Flash – Le grand voyage

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Parler d’un livre comme « Flash », c’est avant tout se remémorer une certaine manière de vivre qui attirait des millions de jeunes dans les années 60, vers la fin. Si peu l’on mise en pratique, les autres l’ont rêvée ou esquissée. L’idéal, c’était l’envie de paix, tout le monde il était beau et presque gentil. Le mouvement hippie qui tenait le haut du pavé dans des villes comme San Francisco, s’était trouvé une Mecque bien loin de là, à Katmandou au Népal. Comme le Musulman qui doit faire le pèlerinage au moins une fois dans sa ville sainte, pour le hippie, c’était Katmandou. Les philosophies orientales et aussi la musique étaient devenues très à la mode, Katmandou en semblait une sorte de terre sainte. La réalité est sans doute un peu plus terre à terre, car au Népal à cette époque, la vente de drogue sous toutes ses formes était pratiquement libre. Les hippies les plus sectaires étaient de grands consommateurs de substances pour la plupart illégales dans leur pays d’origine. Ces substances n’avaient qu’un but à leur yeux, faciliter et permettre l’exploration du fond de la pensée humaine, dans les recoins de l’esprit immatériel où se cachent les vérités philosophiques. Quelle terre promise que ce pays où acheter de l’herbe, de l’opium, de l’héroïne était aussi facile que d’aller acheter son kilo de tomates au marché. Et en avant planons…
Charles Duchaussois a écrit sans doute le livre qui témoigne le mieux de cette route sur les chemins de Katmandou et de la ville elle-même. Il n’est pas à proprement parler un hippie lui-même, il est même un peu âgé pour cela, presque trente ans à l’époque. En réalité, il est un petit truand qui a fait de la prison et qui risque d’y retourner. Il décide mettre de la distance avec un ami qui l’invite au Liban. Alors commence la véritable aventure. Il part en stop jusqu’à Beyrouth. De là, il gamberge sur la possibilité d’un trafic d’herbe et les choses s’enchaînent. Après quelques péripéties, il se retrouve à Istambul, c’est là que commence son initiation à la drogue avec un premier joint. Ayant escroqué un Américain, il se retrouve avec pas mal d’argent en poche. Le voyage prend forme et il traverse l’extrême orient, et se rapproche peu à peu de Katmandou où il finit par arriver le 4 juillet 1969. En cours de route, il a continué son exploration par la consommation de drogues diverses, un peu tout ce qui se présente à lui, au gré des hasards. En six mois, il va tout explorer, consommer toutes les drogues, dans des quantités invraisemblables. Il a les moyens, son escroquerie d’Istambul, lui sert de tiroir caisse et là bas la drogue n’est pas chère. Il va devenir un junkie, voudra aller crever sur les contreforts de l’Himalaya, le rêve ultime du junkie. Par un concours de circonstances, il sera sauvé à l’ultime moment. Il finira par être rapatrié le 12 janvier 1970.
Tout cela, l’auteur le raconte dans son livre, 700 pages en format poche. A l’instar des grand films, il y a dans son livre qui se lit comme un polar, de grands moments, de grandes scènes. La fille morte à Instanbul d’un overdose, et le dernier hommage à la manière hippie. Une fille que personne ne connaît, des parents qui ne sauront sans doute jamais ce qu’elle est devenue, alors que nous sommes des millions à connaître la fin de sa vie. Le junkie découvert dans un village des contreforts de l’Himalaya, ses bras n’étant plus que des croûtes à force de se piquer et que l’auteur compare aux souvenirs qu’il a de l’image de Jésus Christ. Il sera son dernier compagnon, il mourra peu après. On sait juste que c’est un Américain. C’est bien sûr un livre qui parle de drogue, un sorte de guide dans lequel on peut connaître tous les effets de toutes les drogues sur le comportement humain. C’est aussi un livre qui parle de voyages, qui décrit les moeurs des pays visités, la vie à Katmandou, la vie des des hippies par un témoin somme toute assez neutre. Un documentaire écrit qui fera peut-être le canevas d’une étude sur ce mode de vie dans le futur. On peut déjà s’y référer.
A sa sortie en 1971, le livre fut un grand succès de librairie, 6 millions d’exemplaires à ce jour. Il fut écrit d’après le narration qu’en à faite l’auteur sur bande magnétique. Si certains passages peuvent paraître un peu exagérés ou mis en doute selon certains, il n’en reste pas moins que seul le récitant a vécu cela. Alors que les autres se taisent, ils n’étaient pas là. Je crois volontiers que tout est vrai de a jusqu’à z, seule la mémoire embrouillée a pu faire quelques erreurs qui n’enlèvent rien à la beauté de ce livre, car il faut parler de beauté. Ce n’est pas de la poésie, ni de la littérature au sens commun du terme, c’est juste un récit, mais que récit!
Charles Duchaussois continua de se droguer dans une moindre mesure, en évitant plus ou moins les drogues dures. Il a été brièvement marié après son retour et un fils est né de cette union. Remarié en 1974, il a une fille de cette nouvelle union. En 1978, il est emprisonné pour un homicide sur son beau-frère. Il meurt en 1991 d’un cancer généralisé.

John Mayall – Le maître

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John Mayall est un personnage attachant à la carrière impressionnante. Alors que adolescents années 60 se passionnaient pour les Beatles et autres Rolling Stones, les plus branchés découvraient un personnage qui allait leur donner un grand coup de pied dans le cul. Il oeuvrait un peu dans l’ombre, mais il était là. Petit à petit son nom allait grandir sur les affiches. Pour l’instant dans le même style, Alexis Korner et Cyril Davies étaient sans doute plus connus, du moins avaient une notoriété un peu plus étendue, spécialement le premier. Ils étaient non seulement amis, mais complices. La mort de Davies en 1964, laissa le champ libre à Korner. C’est là justement que Mayall commença à publier ses premiers disques. En deux ou trois ans, il allait devenir l’idole des jeunes bluesmen anglais, une influence majeur et une carrière qui ira sur plus de 50 ans.
John Mayall est né en 1933 en Angleterre. Tout jeune il baigne dans le jazz avec son père qui et un musicien passionné. Très tôt, il se perfectionne sur divers instruments, la guitare, l’harmonica, l’orgue, le piano, qui deviendra principalement son instrument de scène. Dans les années 50, il est soldat et part en Corée pendant 3 ans. A son retour, il commence sérieusement à s’intéresser à la musique comme carrière. Il est membre de plusieurs orchestres qui jouent principalement du skiffle (transposition de la musique folk américaine en Angletterre) et du jazz. Entretemps, il étudie l’art à Manchester et commence à gagner sa vie comme dessinateur, toujours en trafiquant avec les musiciens locaux. Petit à petit sa tasse de thé, expression idéale pour un Anglais, devient le blues. C’est une rencontre presque évidente quand on écoute du jazz, mais encore faut-il s’y intéresser de plus près. C’est ce qu’il fait et vers 1963, il décide d’immigrer à Londres en vue d’une carrière de musicien professionnel. Ce sera Alexis Korner qu’il a rencontré, qui le poussera dans cette voie. Korner lui permet de fréquenter le gratin de ces musiciens passionnés de la même musique. A la fin 64, il obtient un contrat avec les disques Decca, qui sortira rapidement un premier album « John Mayall Play John Mayall » enregistré en live au Klook’s Kleek, une boîte devenu légendaire. Il pose les premières pierres de son édifice, mais le disque n’impressionne pas les foules à ce moment là. Avec cet opus, il s’affirme comme chanteur, musicien, compositeur, ce qu’il sera tout au long de sa carrière. Le groupe qui l’accompagne sera baptisé les Bluesbreakers, et sera mentionné dès le prochain album en grosses lettres. Il y a de quoi, car ce groupe verra défiler un nombre impressionnant de musiciens au fil des ans, la plupart deviendront ici et là des références incontournables et parfois des stars avec un grand S. Mentionnons, Eric Clapton, Hughie Flint, John Mc Vie, Peter Green, Keef Hartley, Ansley Dunbar, Mick Taylor, Harvey Mandel, Jerry McGee, Jimmy Mc Culloch, Steve Thompson, Jon Hiseman, Jack Bruce, Larry Taylor, Mick Fleetwood, Dr John, Paul Butterfield, Walter Trout, Coco Mantoya, Dick Heckstall-Smith, Nicky Hopkins, Buddy Whittington, Ruben Ford. Cest un sacré bottin mondain de musiciens, certes incomplet. C’est aussi un des principaux atouts de Mayall, d’avoir su s’entourer de grands musiciens. Il en changera très fréquemment. A l’inverse, faire partie, du moins pour un temps, de son orchestre, était un atout considérable pour la suite de sa carrière.
John Mayall ne sera jamais un artiste à 45 tours, il y en aura ici et là, mais ce n’est pas son but, seuls les albums comptent. En 1965, il récupère Eric Clapton qui a quitté les Yardbirds. Le prochain album sera avec lui et mentionnera son nom sur la pochette à côté de celui du chef. Decca profite de la notoriété des Yardbirds, car à peu près tout le monde sait maintenant qu’il en a fait partie. Cette fois-ci l’album est un succès et il deviendra un indispensable dans sa discographie, autant que pour les fans de Clapton, qui partira fonder Cream. En 1967, « A Hard Road », offre à Peter Green les moyens de s’exprimer avant de partir pour Fleetwood Mac. Un peu après, Mayall s’aventure seul dans un album studio « The Blues Alone » où il joue tous les instruments excepté la batterie, charmant album en passant qui montre ses talents de multi-instrumentiste. Un autre album sort la même année, « Crusade », cette fois avec Mick Taylor à la guitare, avant de devenir un futur Rolling Stone. Très bon album également. Au début 68, un album en 2 volumes « The Diary Of A Band », consiste en la publication de bandes enregistrés par Mayall au cours des tournées. C’est un album plus documentaire que pensé en studio. Suivra « Bare Wires », toujours avec Mick Taylor, un album un peu différent sans doute pas son meilleur, mais intéressant avec son mélange de blues, de rock et de jazz. Mayall est maintenant physiquement très changé, il aborde des cheveux longs et des vêtements qui font de lui un mec très à la mode. C’est dans ce contexte qu’il aborde son dernier album pour Decca, que pas mal de monde considère comme le meilleur de cette période, « Blues From Laurel Canyon ». C’est aussi un album à découvrir en priorité. Decca sortira encore deux albums de compilation, un peu tout ce qui n’avait pas fait l’objet d’un album.
Plus qu’un changement de label, Polydor cette fois, c’est un changement de style qui va s’opérer. Le titre du premier « The Turning Point » est significatif. Bien sûr le blues est toujours là, mais le jazz dans sa manière progressive apparaît avec des musiciens nouveaux. A partir de ce moment, au cours des albums suivants, « Empty Rooms », « USA Union », « Jazz-Blues Fusion », Mayall va expérimenter divers styles, divers instruments, divers sons. Il va sans doute gagner un certain respect de la part de fans avides de nouveauté. Mais il perdra aussi un peu les fans du début qui considèrent le Mayall des sixties comme le vrai innovateur, ici il est plus noyé dans la masse, on innove un peu partout. Il n’en a cure, il poursuivra tout au long des ans à faire ce qui lui plait. Si sa notoriété s’exprimera surtout dans les concerts, en vrai chef d’orchestre qu’il est, sa carrière discographique reste à découvrir sans regarder l’avant ou l’après. Lui-même, il alterne toutes les époques dans les concerts en retrouvant les vieux potes, avec ou sans il semble toujours heureux sur scène. A plus de 70 ans, il n’a pas les mains dans les poches et est encore plein de projets qu’il ne dit pas, mais dont on se doute un peu.
En regardant dans le rétroviseur musical, on s’aperçoit bien vite qu’il y a peu de précurseurs, d’innovateurs, dans le sens noble du terme. Pour le savoir, il faut regarder qui de ceux que l’on considère comme des précurseurs se sont inspirés. John Mayall est certainement en haut de la pyramide. Bien des musiciens de sa troupe sont devenus eux-mêmes sources d’inspirations. Bravo Monsieur Mayall!

Pour retracer la carrière de John Mayall, j’ai fait une rétrospective qui couvre de 1964 à 1972, avec quelques titres représentatinfs de sa carrière et ensuite un lien pour l’album enregistré à l’occasion de ses 70 ans

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