Au temps du vinyle, la production phonographique française est assez minimaliste par rapport à un pays comme les USA. Cela ne veut pas dire qu’elle n’existe pas. Malgré tout, une immense partie de cette production restera dans l’ombre, par manque de soutien par la presse spécialisée, par manque de diffusion radiophonique, par manque promotion. Je me souviens d’avoir vu chez les disquaires des représentants de maison de disques faire la promotion de nouveautés du catalogue. Ils n’avaient rien de différent des autres représentants, sauf qu’ils vendaient ou faisaient la promotion des disques au lieu de brosses ou d’assurances. Il y avait ce qui était en demande, les fameux succès du moment, et des trucs moins connus ou inconnus qu’il fallait essayer de refiler au disquaire en vantant la marchandise, charge à lui d’en souligner les mérites auprès d’une clientèle dont il connaissait les goûts.
Malgré cela une très grande partie de cette production est restée inconnue, ne s’est pas ou mal vendue, c’est en général ces disques qui font le bonheur des encyclopédistes, même certains sont devenus de très estimables pièces de collection. Allons faire un tour dans ces publications dont la plupart vous sont inconnues, autant les chansons que les artistes, à moins que vous n’ayez été un chasseur de disques averti pour quelques uns d’entre eux. Toutes les publication dont je parle ici ont bien été éditées en France et sont uniquement des 45 tours.
1968 – Them / Walking In The Queens Graden. Quand les Them de Van Morrison se séparent, nous retrouvons deux groupes du même nom venant de la même origine, L’un du côté de Texas et l’autre resté anglais, enregistre des titres qui sont, entre autres, publiés par le label suédois Sonet. Ils sont aussi connus sous le nom de Belfast Gypsies et certains titres, tout à fait identiques sont publiés sous Them ou Belfast Gypsies. Si à mon avis cette mouture est meilleure et plus dans la tradition du groupe originel, la version US n’est pas inintéressante non plus. En France, un seul et unique single de groupe version texane est publié par Capitol en 1968, avec un original composé par le groupe en farce principale. Il attira quelques rares fans de la première époque. Il est maintenant assez recherché.
1969 – Joyce Bond / Ob-La-Di-Ob-La-Da. Les Beatles se firent souvent souffler des succès par des artistes qui se contentaient de reprendre un de leurs titres parce que la production locale de tel ou tel pays ne l’avait pas publié en single ou tardivement. Comme la pléthore de titres dans les albums des Beatles qui avaient un potentiel certain de faire un succès, le choix était grand et permettait à des petits malins de s’octroyer un hit avec une chanson signée Lennon et McCartney. Ce fut le cas pour « Michelle » que les Overlanders hissèrent à la première place du hit parade anglais. En 1969, le chose se répète avec « Ob-La-Di-Ob-La-Da » reprise par le groupe Marmelade qui hissent également la chanson à première place en Angleterre. Dans une moindre mesure, le groupe Spectrum en tira aussi quelques bénéfices avec leur propre version. Mais ils ne furent pas les seuls à tenter le coup, la chanteuse jamaïcaine Joyce Bond le fit aussi et son disque fut même édité en France, mais passa surtout inaperçu.
Robert Mitchum ne fut pas seulement un acteur de cinéma et un immonde salaud dans « La Nuit Du Chasseur » de Charles Laughton, mais également un chanteur. Il n’officiait pas dans la chansonnette ou le rock and roll, mais dans le style exotique que l’on appelle calypso. Cela fut publié en France en 1958 et je crois que les ventes furent assez faibles. Disons que je préfère l’acteur…
L’Espagne possède aussi ses enfants prodigues, la petite Marisol fut une de ces stars qui commencèrent d’enregistrer au lieu d’aller à l’école. Née en 1948, elle enregistra son premier disque en 1960. On tenta de nous l’imposer en France via une pléthore de publications dont je peux me vanter de ne pas en avoir vues beaucoup. Il y a longtemps qu’elle a pris sa retraite.
Le fans de pièces vinyles rares françaises devraient connaître ce bonhomme. Il fut le chanteur des Primitives, ce groupe anglais qui s’exila en Italie vers 1965 et y rencontra passablement de succès. En entamant une carrière solo sous le nom de Mal, il fut également un bon vendeur de disques, tantôt chantant en italien, tantôt en anglais. On tenta en vain de l’imposer en France dans les années 1970. Il chante encore aujourd’hui.
1968 – Adam & Eve / Shaggy Dog. Ce duo assez connu en Allemagne est avec ce disque leur seule apparition en pressage français. L’Adam du groupe, un natif américain, est en réalité Johnnie Dee. Si ce nom ne vous dit rien sachez qu’il composa pour les Pretty Things leur fameux « Don’t Bring Me Down » que Ronnie Bird reprit en français « Tu Perds Ton Temps ». En 1975, il s’illustra d’une autre manière, il fut condamné à 6 ans de taule pour tentative d’assassinat sur sa copine d’alors, mais qui n’était plus l’Eve du duo. Le titre principal de ce disque fut aussi interprété par les Rattles.
A propos des Rattles, eh bien les voici. Ils étaient le groupe Allemand no 1 à l’époque de la Beatlemania. Vers la fin des années 60, il décident de s’adjoindre les services d’une chanteuse et de donner une image un peu plus progressive à leur musique. Ils enregistrent un single « The Witch » qui relance leur carrière, mais leur permet aussi de se retrouver dans le hit parade anglais à une bonne place. Le groupe tourne encore aujourd’hui malgré d’innombrables changements de personnel. Le bassiste et le batteur étant les deux membres les plus réguliers. La publication de ce titre en France passa complètement inaperçue ou presque.
1966 – Verdelle Smith / In My Room. Une de ces chanteuses tendance R&B qui font aujourd’hui la joie des collectionneurs. On peut toujours se poser la question de savoir pourquoi ces disques étaient édités en France, d’autant plus qu’ils ne proposent aucun succès. On sa sans doute misé sur le très accessible « In My Room » adaptation d’une chanson en espagnol, reprise en français par Dalida « Dans Ma Chambre », Les versions anglaises de ce titre sont très nombreuses, Walker Brothers, Nancy Sinatra etc… témoignant de son potentiel intéressant. Pourtant aucune de ces versions et encore moins celle de Verdelle Smith, n’attira les auditeurs français.
1966 – I Giganti / Il Mio Giorno Verra. Le label Barclay a sorti un nombre incroyable de publications sous licence étrangère pour le marché français. L’Italie n’est pas absente, témoin la publication de cet EP en 1966 des Giganti. Un groupe assez connu dans son pays, jouant le jeu entre originaux et reprises. Bien qu’assez intéressant, ce disque n’avait aucune chance de devenir un tube en France. Il est tellement peu courant que je ne l’ai jamais vu. Si je connais son existence, c’est bien par d’autres sources que les foires aux collectors.
1967 – Laurie Johnson / The Avengers Theme. Un exemple de disque que tout le monde connaissait et que personne n’achetait. La célèbre série « Chapeau Melon Et Bottes De Cuir » a marqué son époque. La publication de ce 4 titres par Vogue en 1967 ne rencontra pas un franc succès, beaucoup moins que la série. Mais les aficionados vont jusque à mettre 200 euros pour se procurer cette copie, la plus recherchée de tous et sans doute la plus rare.
1963 – The Rockin’ Rebels / Wild Weekend. Le rock à la Johnny & Hurricanes ne fait plus trop recette en France en 1963, sinon à remplir la discographie des artistes instrumentaux français comme Joey & Showmen de Johnny Hallyday. La publication de l’original par Columbia resta très confidentielle, contrairement aux USA où le titre fait encore recette. On n’essaya pas de renouveler la tentative.
1963 – Simone Jackson / Ain’t Gonna Kiss Ya. Cette jeune chanteuse de Manchester âgée de 16 ans fut, parait-il, accompagnée par les Beatles sur la scène de la Cavern en septembre 1962, évidemment avant qu’ils ne soient célèbres. Sa carrière fut ensuite très courte. Quand les Searchers « empruntèrent » cette chanson (écrite par un certain PJ Proby qui deviendra brièvement une star vers 1964) au répertoire des Ribbons, groupe vocal féminin noir américain, un directeur artistique de Pye pensa qu’elle irait comme un gant à Simone Jackson. Dans la foulée, Vogue publia le disque en France, même avant la version des Searchers. D’un côté comme de l’autre, on se tâte encore aujourd’hui pour savoir si l’idée était bonne. Il n’en reste pas moins que le disque n’est pas mal, sans égaler bien meilleure version des Searchers.
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Bonjour M. Boss,
Eh oui les Beatles se sont fait souffler quelques fois leurs succès …pure justice , juste retour des choses, puisque eux aussi ont pioché des succès chez d’autres artistes pour en faire pour la plupart des succès qui font oublier les artistes originaux !
Les Rattles j’aime beaucoup est-ce pour la cosonnance avec les Beatles et le fait que Les Rattles se sont produits à Hambourg et ont joué à plusieurs reprises dans les mêmes salles que les Beatles en 1962.??? allez savoir
Bonne fin de semaine
cooldan
Hello Cooldan,
A la décharge des Beatles, ils ont assez peu puisé chez leurs concurrents et pour en faire des reprises qui tiennent la route.
Les Rattles, j’ai toujours assez bien suivi, justement pas mal pour leur leur connexion avec le Star-Club. Je suis assez spécialiste du beat allemand, car tellement de groupes anglais se sont exportés en Allemagne, les Rattles ont été parmi les rares à faire le chemin inverse et à réussir de se faire connaître un peu en Angleterre. Je possède toujours leur rare EP UK sorti chez Decca en 1964 en live au Star-Club. Mais pour moi, c’est quand même nettement un ton en-dessous des Fab Four.
Bon week-end