En passant

Bas nylons et vinyles en fusion

Les albums de compilation existent depuis les débuts du microsillon. Il y a principalement deux tendances. La première est du style « Best Of », c’est à dire qu’il regroupe en général des titres d’un artiste qui sont issus de différents enregistrements qui peuvent s’étaler très largement dans le temps et la carrière de l’artiste. Le seconde fait plutôt appel à des artistes différents, évoluant plus ou moins dans un style ciblé, sous un thème précis, ou regroupant des artistes du même label. Il n’y a en fait aucune règle, c’est très vaste. A partir de 1967, Philips France a édité une série d’albums de compilation sous le titre de « Made In England ». Elle présente un intérêt évident, au moins pour les plus fauchés, car elle regroupe des noms connus et surtout pratiquement que des hits. Avec le prix d’un album, parfois proposé en petit prix, il permet d’obtenir des succès plutôt réputés, alors qu’il aurait fallu acheter plusieurs EP’s pour les acquérir tous. Bien sûr, ces compilations sont publiés avec un décalage de quelques mois, le temps que les succès se tassent un peu et ne stoppe pas la vente des premières éditions. Mais le décalage est assez minime et tout le monde se rappelle encore de ces succès. Parfois, un subterfuge est utilisé pour proposer un succès qui fait bien dans le décor. Par exemple nous trouvons « When A Man Loves A Woman », mais comme la version originale de Percy Sledge est un artiste Atlantic, sa version ne peut figurer ici. Alors on met à la place celle de Spencer Davis Group. Au change on y perd rien, car elle est au moins aussi bonne que l’originale. C’est le même cas pour la reprise de *Good Day Sunshine » des Beatles, par hasard enregistré par un artiste maison. Voici le volume 1 de cette série

The Spencer Davis Group – When I Come Home

The Troggs – With A Girl Like You 

Dave Dee, Dozy, Beaky, Mick & Tich – Bend It

The Mindbenders – Ashes To Ashes

Manfred Mann – Just Like a Woman

Karen Young & The Knee Caps – Me And My Mini Skirt

The Walker Brothers – Living Above Your Head

The Troggs – Wild Thong

The Spencer Davis Group – When A Man Loves A Woman

The Pretty Things – LSD

Wayne Fontana – Goodbye Bluebird

The Eyes – Good Day Sunshine

La France n’a pas le monopole du disque de collection. Il existe ailleurs et même dans des quantités qui peuvent laisser la France loin derrière. Il n’y a pas de formule magique pour qu’un disque devienne un collector. Un des critères pour qu’il le devienne, c’est la rareté multipliée par son attrait pour les collectionneurs. Parmi les artistes, il faut distinguer ceux qui arrivent à franchir la porte du collectionneur, certains ne le sont peu ou pas, d’autres s’installent volontiers dans les discothèques personnelles. Ces critères sont très subjectifs, mais il est certain qu’il y a des disques qui atteignent des fortunes et d’autres dont on a de la peine à se débarrasser pour des sommes très modiques. Des artistes inconnus peuvent avoir des publications qui s’arrachent à prix d’or, tandis que des célébrités sont boudées par les collectionneurs. Nous allons nous promener régulièrement parmi certains de ces collectors internationaux dont vous ne soupçonnez peut-être pas l’existence, mais qui sont souvent des pièces qui se négocient à bon prix. Pour les albums je me contenterai d’un ou deux exemples et pour le reste l’intégralité des titres si disponibles sur Youtube. Vous ferez certainement des découvertes.

Leonid Kogan – Beethoven – Violin Concerto In D Major, Op. 61

Contrairement à ce que beaucoup de gens peuvent penser, on peut trouver de très grosses pièces de collection dans la musique classique, c’est même souvent dans ce genre que les prix les plus fous sont atteints. J’en vois déjà qui vont courir pour fouiller les disques du grand-père en pensant qu’ils vont trouver des merveilles. Ils ne faut pas se leurrer, les lois du marché sont les mêmes que pour la pop ou le rock and roll, il faut que le contenu soit réputé et la publication très très rare. L’immense majorité des disques classiques ne valent pas plus qu’un banal album de Mireille Mathieu ou de Georges Brassens. En musique classique cela peut prendre divers aspects, la présence d’un chef d’orchestre, d’un virtuose de haut vol, d’un orchestre symphonique, d’une oeuvre particulière, mais encore et surtout d’une édition rare. Dans le cas présent, c’est la présence de Leonid Kogan, un virtuose du violon russe qui sert de base. Mais c’est surtout cette édition de 1959 qui est recherchée. La raison en est que c’est un pressage en stéréo. A l’époque, peu de gens possédaient un électrophone adéquat, donc la plupart des disques étaient édités en mono et beaucoup plus rarement en stéréo. Les amateurs de classique savent très bien que les pressages pour ce genre de musique, datant des années 1950, sont pour la plupart d’une qualité d’audition au top niveau, alors en plus si c’est en stéréo. Il existe de multiples éditions et rééditions de ce disque, mais seule celle-là atteint des sommets.

UK 1959 – Leonid Kogan – Columbia SAX 2386. Meilleure enchère sur Ebay 10373 euros

Contenu de l’album

Beethoven Violin Concerto In D Major, Op. 61

Toujours la même chanson

Il est rare qu’une chanson ne soit jamais reprise si elle a eu un peu de succès. Quand on est lassé d’une version, il peut s’avérer plaisant d’en écouter une autre. Il arrivé même que l’on soit étonné par une reprise à laquelle on se s’attendait pas ou encore découvrir le créateur de la version originale. dont on ignore complètement l’existence. C’est un jeu où je me défends très bien. Alors selon ce principe, je vous propose en premier la version originale, en second une reprise française, et en troisième une autre version, que vous ne connaissez pas forcément.

The Shadows – The Rumble

Jean-Claude (Berthon) – Marie-Toi Vite

Shotgun – The Rumble

En passant

Dimanche en quelques manches d’hiver (10)

Ils sont partis vers les étoiles…

Gary Brooker, claviers de Procol Harum

Don Craine, leader et guitariste rythmique des Downliners Sect, l’homme au « deerstalker »

CHANSONS
MONUMENTS

Chansons qui ont un brin d’éternité

Hoagy Carmichael

Georgia On My Mind

1930

La Version de Ray Charles (1960)

Rétroviseur

Il y a pile 57 ans ces chansons se pavanaient aux premières places du hit parade anglais ou américain. Certaines sont encore très connues, d’autres moins, et même un peu oubliées

Gary Lewis & The PlayboysThis Diamond Ring

Petula Clark – Downtown

The Beatles – Eight Days A Week

The Zombies – Tell Her No

The Kingsmen. Jolly Grren Giant

De l’autre côté

Au temps des 45 tours, les disques avaient deux faces, alors on retournait le disque et parfois, il y avait une bonne surprise. Des chansons aussi bien roulées, voire supérieures à la face principale. Dans certains cas, elle reflètent le vrai visage de l’artiste. En voici une sélection.

The Merseybeats – The Fortune Teller

Jefferson Airplane – Lather

David McWilliams – Days Of Pearly Spencer (c’est pas une erreur c’est bien une face B)

Slim Harpo – Got Love If You Want It

The Yardbirds – Mr. You’re A Better Man Than I

Des trucs originaux

Des chansons que l’on connait éventuellement en version française, elles furent toutes diffusées sur les radios à une époque où à une autre, fréquemment ou plus rarement. Ce sont des reprises de chansons anglophones ou autres et plus ou moins obscures, dont certaines personnes ne connaissent même pas l’existence. Voici les versions originales qui vous rappelleront peut-être quelque chose. C’est une sorte de jeu, cherchez le titre de la version française. Dans certains cas c’est facile, dans d’autres plus difficile, mais c’est possible puisque je le fais mais à l’envers. Bravo si vous faites un 5/5. Je vous donne les solutions tout en bas de la page. Mais on peut aussi simplement les écouter.

1) The Hollies – Come On Back

2) Bob Haggart & Ray Bauduc Big Noise From Winnetka (1938)

3) The Beatles – There’s A Place

4) The Pinetoppers – Mockin’ Bird Hill (1950)

5) Johnny Rose – Linda Lee

Repêchages en vrac

Quelques sélections sans ordre, ni époque, ni style précis

The Smiths – William, It Was Really Nothing

Sniff ‘n’ the Tears– New Lines On Love

Flash And The Pan– Lights In The Night

Bow Wow Wow – Aphrodisiac

The Miners Of Muzo – Hey Gipsy Woman

Deux musiques pour rêver

Chris Isaak – Can’t Do A Thing To Stop Me


Elvis Presley – First In Line


D’autres musiques pour rêver programmées dans les postes des dimanches précédents.

The Beau Brummels – The Wolf Of Velvet Fortune
Erik Satie Gnossienne no 1
The Mamas & The Papas – Dancing Bear
René Joly – La Cour Du Roi Musicien
Bernard Benoit – An Dro Pour 3 Guitares
Tim Buckley – Song Slowly Song
Pilgrim – Dream Within A Dream
Ash Ra Tempel – The Fairy Dance
Raphelson – The Dancer
Tangerine Dream – Cherokee Lane
The Doors – I Can See Your Face In My Mind
The Byrds -Everybody Been’s Burned

Parachute Club – Innuend
Patti Smith – Elegie

Solutions – 1) Ronnie Bird / Ou Va-t-elle ? // 2) Eddy Michell (Nancy Holloway / Quand Une Fille (Garçon) Me Plaît // 3) Les Surfs / Adieu Chagrin // 4) Claude François / La Ferme Du Bonheur // 5) Richard Anthony / Quand Tu Me Diras Oui.


En passant

Bas nylons et suite en Dahlia

Nous avons vu dans un article précédent l’affaire du Dahlia noir, sordide fait criminel que eut lieu au début de 1947 à Los Angeles. Ce crime est devenu tellement célèbre qu’il fait presque l’objet d’un culte. Une des raisons qui le poussa à la postérité réside surtout dans l’enquête qui fit que le ou les coupables ne furent jamais officiellement identifiés. Nous avons aussi résumé les conclusions qui amenèrent Steve Hodel, un ancien flic de Los Angeles à la retraite, à accuser son père d’être le meurtrier du Dahlia noir. Rappelons également qu’il partit sur cette affaire, suite à des photos qu’il trouva dans les affaires de son père, et qu’il identifia comme étant des portraits du Dahlia Noir, Elizabeth Short de son vrai nom. Dans son enquête minutieuse, il a enquêté sur plus de 300 meurtres quand il était flic, il reprend les faits tout en menant ses propres investigations. Il est sans doute un peu aidé, car le fait d’être le fils du possible meurtrier lui donne accès à des souvenirs, des témoignages, des documents plus faciles d’accès, même s’il n’a habité avec son père que durant sa petite enfance. Pour plus de détails sur les faits se reporter à cet l’article.

Une vidéo en introduction du sujet. C’est en grand format, cliquer. Attention, certaines faits peuvent choquer, mais c’est la réalité.

Je ne l’ai qu’effleuré dans la première partie, mais le livre de Steve Hodel parle aussi des autres meurtres qui eurent lieu à Los Angeles à la même période. Il soupçonne aussi son père d’être l’investigateur de certains d’entre eux. L’affaire du Dahlia noir fut tellement retentissante qu’elle occulta passablement toutes les autres, mais dans certains cas, il y a des similitudes dans la manière d’opérer. Il envisage aussi la possible participation de son père dans le meurtre de la mère de James Ellroy survenu bien plus tard en 1958, célèbre écrivain qui consacra un roman à l’affaire du Dahlia noir, oeuvre de fiction pour les personnages, mais qui serre les faits connus d’assez près. Nous allons en revisiter quelques uns.


Jeanne French – C’est le cas le plus célèbre après celui du Dahlia noir. Tout d’abord parce qu’il se produit moins d’un mois après le précédent et c’est celui qui a également une mise en scène très macabre qui lui valut le surnom de « meurtre au Rouge à lèvres ». C’est ce second cas qui mit la puce à l’oreille de la police, un meurtrier en série pourrait sévir à Los Angeles.
La victime est Jeanne French, née au Texas en 1902. Ce que l’on sait d’elle peut se résumer à une vie sentimentale mouvementée, elle se maria quatre fois, mais devint aussi une femme pilote d’avion en 1931, alors une spécialité pas si courante pour une femme. Son premier métier étant nurse, on la surnomma « nurse volante ». Elle fut aussi l’infirmière d’une sorte de célébrité, Marion Wilson. qui était la mystérieuse femme voilée qui allait chaque année fleurit la tombe de Rudolph Valentino, un mythe du cinéma muet. Il est aussi possible qu’elle a figuré dans des petits rôles au cinéma au tournant du parlant, mais non crédités. Ce qui est certain, c’est qu’elle fréquentait la bonne société de Los Angeles au moment de son meurtre.
Le matin du 10 février 1947, un ouvrier se rend à son travail. Il découvre dans un terrain vague, le cadavre d’une femme entièrement nue. Dans un geste faussement pudique et insolite voulu par le meurtrier, son corps est recouvert de sa robe et de son manteau. Ses chaussures sont soigneusement déposées à égale distance de chaque côté du cadavre, Si la découverte de celui du Dahlia noir ne fut pas un spectacle plaisant, la découverte de celui-ci ne lui cède rien en horreur. La police constate que le meurtre confine à la sauvagerie. Des marques de pieds et de talons se remarquent un peu partout sur le corps, comme si un fou furieux lui avait marché dessus dans l’intention de la mutiler encore plus. Il apparaît qu’on la frappée avec un outil lourd, éventuellement métallique. La victime semble avoir aussi été violée. Il est aussi établi que le cadavre ruisselant de sang, très probablement amené sur les lieux en voiture, a été traîné sur le sol car des traces de sang sont visibles dans les environs. Fait particulier à ce meurtre, à l’aide de rouge à lèvres le meurtrier a écrit des obscénités sur son corps « Fuck You » et en guise de signature les initiales « B.D. ». Il faut savoir un fait qui concerne la police. Après le premier meurtre, elle reçut plusieurs lettres et messages d’un mystérieux personnage qui prétendait être le meurtrier de Jeanne Short. Ils étaient signés « Black Dalia Avenger » et affirmait qu’il allait encore sévir et que l’on ne l’attraperait pas, ce qui pourrait expliquer le message écrit au rouge à lèvres. Les messages ainsi que les adresses manuscrits, ils ne le sont pas tous, feront l’objet d’une étude par Steve Hodel qui les comparera à l’écriture de son père dont il possède de nombreuses lettres. Pour lui c’est la même écriture, chose qui sera admise comme plus que probable par une éminente graphologue.

La scène du crime et les inscriptions retrouvées sur le corps écrites avec un bâton de rouge à lèvres appartenant à la victime.

Un article de journal relatant la découverte du cadavre, Il est dit dans le titre que l’endroit s’appelle « l’allée des amoureux », un lieu assez connu à Los Angeles, c’est le bois de Boulogne du coin. Aujourd’hui, c’est un quartier résidentiel

Image gauche. Premier suspect, le mari de Jeanne French, est très vite arrêté comme en atteste ce journal local. Même s’il n’était plus en bons termes avec sa femme, ils se sont vus la journée précédent le crime, il est assez vite écarté des suspects. Il a été établi qu’une voiture a servi lors du meurtre, il n’en possédait pas et ne savait pas conduire. Les empreintes de chaussures retrouvées près du cadavre ne correspondaient pas aux siennes.
Image droite. Autre article qui annonce ce nouveau meurtre faisant référence à celui du Dahlia noir. Pour la lecture les images sont cliquables.


Ce second meurtre fit bien entendu l’objet d’une enquête approfondie, dont on ne connaît pas les aboutissements, ni un coupable certifié. On soupçonna son dernier mari en instance de divorce avec elle, mais la piste tourna vite en impasse. Cependant de nombreux témoins affirment avoir vu Jeanne French le jour avant et pendant la soirée en compagnie d’un homme, parfois deux, dont l’un avait les cheveux et une moustache noirs, ce qui ressemble assez au portrait du père à Steve Hodel. Il apprendra lors de son enquête que son père deviendra par la suite le suspect numéro 1, et que pour ce second meurtre son ami Fred Sexton pourrait être de la partie. Mais comme je l’ai dit ailleurs, Hodel père connaissait un tas de choses sur un tas de gens, évidemment pas très reluisantes, et cela pouvait remonter jusque dans les plus hautes sphères de la police. Il est évident que tout ce beau monde avait de bonnes raisons de rester anonyme.

Jean Spangler – Un autre cas célèbre est celui de Jean Spangler. Elle est une actrice qui a déjà eu quelques petits rôles dans des films où figurent des stars. Elle n’est pas encore une vedette, mais sa carrière peut paraître prometteuse. Même si elle est encore jeune, née en 1923, elle est déjà mariée, divorcée et mère d’un enfant. Le 7 octobre 1949 au soir, elle quitte son domicile, et disparaît définitivement. On suspecte un meurtre, et on cherche un cadavre sans résultat. Une armada de policiers sont mobilisés. Seul indice matériel retrouvé, son sac à main est découvert dans un parc. Il a une poigné arrachée et est déchiré, ce qui pourrait indiquer qu’il y a eu une lutte. A l’intérieur on retrouve un billet manuscrit à l’intention d’un certain Kirk et qui mentionne le nom d’un docteur Scott. Ce sont les seuls indices certains qui ont trait à cette disparition. Même si l’enquête n’aboutit pas, elle cerne un peu mieux la personnalité de la disparue et aussi ce qu’elle a fait les heures avant sa disparition. C’est difficile en l’absence de cadavre de rechercher un meurtrier, mais l’enquête suit son cours. Pour les cinéphiles, le prénom de Kirk fait immédiatement penser à l’acteur Kirk Douglas. Il est en effet questionné, d’autant plus qu’elle est apparue dans un film où il avait la vedette. Il reconnaît tout au plus avoir eu une petite conversation avec elle sur un plateau de tournage, mais ne la connaît pas particulièrement. La piste tourne court, d’autant plus qu’il se trouvait loin des lieux lors de la disparition. Un autre acteur parmi ses partenaires de cinéma, l’acteur Robert Cummings, relate une discussion qu’il a eu avec elle quelques jours avant. Elle lui affirma qu’elle s’était lancée dans une aventure sentimentale et qu’elle s’amusait follement, mais ne lui a pas donné de nom précis. La mère de la victime est plus affirmative, elle est sûre que sa fille a été assassinée et donne le nom de ce qui à ses yeux est le meurtrier. Ce nom ne sera jamais révélé. Selon certains témoignages, elle ne dédaignait fréquenter certains personnages liés au milieu du gangstérisme. La veille de l’enlèvement, elle a été vue en compagnie d’un homme bien habillé conduisant une conduite intérieure noire. Le jour de sa disparition, vers 2h du matin, un journaliste qui la connaît la voit en compagnie de deux hommes devant un restaurant de Sunset Boulevard, elle semble se disputer avec eux. La patron du bistrot confirme sa présence dans les lieux, mais assise à une table avec un seul homme, dont le signalement pourrait correspondre à celui de la veille. C’est probablement la dernière fois qu’elle a été vue et reconnue.
Dans son livre où il revient sur cette disparition, Steve Hodel ajoute que le fameux docteur Scott pourrait être son père. Il mentionne deux faits que seul lui a remarqué, l’endroit où le sac fut retrouvé est celui où son père avait l’habitude de les déposer avec ses frères pour jouer et qui ne se trouve pas très loin de la maison où ils habitaient. Plus troublant, la disparition a eu lieu quelques heures après que son père soit relâché sous caution après son inculpation d’inceste envers sa fille Tamar. Jean Spangler savait-elle quelque chose et aurait pu le faire chanter ? Avait-elle aussi participé à l’une ou l’autre de ces parties fines qui se déroulaient dans la maison de son père ? La seule certitude que l’on peut avancer aujourd’hui, c’est c’est qu’elle est morte. Oui mais comment ?

Le fameux sac avec la lanière brisée et le détail du billet retrouvé à l’intérieur. Un article de journal qui traite de la disparition. On fait allusion au Dahlia Noir, même si cela date de plus de deux ans, c’est encore bien ancré dans la mémoire.

Geneva Hilliker Ellroy – Projetons-nous en 1958, c’est à dire à un moment où l’histoire du Dahlia noir, sans être oubliée, ne fait plus la une des journaux. Ce crime ne fit pas plus de bruit qu’un autre à l’époque, mais il sera mis en exergue des années plus tard. La victime en fut la mère d’un futur écrivain qui deviendra célèbre plus tard, James Ellroy. Il n’est pas sans rappeler ceux qui firent la une des journaux une dizaine d’années plus tôt.
Le matin du 22 juin, une femme est retrouvée morte dans un coin un peu isolé, près d’un terrain de sport situé dans les environs de El Monte en Californie. Cet endroit est aussi connu pour être un lieu où les amoureux vont se conter fleurette. La victime a été frappée à la tête, probablement pour lui faire perdre connaissance, afin de pouvoir l’étrangler. Une cordelette et un bas nylon paraissent avoir été employés. Des traces de sperme son retrouvées, il y a probablement eu viol. Son cadavre est recouvert de son manteau de la même manière que dans le cas du meurtre au rouge à lèvres. On ne retrouve ni sac, ni papiers d’identité, elle reste pour un temps inconnue. Son signalement est donné à la radio et un témoin parvient à l’identifier. On peut alors mettre un nom et savoir qui elle est. Agée de 43 ans, elle exerce la profession d’infirmière, est divorcée, et a un fils unique alors âgé de 10 ans. On parvint à obtenir quelques renseignements sur les heures qui précèdent le meurtre. Elle a quitté son domicile en voiture le soir précédent vers 20h30. Plusieurs témoins certifient l’avoir vue Elle est entrée dans un dancing en compagnie d’une autre femme, genre blonde avec un queue de cheval. Un homme d’apparence mexicaine s’est approchée d’elle, l’a aidé à enlever son manteau et a dansé avec elle, il est un peu moins de 23 heures. Selon les témoins les deux femmes semblent se connaître. Plus tard, une serveuse de drive-inn affirme avoir vu le couple, la blonde n’est plus là, par deux fois, la dernière vers 2h15. Elle affirme aussi que l’homme a le teint basané et reconnaît formellement Geneva Ellroy sur la photo. Un portrait robot de l’homme sera établi. Ensuite la trace se perd jusqu’à la découverte de son cadavre. Sa voiture est retrouvée près d’un restaurant après le meurtre.

Un article de journal relatant le meurtre de Geneva Ellroy, ici nommé par son surnom Jean. A côté c’est bien sûr James Ellroy jeune. Cliquer sur l’article pour le rendre plus lisible. C’est bien sûr en anglais.


Comme pour les autres meurtres, il n y a pas de coupable retrouvé. Il faut encore se référer au livre de Steve Hodel. Ici, il ne met pas catégoriquement son père parmi les suspects, il faut rappeler qu’en 1958, son père a quitté les USA. Mais il est avéré que pour ses affaires, il revient assez fréquemment en Californie. Par contre, d’après le portrait robot, cela pourrait bien ressembler à Fred Sexton, ami intime de son père.
Cette histoire fit beaucoup pour le futur James Ellroy auteur de romans noirs. Mais il ne vint au roman que vers la trentaine, Il mena d’abord une vie errante, testant un peu tous les substances licites et illicites, sombrant dans la délinquance, plus par frissons de goûter à l’interdit que par perversité. Fasciné par le Los Angeles de l’après guerre, ses romans ne sortent pas vraiment de cet espace temps. Il fut le premier mettre en musique littéraire l’histoire du Dahlia noir. Il refait une chronologie de l’enquête, mais invente des personnages fictifs pour son déroulement, n’hésitant pas à noircir l’histoire et les caractères. De même, il écrira l’histoire du meurtre de sa mère dans « Ma part d’ombre ». C’est certainement un des maîtres du genre. Son livre peut se confronter à celui de Steve Hodel pour ce qui est des péripéties du meurtre de Jeanne Short. Quand il commença d’écrire son livre, Hodel ne connaissait pas celui d’Ellroy paru 10 ans avant. L’ayant lu, il reconnaît que son travail est très minutieux vu sous l’angle du déroulements des faits. Pour sa part, Ellroy reconnaît la qualité de celui de Hodel, dans un reportage sur le sujet, il parle de « nous ».

Dans son livre, Steve Hodel a établi un classement dans lequel il range les meurtres non résolus survenus entre 1940 et 1960, vus sous l’angle de l’éventuelle participation de son père à ces meurtres. Le classement commence par certain, probable etc…
Elisabeth Short et Jeanne French font partie de la première catégorie, Geneva Ellroy de la seconde. Je tiens à préciser que son livre est sans doute l’étude la plus sérieuse faite sur le sujet, elle s’étale quand même sur près de 600 pages. Le fait que son auteur est un ancien policier de la brigade criminelle de Los Angeles montre qu’il a une certaine habitude et maîtrise de la chose. Bien entendu, le livre connut un grand succès, mais il fut aussi décrié par certains, l’accusant d’invention et d’arranger les faits. Disons pour faire simple, qu’il faudrait pour le prouver démontrer que c’est faux en démontant une à une ses affirmations et preuves. Evidemment, accuser son père d’être un meurtrier en série n’est pas un fait banal. Meurtrier, il ne l’est peut-être pas, mais ce qui est certain c’est que ces morts découverts ne sont pas des suicidés. On peut aussi faire appel à la psychologie en la mettent en parallèle avec ces affaires.
Certains de ces meurtres peuvent ressembler à une pièce de théâtre avec une mise en scène macabre. Il y a probablement plusieurs metteurs en scène dans certains cas. Les principaux furent George Hodel, sans doute le principal meneur, Man Ray, et surtout Fred Sexton. Leurs rôles vont de possibles comparses à celui d’inspirateurs. Tous les trois sont des amateurs d’art et plus spécialement des admirateurs inconditionnels du marquis de Sade. Ray et Sexton sont des artistes confirmés et connus. Ce n’est pas le cas de George Hodel, il est reconnu comme un virtuose du piano, mais ne s’est jamais produit en tant que tel. S’il est un personnage en vue à Los Angeles, c’est surtout comme médecin de la bonne société. En commettant des meurtres particulièrement sadiques, sans négliger un sens de la mise en scène, a-t-il trouvé le moyen de se hisser dans cette notoriété ? On peut admettre à regrets que ces meurtres furent exécutés dans une sorte de folie artistique très malsaine, une forme revendiquée de génie dans le meurtre. Mais un génie n’est rien s’il n’est pas reconnu comme tel. A la fin des années 1940, quand cela commença à chauffer un peu trop, ils se dispersèrent comme une bande moineaux, à peu près certains de rester impunis. Il vaut quand même mieux laisser passer l’orage. On peut supposer qu’à la fin de sa vie, George Hodel regretta de ne pas être reconnu comme génie criminel, mais que la postérité pourrait arranger la chose. Sachant son fils fin limier, il aurait volontairement laissé traîner quelques indices, notamment la photo du Dahlia noir retrouvée dans son petit carnet avec des photos personnelles, sachant que cela allait intriguer son flic de fils. S’il mordait à l’hameçon son génie criminel serait éventuellement enfin reconnu. Et surtout là où il est parti il ne risquait plus rien.


N’oublions pas de mentionner le livre de Stéphane Bourgoin « Qui a tué le Dahlia Noir ? » paru en 2014, qui prétend avoir résolu le meurtre du Dahlia noir. Une équipe de journalistes a mené une sérieuse enquête sur l’auteur et a révélé que c’est un mythomane. A part certains faits vérifiables sur la passé des criminels, qui font partie des déductions et constats des enquêtes policières, tout le reste semble douteux. Il en va de même sur son livre consacré au Dahlia noir, le cas n’est pas résolu. Ses conclusions n’ont jamais été certifiés par le FBI contrairement à ce qu’il prétend. Il y a sans doute une information qui doit être vraie dans ce qu’il affirme, il est né le 14 mars 1953. Dans ce cas, il est né le même jour que moi et nous avons exactement le même âge. Enfin pour ce qui est de mon cas, je certifie que c’est l’exacte vérité.
C’est toujours un exercice de haute voltige de rechercher le passé des gens et ce qu’ils ont fait tel ou tel jour quand on n’était pas là pour le voir ou qu’ils ne sont plus présents pour le raconter. C’est pour cela que le livre de Hodel me semble digne d’intérêt. Il se trompe peut être sur certains points. Mais si j’avais lu son récit comme une oeuvre de fiction, arrivé à la conclusion, je me dirais que ça tient bien la route.

Sources Wikipédia, archives, Steve Hodel pour certaines anecdotes.