milliers d’odeurs, selon qu’il est plus ou moins développé chez les personnes. Par exemple, les chiens font beaucoup mieux, ils sont capables de suivre les traces d’une personne plusieurs heures après, donc une personne laisse des traces olfactives quand elle passe à un endroit. Et si nous laissions aussi des traces lumineuses en plus? Ou encore que nous perturbions l’espace en nous déplaçant, un peu comme on le fait quand on nage, après un temps l’eau redevient calme. Je sais, c’est farfelu au niveau des connaissances actuelles, mais si on avait dit à Charlemagne que la Terre n’était pas le centre de l’univers, il en aurait été fort surpris. Et si on avait dit à Louis XIV qu’un jour l’on présenterait dans une langue étrangère et en détail, la chambre où il faisait ses galipettes à travers un téléphone?
La distinction entre le passé, le présent et le futur n’est qu’une illusion, aussi tenace soit-elle – Albert Einstein
Dans l’état actuel de la connaissance scientifique, on a assez bien posé la base de la connaissance de notion de temps, mais peut-être en est on encore à l’âge de la pierre? La notion de ce que nous voyons au présent est transmise à notre cerveau qui l’interprète, mais ce cerveau ne pourrait-il pas capter des images qui ne répondent pas exactement à ce moment présent? Existe-t-il un phénomène inconnu qui, un peu comme un film que l’on regarde à l’envers, ferait défiler une projection de scènes passées dans l’endroit où nous trouvons? Notre cerveau peut-il dans des circonstances particulières qui nous échappent, capter et rembobiner le film, et pourquoi pas passer vers une scène future?
C’est beaucoup de questions pour l’instant sans réponses. Il y en a au moins un fait dont on peut envisager une possibilité assez simple. Nos cerveaux n’échangeraient-ils pas des données et que des scènes vécues par d’autres, ou pourquoi pas dans une vie antérieure personnelle, surgissent dans notre cerveau au moment présent pour une raison ou une autre? Peut-être avez-vous déjà vécu cela sans vous en rendre compte. Prenons des exemples. Vous êtes dans une rue de Paris peu fréquentée, et soudain vous voyez passer une vieille bagnole modèle 1910. Vous allez penser que c’est un amateur de vieilleries qui se promène. où que l’on est en train de tourner un nouvel épisode des Brigades du Tigre, Si c’est la cas rien de plus normal, mais si par hasard cette scène était justement une de ces images surgie du passé, vous ne vous douterez pas qu’elle est irréelle, car elle peut vous sembler plausible. Si vous vous promenez dans la campagne et que soudain vous voyez passer 30 cavaliers avec des lances et des armures, vous risquerez de vous poser quelques questions, dont la première sera sans doute la fait que l’on tourne un film. Le premier cas peut passer comme une lettre à la poste, mais le second posera beaucoup plus de questions, vous allez avoir un doute. Sommes-nous toujours certains que ce que nous voyons est bien réel?
Pour certains d’entre vous, je suis à peu près sûr que dans vos souvenirs vous avez quelques images ou souvenirs dont vous ne pouvez pas préciser à quel moment vous les avez vécus, une histoire dont vous pensez avoir été protagoniste, mais dont vous n’arrivez pas à situer le moment précis et l’endroit où cela s’est passé. Si c’est le cas, il s’agit éventuellement d’une série d’images qui ne vous appartiennent pas. Personnellement j’ai un cas que je n’ai jamais résolu, et avec une certaine assurance, je peux affirmer que le mystère reste entier, malgré des recherches faites sur l’endroit très caractéristique où cela aurait pu se produire. Je n’ai jamais retrouvé quelque chose qui ressemble aux images et paysages que j’ai dans la tête. Dans ces souvenirs, j’ai la certitude d’être un enfant et si c’est moi, les lieux, je le répète très caractéristiques devraient pouvoir être localisés assez facilement, d’autant plus que jusqu’à l’âge de 7 ou 8 ans, je ne suis jamais parti bien loin de chez moi. Je n’ai rien trouvé. J’ai aussi dans mes expériences une vision futuriste, et si je peux avoir un doute sur la réalité de la première, j’ai une certitude pour la seconde. Une nuit j’ai fait un rêve, dans ce rêve il y avait un événement très particulier qui survenait, et ce n’était pas un chat qui se faisait écraser par une voiture, non, quelque chose de beaucoup plus improbable, le truc qui a une chance sur un million de se produire. Une image très précise m’est apparue dans ce rêve.. Eh bien, cette image je l’ai revue 25 ans plus tard, à l’endroit où les faits se sont déroulés, en réel et pas dans un rêve au fond de mon lit. Un rêve prémonitoire en quelque sorte. Etonnant non? Et pourtant je vous jure que c’est vrai !
Si j’ai pris la peine de faire cette introduction, ce n’est pas sans raison, car les faits que vous allez découvrir dans la suite relève justement d’une de ces expériences avec un voyage dans le temps. Vous serez un peu plus critique pour la lire. L’histoire est assez célèbre et se passe à Versailles en 1901, vers le Petit Trianon. Deux Anglaises visitent les lieux et se perdent un peu. Il leur arrive une aventure singulière. Cette aventure, je vous la raconte par un choix d’articles tels que la presse en parla. L’histoire est à peu près la même avec quelques différences dans les détails. Je vous retrouve après pour en parler.
Le Petit Trianon, début 20ème siècle. Les deux protagonistes de l’aventure, Annie Moberly et Eleanor France Jourdian aka Elisabeth Morrison et Frances Lamont, nom de plume.
Journal des débats. 23 avril 1911.
Le Temple de l’Amour vers 1900
Trente ans plus tard dans Gringoire, on mentionne cette histoire,
D’après un carte avant 1900, les lieux où se déroule l’histoire. 1) Temple de l’Amour. 2) Petit Trianon. 3) Grand Trianon.
Une revue qui parle de fantômes mentionne aussi l’histoire.
Les deux Anglaises attendirent une bonne dizaine d’années avant de publier leur histoire, et ce fut sous le nom de plume de Elisabeth Morrison et Frances Lamont. Leur véritable identité ne fut révélée qu’après leur décès. Leur récit reprend les classiques de ceux qui prétendent avoir vécu ce genre d’aventures, sensations étranges, parfois de froid, malaises. Il est aussi mis en lumière que sur le moment elles n’eurent pas vraiment la certitude d’avoir aperçu quelque chose de surnaturel. Chacune ressentit les faits à sa manière, il apparut par la suite qu’elles ne virent pas dans certains cas exactement la même chose. Ce n’est que plus tard en se concertant que l’expérience paranormale fut envisagée. Elles firent des recherches pour comparer entre ce qui était réel et ce qui pouvait relever d’une vision de faits et d’objets surgis du passé. Elles échangèrent une nombreuse correspondance avec une société anglaise Society for Psychical Research, on peut leur laisser le doute, elles firent le nécessaire pour essayer d’y comprendre quelque chose, et revinrent même à Versailles. Quand ce genre d’histoires est publié, il y a bien entendu toujours deux camps, les pour et les contre, croire ou ne pas croire, telle est la question, et en plus cela va bien avec Shakespeare. Une version française post-mortem du livre fut publiée en 1959, avec une préface de Jean Cocteau, et c’est aussi dans ces années-là que l’on fit une découverte qui pourrait accréditer l’histoire, du moins en partie. Quand elles déambulèrent dans le parc, elles virent une bâtisse qu’elles prient pour Le Temple de l’Amour dont elle firent la description. Mais cette description ne correspondait à quelque chose qui était présent en 1901. On découvrit dans les années 1950, dans le fatras des archives de Versailles, les plans d’un kiosque dit chinois, qui lui correspondait parfaitement à la description des visiteuses. Toute la question tourne autour du fait qu’elles ont décrit exactement une bâtisse dont les plans existaient, mais qui n’était pas visible en 1901. Comment pouvaient-elles l’avoir vu? La seule possibilité, qui peut néanmoins exister, c’est que ce fameux plan est tombé entre leurs mains avant la publication de leur récit. Mais j’imagine assez mal qu’on laisse ces deux respectables Anglaises fouiller dans tout Versailles sous prétexte qu’elles ont vu des fantômes.
Je pense qu’une partie de leur récit est vrai, mais l’autre partie me semble un peu brodée. Reprenons ce que j’ai dit dans l’introduction et comparons avec les points qui me gênent.
– En admettant qu’il puisse y avoir une fracture dans l’espace temps et qu’il est possible d’apercevoir une scène passée, je pense qu’il nous sera donné de contempler une scène muette, c’est à dire sans ambiance sonore. Comme nous l’avons vu, la lumière ne meurt pas et traverse les ans ou les siècles, comme le cas de l’explosion de l’étoile en exemple, mais le son meurt, sauf si on l’enregistre. Je ne crois pas que l’espace temps soit muni d’un magnétophone.
– Elles affirment avoir aperçu une homme avec une sale gueule et un autre qui courut vers elles en disant: « Il faut chercher la maison et prendre à droite ! », la citation varie un peu selon les journaux. Je ne crois pas qu’il s’agisse d’un homme surgi du passé. Il est fait mention que les Anglaises virent une noce un peu loin, l’homme aurait simplement cru qu’elles venaient pour elle et leur indiqua le chemin à prendre. Je suis très sceptique qu’il puisse y avoir une interaction entre les gens du passé et ceux du présent, cela voudrait dire que l’on peut influencer le cours de l’histoire. Par hasard, dans les dédales du temps, je rencontre Henri IV et je lui dis qu’il va se faire buter et qu’il ne doit pas passer par la rue de la Ferronnerie le 14 mai 1610, ben oui s’il m’écoute, il faudra changer tous les livres d’histoire. On peut aussi douter que les personnages d’une scène passée puissent nous voir, imaginez la tête de la marquise de Pompadour voyant un punk avec des cheveux verts et une épingle du sureté dans le nez. Une possibilité toutefois, que notre cerveau avec tous ses accessoires, soit pour un moment l’hôte d’un personnage historique présent au moment de la vision, il passera inaperçu pour ceux « du passé ». Cela pourrait expliquer que certaines personnes aient un dédoublement de personnalité à un moment donné. Il y a des cas où entre un moment X et Y, des gens ne se souviennent plus de ce qu’elles ont fait. C’est une pure théorie mais qui sait? On peut aussi prendre en compte, le cas du traditionnel fantôme qui erre sous forme d’esprit et qui à un moment se glisse en vous et en quelque sorte vous « vivez » ses souvenirs, d’autant plus qu’il semblent toujours hanter les lieux où ils ont vécus. On possède quelques témoignages de gens qui se mettent à parler une langue qu’elle n’ont jamais apprise, un reste d’une interaction entre deux cerveaux? Je sais, c’est encore une théorie fantaisiste, mais ce n’est qu’une théorie parmi d’autres, mais qui n’a pas les siennes.
En résumé, cette histoire est à prendre avec des pincettes, bien qu’un partie du récit soit plausible. Il est beaucoup question de Marie-Antoinette, mais nombre de visiteurs disent que son fantôme a été aperçu du côté du Trianon. Il semblerait que cela se produirait plutôt quand le temps est à l’orage. C’était le cas le fameux jour où la veille la température dépassait les 31 degrés et que la météo prédisait une température élevée pour le 10.
Le projecteur intemporel aurait-t-il besoin d’électricité pour se mettre en route? Encore un mystère!
Notes : le site officiel de Versailles fait mention de cette histoire. L’écrivain Georges Chaulet qui a créé la fameuse Fantômette devait connaître cette histoire et s’en être inspiré pour « Fantômette chez le roi ». En effet, il est question d’une aventure qui se déroule à Versailles avec justement une histoire de voyage dans le temps et une rencontre avec Louis XIV.
Source Gallica, BNF, DP