En explorant la cour de Louis XIV, on y rencontre des personnages qui brillèrent grâce à lui. Certains sont ce que l’on pourrait qualifier de vedettes, d’autres sont plus dans l’ombre, et il y a ceux qui étaient promus à un grand avenir et qui pour une raison ou pour une autre eurent un éclat qui ne dura pas, les dames ne sont pas en reste dans ce domaine. Il faut bien admettre que sous le règne de quelques rois de France, on retient tout autant le nom des favorites que celui du royal amant. A côté des maitresses officielles, d’autres dames font évidemment partie de la cour, issues de la petite ou grande noblesse, elles jouent un rôle plus ou moins visible, peut-être en espérant en jouer un encore plus grand. Il y a malgré tout un domaine où les places se vendent cher, celui de l’épouse royale. Il se transmet plutôt en ligne directe. Pour devenir reine, il faut épouser un roi et le titre de successeur passe de père en fils en respectant le droit d’aînesse (Dauphin) ou les viennent en suite si l’aîné meurt, règle prépondérante à la cour de France. S’il y a des reines, ces dernières ne peuvent pas gouverner, seul le mâle y a droit. En cas de manque d’un descendant royal disponible dans l’immédiat ou trop jeune, un personnage de la cour, même une femme, assure la régence. Dans la cas de Louis XIX, c’est sa mère Anne d’Autriche qui l’assura de 1643 à 1651. Son diable de fiston était déjà bel et bien roi à l’âge où il aurait pu jouer au train électrique s’il avait déjà été inventé. Même s’il a le plus long règne de l’histoire de France (72 ans), il n’a vraiment été maître à bord que pendant 64 ans. Il fit largement son devoir conjugal pour assurer sa succession, mais les enfants qu’il a eus avec son épouse légitime Marie-Thérèse, ne font pas de vieux os. Heureusement Louis de France, l’aîné, grandit tant bien que mal. Louis XIV a mieux réussi avec les enfants qu’il a eus avec ses maîtresses. madame de La Vallière, madame de Montespan, il en a légitimé 11, la plupart pourront aller à ses funérailles. Leur seul handicap, ils ne sont pas à 100% de sang royal.
Une des principales angoisses des rois de France fut d’assurer leur descendance. Pour certains cela ne posa pas de problèmes, pour d’autres cela fut plus aventureux. Déjà Louis XIV est une sorte d’enfant miracle qui naît en 1638, 23 ans après le mariage de ses parents, Louis XIII et Anne d’Autriche. Les historiens s’accordent à dire qu’il ne fut pas spécialement porté sur la bagatelle, on ne peut pas dire tel père tel fils dans son cas, de plus il a une petite santé. Plusieurs fausses couches et une union que l’on considère comme plutôt stérile, sont effacées par ce don du ciel, qui fut par ailleurs prénommé Dieudonné. Son frère Philippe « Monsieur » suivra en 1640.
Louis XIV, n’est pas dupe et il en fait une histoire d’état. Vu qu’il a un Dauphin en état de marche, les choses sont si fragiles dans ce domaine, il décide qu’il faut au plus vite le marier. Au plus vite, le terme prend tout sons sens, en fait s’il meurt il n’y de successeur direct. Commencerait alors le jeu des successions pour voir qui, en ligne plus ou moins directe, pourrait prétendre au trône. Et il a raison le bougre, ce qu’il ne sait pas encore, c’est que son exceptionnelle longévité permettra de sauver les meubles dans la ligne de succession directe sans trop de secousses. De fil en aiguille, ce sera une hécatombe autour de lui, il verra mourir toute sa descendance, à une exception près, celle de son successeur, c’est à dire son arrière petit-fils, Louis XV. La scène a été souvent immortalisée au cinéma. : « Vous serez un grand roi », dit-il a son successeur âgé de cinq ans, en fait exactement ce qu’il a vécu bien des années avant. Mais une année avant sa mort, il promulgua un édit qui ouvrait la successions aux enfants légitimés, il tenait quand même $ assurer ses arrières.
Pour y voir un peu plus clair, résumons la situation.
On peut dire qu’il a été en quelque sorte sauvé par le gong, la naissance de son arrière petit-fils a remis les pendules à l’heure, de quoi calmer les aspirations de ceux qui s’y voyaient déjà. Mais on peut aussi remarquer que si Louis XIV était décédé avant, jusqu’en 1712 fils et petit-fils auraient pu régner, le principal problème aurait été après 1712, et pire encore si le futur Louis XV n’était pas né en 1710. La longévité du Roi Soleil a fait table rase de tous les problèmes, c’est bien un de ses descendants qui est monté sur le trône, ainsi qu’il l’avait souhaité. Remarquons aussi que Louis XV a eu un règne assez long, 58 ans, moins la régence (1715-1723) assurée par Philippe d’Orléans, fils du frère de Louis XIV et de la princesse Palatine.
Mais venons au début de la succession de Louis XIV, alors apparait à la cour une femme qui va se démarquer du ronronnement de la cour, Anne-Marie de Bavière.
Le roi veut marier son fils, il pense à sa succession. Il faut choisir un parti, ce n’est pas le futur marié qui choisit, très souvent on le fait pour lui. Dans la royauté, on choisit une femme pour ce qu’elle peut apporter sur le plus de plans possibles, fortune, terres, intérêts politiques, tout y passe. On choisit presque sur catalogue, comme qui dirait on regarde les articles disponibles au moment du choix. Selon les époques, il est plus ou moins vaste. On envoie des ambassadeurs ou des émissaires officiels discuter le bout du gras avec l’autre partie. Si on arrive à un accord, il n’est pas rare que le mariage se fasse par procuration. Il peut en résulter une certaine angoisse chez les futurs époux. Ils n’ont souvent qu’un portrait et quelques témoignages de ceux qui ont fait les démarches. Il ou elle à l’air de quoi ? Les titres, la gloire, les honneurs, peuvent aplanir bien des choses, il reste juste le fait qu’il faudra en principe passer sa vie avec l’autre. Les dés sont jetés, arrivera la rencontre, Très souvent, comme la future épouse n’habite pas dans le village voisin, mais peut venir d’un pays assez lointain, rendu encore plus lointain pas les moyens de locomotion en usage alors, on décide d’un lieu de rencontre. On se souvient que Louis XIV rencontra Marie-Thérèse dans l’endroit qui faisait frontière entre le royaume de France et d’Espagne, frontière qui n’a guère changé depuis.

Le choix se porte sur Marie Anne Christine Victoire Josèphe Bénédicte Rosalie Pétronille de Bavière, née Maria Anna Christina Victoria von Bayern en 1660 (ouf!). En parlant sang, il n’est aps tout à fait neuf puisque sa mère Henriette-Adélaïde de Savoie, est la cousine germaine de Louis XIV. Les cancans qui circulent à la cour avant sa venue mentionnent en premier le fait qu’elle est laide. J’ai toujours eu une pensée critique sur la beauté des dames de jadis. les critères pas les mêmes qu’aujourd’hui, on jugeait principalement par le visage seule chose vraiment visible, et à certaines époques par la poitrine plus ou moins apparente. La question des mamelles revenait assez souvent dans les conversations, je crois même avoir lu que le roi avait lui-même posé la question à propos de sa future belle-fille. Ils pouvaient aussi être un signe encourageant vers une maternité facilitée si elle avait une belle poitrine. Rappelons quand même qu’apercevoir une cheville était presque un spectacle à damner un saint en ces temps reculés.
Un « espion » envoyé en reconnaissance par le roi lui fit son rapport :
“Sire, dit-il, sauvez le premier coup d’œil, et vous en serez bien content”. Cela est dit à merveille ; car il y a quelque chose à son nez et à son front, qui est trop long, à proportion du reste ; elle fait un mauvais effet tout d’abord. Mais on dit qu’elle a une si bonne grâce, de si beaux bras, de si belles mains, une si belle taille, une si belle gorge, de si belles dents, de si beaux cheveux, et tant d’esprit et de bonté, caressante sans être fade, familière avec dignité, enfin tant de manières propres à charmer, qu’il faut lui pardonner ce premier coup d’œil… »

Les portraits que l’on possède d’elle vont un peu dans tous les sens, de la femme plutôt jolie à la dame sans grande beauté. Par contre, tout le monde sauf les jaloux, s’accordent pour lui trouver de grandes qualités qui n’on rien à voir avec le physique. Elle parle un français impeccable, possède une belle culture, une certaine grâce, et elle est charmante. Elle a eu le temps de s’entraîner, elle est promise à son mari depuis l’âge de huit ans. Elle en est toute émoustillée, dame quand étant enfant on vous dit que vous serez peut-être un jour reine de France, c’est quand même autre chose que de promettre un tour en carrousel ! Elle s’y applique et se sent déjà française de coeur.
Suite dans un prochain article, nous verrons sa vie à la cour et son destin plutôt malheureux à travers quelques documents d’époque.
Source gallica.bnf.fr / BnF / DP / Wikipédia. 3/15