Le monde de la musique fait aussi partie de l’histoire, mais on y retrouve parfois de drôles de notes. Je vais prendre la place du chef d’orchestre et vous en interpréter quelques unes.

Gioacchino Rossini
Quand vous regardez un dessin animé et qu’il y a une poursuite, vous risquez fort d’entendre un fond musical très connu extrait de L’Ouverture de Guillaume Tell composée par Gioacchino Rossini (1792 – 1868). Il est né à Pesaro, aujourd’hui dans la province Marches . Comme bien de ces compositeurs devenus célèbres, ils avaient tous une part d’excentricité. Rossini était un surdoué de la composition musicale, il composait comme certains jouent aux cartes. Venu s’installer à Paris. il arrêta pratiquement de composer à cause de la révolution de 1830, ce fut sa seule action politique connue. Il aimait la bonne chère et l’art de bien manger. On dit qu’il passa les trente-huit dernières années de sa vie à confectionner de parfaits macarons, une de ses spécialités. Le fameux tournedos Rossini aurait été créé ou inspiré par lui. Rappelons qu’il s’agit d’une pièce de viande avec du foie gras poêlé avec des lamelles de truffes et une sauce au madère, ce qui est quand même vachement meilleur qu’un hamburger chez qui vous savez. Il déclara avoir pleuré deux fois dans sa vie, une fois en entendant le Requiem de Mozart, l’autre sur un bateau en voyant le maître d’hôtel laisser tomber une poularde aux truffes dans le lac Léman.
Il avait aussi ses sujets de coquetterie. Etant presque chauve, il avait une collection de perruques avec différentes longueurs de cheveux. Il en changeait en ordre crescendo, comme si de vrais cheveux avaient poussé normalement. Il remettait celle avec les cheveux les plus courts pour faire croire qu’il avait passé chez le coiffeur.
Il composa un ultime requiem… pour ses propres obsèques.
Mais il avait aussi le sens des bons mots…
Alors qu’il était au piano et qu’il sortait une belle cacophonie de son instrument en jouant une partition de Wagner, un élève lui dit : « Maestro la partition est à l’envers. »
– J’ai commencé en la mettant dans l’autre sens, mais c’était pire.
Alors qu’il écoutait une cantatrice qui interprétait une de ses oeuvres Le barbier de Séville, agacé par son jeu il lui dit : « Mademoiselle, votre voix est très belle. Mais de qui peut être cette affreuse musique ? »
Une femme moche, vieille, laide, avait tenté plusieurs fois de rendre visite à Rossini. Elle fut assez sèchement éconduite par la maîtresse de maison, probablement sa seconde femme, la belle Olympe Pélissier. Croisant Rossini sur le boulevard des Italiens, l’une de ses promenades favorites et lieu prédestiné, elle se plaint au maestro. Il l’écouta, puis lui dit : « Que voulez-vous, elle est si jalouse ! »

Lettre manuscrite de Rossini, français très correct pour un Italien.
Rossini a beaucoup été repris dans les cartoons. ici dans Le Barbier de Séville via Tex Avery

Thomas Beecham
Il y a la musique de chambre et la musique de pot de chambre…
Le célèbre chef d’orchestre anglais Thomas Beecham (1879 – 1961), fondateur du Royal Philharmonic Orchestra, répétait l’opéra de Verdi Aïda en dirigeant les musiciens et les choeurs. Il s’énervait car il n’arrivait pas à obtenir autre chose qu’une belle cacophonie. Il s’apprêtait à tout plaquer lorsqu’un éléphant (prévu dans une scène) arriva plus tôt que prévu. L’animal s’avança paisiblement et s’arrêta vers les choeurs. Il posa alors une immense crotte. Le maestro s’exclama :
– Quelle affreuse éducation, mais quel merveilleux jugement !
Lors d’une autre répétition, il dit à une violoncelliste !
– Madame, vous avez entre les jambes un instrument qui peut donner du plaisir à des milliers de gens, et tout ce que vous savez faire c’est de le gratter.
il n’appréciait pas la voix du soprano James Holden Taylor, qui faisait l’objet d’une admiration universelle :
– On dirait de la merde soufflée à l’envers dans une trompette.

Arthur Honegger
Petite histoire qui montre bien que l’on est trahi que par les siens…
Le compositeur éclectique suisse Arthur Honegger (1892 – 1955) entendit un jour sa bonne raconter aux voisins :
– Mon maître est trop pauvre pour acheter un poste de radio. Il fait sa musique lui-même.

Mozart
Les bons conseils font les bons mozamis…
Mozart recevait un musicien ayant l’ambition de composer une symphonie et qui lui demandait quelques conseils.
– Vous devriez commencer par quelque chose de léger, un lied, et ensuite atteindre progressivement le niveau de la symphonie.
– Mais, Maître, vous avez composé des symphonies à l’âge de huit ans…
– Oui, mais je n’ai jamais demandé à quelqu’un comment faire.
Un opéra vaut bien dix maréchaux…
Caterina Gabrielli (1730 – 1796) fut une cantatrice star à une époque où en être une se faisait surtout par le bouche à oreille. Malgré tout, sa réputation arriva jusqu’à la grande Catherine II de Russie (1729 – 1796, femme connue pour son érudition), mais aussi pour son tempérament ardent du côté du lit à baldaquins. On peut être impératrice et prévoir une fin de mois difficile. Le prix demandé par la diva pour se produire devant elle fit tousser la Catherine :
– Je ne paye sur ce pied-là aucun de mes mes feld-maréchaux.
– Dans ce cas, dit la diva, Votre Majesté n’a qu’à faire chanter vos feld-maréchaux.
Le Choeur de l’Armée Rouge, n’étant encore qu’un lointain projet, elle accepta le prix demandé.

Frederic II de Prusse
Remède cheval pour un chameau.
Frederic II de Prusse (1712 – 1786) aimait le spectacle, le théâtre et l’opéra. En bon Allemand, il aimait bien les préférait que les choses soient réglées comme du papier à musique. Il ne regardait sans doute pas à la dépense, mais en voulait aussi un minimum pour son argent. Un cantatrice, dont l’histoire n’a pas retenu le nom, devait donner un spectacle à Postdam. Elle était très connue pour ses petits caprices et emmerdait tout le monde. Les faits arrivèrent jusqu’aux oreilles du roi et il se doutait un peu que le soir du spectacle, il pourrait y avoir quelques contretemps. En effet, on annonça que la représentation était reportée car la fameuse cantatrice prétextait être enrouée. Se sentant solidaire de son état de santé, enfin à sa manière, il envoya un officier et quatre dragons chez la cantatrice.
– Madame, dit l’officier, le roi me charge de vous demander des nouvelles de votre chère santé.
– Je suis très enrouée.
– Sa Majesté le sait, aussi Elle m’a chargée de vous conduire à l’infirmerie de l’hôpital militaire où vous serez rétablie en peu de jours.
La voilà donc entourée de cinq militaires qui la font monter dans un carrosse qui se dirige vers l’hôpital. En cours de route, le diva se sentit beaucoup mieux et annonça qu’elle était guérie. La carrosse fit demi-tour et on la ramena dans sa loge. Elle se changea, mais avertit l’officier en grinçant qu’elle n’était pas certaine de pouvoir faire ses vocalises à la perfection. L’officier s’inclina avec une courtoisie toute germanique :
– Je vais placer un dragon dans chaque coulisse, ne vous en faites pas, au moindre couac les soldats vous conduiront immédiatement à l’hôpital.
Frederic II et les habitants de Postdam purent assister à l’opéra qui en ravit sans doute plus d’un, mais nul ne se douta que deux personnes qui tenaient la baguette ce soir-là.
MUSIQUE MEDIEVALE
Les rois composent aussi de la musique. Voici une chanson écrite par la fameux Richard Coeur de Lion (1157 – 1199), fils d’Aliénor d’Aquitaine et de Henri II roi d’Angleterre. Il la composa alors qu’il était prisonnier, de la fin 1192 au début 1194. Les paroles sont en occitan, langue qui s’étendait alors dans le tiers sud de la France et de la Catalogne, et qui subsiste encore aujourd’hui dans certaines régions, surtout en Provence. C’est une belle langue très chantante, mélange des langues latines voisines, malheureusement en voie de disparition. Les paroles en occitan figurent en haut du clip.
Source gallica.bnf.fr / BnF / DP / Wikipédia.