En passant

Bas nylon et histoires (un peu) saintes

La religion a toujours été omniprésente dans l’histoire de France. Elle fut très accaparée par les rois qui se prétendaient d’essence divine, mais elle était aussi une puissante force politique qui changea maintes fois le cours de l’histoire. Il y a eu à toutes les époques des personnes qui étaient plus ou moins croyantes, qui saisissaient au vol une bonne occasion d’en profiter, ou tout simplement qui montrèrent un athéisme convaincu, même parfois militant.
C’est amplement suffisant pour en extraire quelques bonnes histoires sur le sujet.

Duchesse de Longueville

Voici un exemple de piété amplement tourné à son avantage.
La duchesse de Longueville (1616 – 1679), soeur du Grand Condé et du prince de Conti, fut largement impliquée dans la Fronde. Le préférant à son mari, elle eut une liaison avec le duc de La Rochefoucault, lui aussi militant dans le mouvement. Elle lui confia un jour:
– Je sors de confesse, j’y suis resté trois quarts d’heure et j’ai eu le plaisir de n’y parler que de vous.

Parfois des râleurs disant que le loi n’est pas faite pour tout le monde, ce dont on ne peut pas tout à fait les blâmer. Et qu’en est-il de la loi divine ?
La maréchale de la Ferté et la comtesse d’Olonne sortaient du prêche de carême. L’officiant y avait été sans doute un peu fort, car elles en sortirent bouleversées et décidèrent de faire pénitence.
– Ma soeur décida la comtesse, voici ce qu’il faut faire : faisons jeûner nos gens .

Jean XXIII

On peut être pape et très observateur en regrettant presque de ne pas encourager le péché.
Jean XXIII fut élu pape en 1958. Il laissa l’image d’un pape très humble, mais aussi réformateur. Avant d’être élu, il séjourna longtemps à Paris comme nonce. Ce poste lui commandait de nombreuses obligations diplomatiques, rappelons que Le Vatican est un état, mais également mondaines. Il fit un constat :
– Les Français sont vraiment déconcertants. Tout le monde sait ici que je suis gros, vieux et laid. Pourtant à chaque fois qu’une très belle femme, au décolleté généreux, arrive dans une grande réception, eh bien, ce n’est pas elle qu’on regarde. C’est vers moi que sont tournés tous le regards.
Le même répondit avec humour à la question de savoir combien de personnes travaillaient au Vatican.
– Pas plus que la moitié.

Louis XIII

Implorer le ciel ne coûte rien et qui sait cela peut marcher. Encore faut-il le faire savoir et rappeler que l’on a des relations haut placées.
Louis XIII était extrêmement pieux et versé dans la religion. Il craignait Satan et il lui sembla que mettre le royaume sous la protection de la Vierge était une idée qui allait assurer paix et prospérité. Il se fendit d’une allocution lorsqu’il le décida :
– Afin que tous mes bons sujets aillent au paradis, car tel est notre bon plaisir.

Louis XV

On ne sait pas trop si mourir c’est rigolo, nous manquons fortement de témoignages précis, mais cela n’empêche pas certains de n’y voir qu’une certaine ironie.
Sur son lit de mort, Louis XV se mit à sourire après avoir reçu tous les sacrements nécessaires à un ultime voyage avec certitude que les anges n’étaient pas en grève pour l’accueillir. Mais on s’étonna quand même un peu de ce sourire. Alors il conta :
– Cette cérémonie me rappelle une ancienne histoire. Une duchesse était prête à recevoir les derniers sacrements. Sa femme de chambre vint lui annoncer :
– Mme la duchesse, le Bon Dieu est là. Permettez-vous qu’on le fasse entrer ? Il souhaiterait avoir l’honneur de vous administrer.

Nicolas Malebranche

On peut toujours épiloguer pour savoir si une effet peut avoir la même cause ou vice-versa. Quand on est embarrassé par une question sur le sujet, l’humour permet de trouver une réponse adéquate, mais qui n’apporte pas forcément l’éclairage souhaité.
Nicolas Malebranche fut un théologien et un parfait contemporain de Louis XIV puisqu’il naquit et mourut aux mêmes années que lui. Il écrivit une livre Recherche de la vérité qui eut un grand retentissement, malgré qu’il ne pouvait en faire la promotion chez Bernard Pivot. A une observateur qui lui assénait que puisque les animaux connaissent la douleur, il y avait une relation avec le péché originel. Il répondit :
Apparemment, ils ont mangé du foin défendu !

Joseph-Clément de Bavière

L’histoire suivante illustre bien que les hommes d’église d’alors pouvaient se permettre des attitudes qui feraient scandale aujourd’hui, pas qu’ils fussent moins pieux, mais certainement plus farceurs.
Elle concerne un évêque, Joseph-Clément de Bavière (1671 – 1723) qui officiait à Liège. En général, les messes étaient plutôt dites par le « petit personnel », mais rien n’empêchait l’évêque de dire lui-même la messe. C’était plutôt à considérer comme un événement et cela attirait les fidèles, avides de voir un homme d’église d’un certain rang, pas trop visible autrement. Il annonça donc qu’il allait célébrer la messe le premier du mois d’avril. Ce jour-là, il y avait bien entendu foule. Il arriva et monta en chaire et il attendit que le silence fut complet. Il éclata alors d’une grand rire et hurla : « Poisson d’avril », redescendit de la chaire et se tira.
En plus d’être drôle, l’histoire nous apprend qu’au siècle de Louis VIV, cette tradition se pratiquait déjà. Elle semble exister depuis le XV siècle, mais les raisons semblent assez obscures. Une des raisons possibles est que le date coïncidait à peu près avec la fin du jeûne du carême dans lequel le poisson remplaçait la viande. Une autre possibilité découle du fait que le début de l’année n’a pas toujours été le premier janvier, mais le premier avril. C’est le roi Charles IX qui décida de la porter au premier janvier, suivi par le pape Grégoire XIII qui l’étendit à l’ensemble de la chrétienté, autrement dit le calendrier grégorien depuis 1582. Ce poisson était destiné à rappeler aux étourdis que ce n’était pas le début de l’année, peut-être aussi lié au fait qu’avant cette réforme l’année commençait en période de carême.

Il y a dix siècles, le français était une langue bien différente de celle que l’on parle aujourd’hui. La base existait, mais elle était mélangée à des patois locaux et des langues étrangères comme le latin, enfin pas si étrangère puisque chez les gens cultivés on le pratiquait assez fréquemment, survivance de l’empire romain qui s’étendit à travers l’Europe. Le français se transmettait par voie orale, une infime partie des gens savaient lire et avaient accès aux écrits. Même aujourd’hui elle n’est pas complètement unifiée, bien qu’à l’école on apprend les mêmes bases et on écrit les mêmes mots avec la même orthographe. Il subsiste toujours divers accents et expressions régionales. Il suffit de comparer le français de Lille et celui de Marseille. Pour certains linguistes, le français tel qu’on le parle au Canada, surtout l’accent, peut assez correspondre à celui que l’on parlait chez nous il y a trois ou quatre siècles, plus spécialement celui de Paris et des environs. Les parties francophones du Canada n’ont que peu subi les influences des langues étrangères, l’anglais étant la seule qui pouvait interférer dans la langue. Il y a aussi une différence notable, si la noblesse française parlait avec une certaine distinction par rapport au paysans des campagnes, le phénomène ne semble pas avoir existé au Canada, nobles et roturiers parlaient de la même manière.
Voici une vieille chanson en vieux français du XII siècle, elle parle des croisades, très en vogue à l’époque. Sur l’écran vous verrez le texte en vieux français et le texte en français d’aujourd’hui. Vous verrez que ce n’est pas facilement compréhensible, mais les mots ont un air familier. Elle est interprétée par Jordi Savall avec des choeurs. Vous remarquerez les paroles guerrières qui s’adressent aux esprits simples. Combattre avec le roi et en tant que chrétien vous ouvre les portes du paradis. Bien entendu l’ennemi c’est le Sarrasin.

Source gallica.bnf.fr / BnF / DP / Wikipédia.

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