En passant

Bas nylons et suite en fée

Les aventures de Marie-Adélaïde de Savoie – Deuxième partie

Description de cette image, également commentée ci-après

Louis XIV se frotte les mains, il espérait une nouvelle étoile à la cour avec la mariage de son petit fils et Marie-Adélaïde de Savoie, il en a une et elle brille. La cour qui avait sombré dans une ambiance plutôt morose, spécialement depuis le mariage du roi avec madame de Maintenon, retrouve de son éclat. Marie-Adélaïde a ce qu’il faut pour séduire, elle est gaie, toujours de bonne humeur, farceuse. Elle a certainement un sixième sens qui lui fait entrevoir jusqu’où elle peut aller avec chacun. Elle sait se faire respectueuse quand il le faut et plus légère quand elle devine que c’est permis. De plus elle est maintenant duchesse de Bourgogne, cela pose quand même un peu une personne. Elle est très éprise de son mari et l’inverse est réciproque. C’est peut-être un des rares cas dans l’histoire de France où le mari mourut de chagrin quelques jours jours après son épouse. Elle prendra toujours fait et cause pour son époux, même si pour le reste il fait un peu figure pâlotte à côté d’elle. Très souvent dans les familles royales, c’est l’entourage proche qui est le plus sujet à tiraillements, ceux que l’on rencontre tous les jours ou souvent. Là encore, l’entente semble régner entre tous, même si elle peut paraître de façade. Il faut souligner qu’elle redonne une vie à la cour dont tout le monde profite, fêtes, bals, elle entraîne le monde à sa suite. Cela n’empêchera pas quelques intrigues par la suite, même sous le Roi Soleil, certains n’aiment pas l’ombre. Le seul qui pourrait trouver à redire, c’est Louis XIV, il est toujours le maître à bord et pour un bon moment. Heureusement, c’est encore lui qui est le plus sous son charme. Il a toujours adoré les femmes qui ont de la personnalité et cette gamine peut en revendre. Du moment que sa femme semble aussi la trouver irrésistible, il laisse aller et se réjouit très certainement intérieurement de retrouver un peu des fastes d’antan. Elle est aussi fine mouche, elle sait que pour lui elle est un rayon de soleil dans sa vieillesse et que le roi attend d’elle gaîté, bons mots, et aussi une descendance. Pour cette dernière, il faudra encore patienter un peu .

Vue de Versailles vers 1710


Elle loge à bonne enseigne, désir du roi. Il a fait réaménager le château par Mansart, en modifiant l’ancienne ménagerie. C’est aussi une sorte de résurrection de Versailles devenu bien calme. On voit réapparaître des artisans, maçons, carreleurs, vitriers, tapissiers. Ce sera les appartements de la reine-enfant, on va pas la loger dans un cagibi sous les combles, des fois qu’elle attraperait un rhume.
Même si Louis XIV est le roi et le montre, il est moins apparent qu’il eut de belles complicités avec ses proches, où l’on rangeait un peu l’Etiquette dans le placard à balais. Il adorait ses serviteurs, n’en changeait que rarement, et les voulait heureux. Il n’hésitait pas à se montrer très généreux avec eux, les pensions, les gratifications, n’étaient jamais absents pour un service bien redu. Il a eu une réelle complicité et amitié avec son premier valet, Ferdinand Bontemps. Il connaissait tout de son maître. Il en savait plus sur les amours du roi que ses confesseurs, disaient les méchantes langues.

Marie-Adélaïde fut une des bénéficiaires de ces complicités. Elle partageait de nombreux moments avec le roi, même dans son intimité proche, quand il faisait causette avec sa femme le soir devant la cheminée. Il arriva des situations qui auraient été impensables auparavant, elle s’asseyait sur ses genoux, où sur l’accoudoir où il était assis, elle lui faisait des bises, fouillait dans ses tiroirs, la vrai petite peste. Le roi riait, lui passait tout, même en redemandait. Il se sent rajeunir, en frétille de plaisir, pas besoin de recharger les batteries elles sont à coin. Madame de Maintenon est certainement plus réservée, mais du moment que le roi est heureux, ben oui c’est le roi. Il y a d’ailleurs bien longtemps qu’elle ne l’a pas vu si heureux. Même que parfois cela tourne un peu aux facéties d’écoliers. La dauphine, son mari est quelquefois de la partie, font tout pour s’amuser. On envoie des pétards vers une vieille duchesse grincheuse, on la poursuit à coups de boules de neige. Je me demande même si le poil à gratter était déjà connu, probablement, alors ils l’ont sûrement utilisé. Ah ces jeunes, ils n’ont plus de respect, pensaient sans doute quelques vieilles badernes.
Mais voyons un peu la vie à à la cour, sous son règne en quelque sorte.
La duchesse a des goûts éclectiques. La danse, le ballet, le théâtre, l’art lyrique vont avoir droit à des représentations selon les endroits les plus appropriés pour le faire, Versailles, Marly, Fontainebleau, Trianon. Elle réquisitionne les talents, organise, son mari la seconde parfois. Ils commandent des pièces à certains auteurs. Elle n’a pas vingt ans, elle a un pied partout. Cela va durer une bonne dizaine d’années, bien entendu il n’y pas représentations tous les soirs, mais quand on ne peut pas faire cela, il y a d’autres occupations, moins artistiques. Les loteries, les carnavals, le jeu, c’est avec ce dernier qu’elle aura un peu de fil à retordre. Elle est joueuse, au propre comme au figuré, elle joue et elle perd, pas son panache, mais son argent. Elle a aussi un secret envers le roi, elle prise le tabac. Ce n’est pas un grand secret, mais le roi déteste tout ce qui est tabac, fumé ou prisé. Maintes fois, madame de Maintenon épongera ses dettes et ne soufflera mot au roi sur son « tabagisme ». Elle sont devenues bien complices. mais pour la femme du roi c’est aussi un moyen d’avoir une un peu d’emprise sur elle, mais qui sait, les secrets existent peut-être de part et d’autre ?

Ambiance à Versailles

Une date dans le récit qui mentionne le 10 juillet 1689 est fausse, il s’agit probablement de 1699, Marie-Adélaïde n’est pas à Versailles, elle avait 4 ans en 1689. L’histoire de la promenade en gondole est citée dans d’autres sources.

La famille royale en 1799, Marie-Adélaïde est à la gauche du roi


Les naissances finissent par arriver, il fallait bien patienter un peu. Quand la mariée a 12 ans, il ne faut pas être trop pressé pour « l’heureux événement ». D’autant plus que le mariage ne fut officiellement consommé qu’en 1699, c’est à dire quand elle avait 14 ans. Il semble que l’on ait pas trop précipité cette première naissance puisque le premier garçon naît en 1704, le 25 juin. Avec cette naissance survient un fait unique jusque-là dans l’histoire de France, le roi est arrière grand-père. La fête fut certainement belle, mais le bonheur ne dure pas trop longtemps, il meurt l’année suivante. Le second fils naît le 8 janvier 1707, lui il a bon pied bon oeil et il vivra plusieurs années. Un dernière naissance aura lieu le 15 février 1710, elle aura une importance historique, il s’agit du futur Louis XV. Pour le grand-père, la situation n’est pas trop préoccupante, sa descendance en droite ligne est assurée, mais c’est sans compter tous les deuils qui frapperont la cour. Pour l’instant, place au bal !

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Source gallica.bnf.fr / BnF / DP / Wikipédia.