Au temps du vinyle, la production phonographique française est assez minimaliste par rapport à un pays comme les USA. Cela ne veut pas dire qu’elle n’existe pas. Malgré tout, une immense partie de cette production restera dans l’ombre, par manque de soutien de la presse spécialisée, par manque de diffusion radiophonique, par manque promotion. Je me souviens d’avoir vu chez les disquaires des représentants de maison de disques faire la promotion de nouveautés du catalogue. Ils n’avaient rien de différent des autres représentants, sauf qu’ils vendaient ou faisaient la promotion des disques au lieu de brosses ou d’assurances. Il y avait ce qui était en demande, les fameux succès du moment, et des trucs moins connus ou inconnus qu’il fallait essayer de refiler au disquaire en vantant la marchandise, charge à lui d’en souligner les mérites auprès d’une clientèle dont il connaissait les goûts.
Malgré cela une très grande partie de cette production est restée inconnue, ne s’est pas ou mal vendue, c’est en général ces disques qui font le bonheur des encyclopédistes, même certains sont devenus de très estimables pièces de collection. Allons faire un tour dans ces publications dont la plupart vous sont inconnues, autant les chansons que les artistes, à moins que vous n’ayez été un chasseur de disques averti pour quelques uns d’entre eux. Toutes les publication dont je parle ici ont bien été éditées en France et sont uniquement des 45 tours.
J’arrive au numéro 40 de cette rubrique, a raison de 12 présentations dans chaque numéro, cela fait près de 500 disques rares qui font partie de cette exploration. Le point commun de tous ceux que j’ai présentés, c’est qu’ils sont rares à des degrés très divers, du rare pas trop rare au Graal de la rareté. De quelques euros pour certains. a des dizaines, des centaines, et même plus de 1000 euros pour les plus prestigieux, cela donne une idée de la valeur que peut avoir une belle collection de vieux vinyles. Et ça continue…
1961 – Janice Harper / Love Is A Dangerous Thing. Chanteuse américaine dont on ne sait pas grand chose, sinon qu’elle a enregistré une poigne de disques entre 1957 et 1967. Un physique avantageux et un style qui n’est pas sans rappeler celui de Peggy Lee. Je n’ai jamais vu cette publication.
1968 – Reparata & The Delrons / Captain Of Your Ship. Trio vocal féminin blanc américain assez connu là-vas, qui débuta en 1964. Sur le plan international, leur titre le plus connu est celui-ci, on peut trouver sur un single français publié par EMI, mais peu visible.
Sagittarius / Another Time. Réputés pour avoir fait d’un titre du trio anglais Ivy League « My World Feel Down », un must psychédélique qui fut aussi édité en France sur un single, celui-ci fut publié à la suite. Si le premier est déjà rare, ce dernier l’est encore plus. Une pièce assez recherchée dans son pressage français, le seul emballé dans une pochette.
1968 – Steppenwolf / Born To Be Wild. Il existe deux versions françaises de ce single pour les sixties. La première date de 1968 et la seconde de 1969. Lors de la parution originale, bien que très connu le titre ne suscita pas immédiatement un engouement féroce. Ce fut le film « Easy Rider » qui le propulsa au firmament. C’est assez marrant de voir la manière qu’à une salle obscure de capter l’attention et l’oreille d’un spectateur, depuis ce film est toujours associé aux bikers. Le premier tirage relativement modeste en ventes est de ce fait beaucoup plus rare et recherché que la seconde édition. Entretemps un autre phénomène s’est glissé dans les parutions. Jusqu’en 1968, c’est RCA qui distribuait Dunhill en France, première parution, et ensuite EMI, seconde parution. Cela peut avoir eu un impact sur les ventes du premier.
1974 – Spooky And Sue / Swinging On A Star. Succès en Hollande, bide en France, exemple de ces artistes qui surgissent et disparaissent à la vitesse du son. Une recette simple, on reprend une vieillerie très connue pour la mettre au goût du jour, ici on sent le disco venir. Cela avait déjà marché pour Richard Anthony en France dix ans avant avec le même titre. Bien que rares ces disques laissent peu de traces dans les recherches de collectionneurs.
1965 – The Motions / It’s Gone. Les connaisseurs savent que ce groupe hollandais est une première mouture des fameux Shocking Blue et du non moins fameux « Venus ». Pour moi, il a une toute autre signification. Ce premier EP français d’une série de 3, fut un de mes tous premiers disques. Mon titre préféré est celui que je vous propose ici, je l’ai écouté des milliers de fois et je l’écoute encore, C’est un beau collector, la semaine passée j’ai vu une copie partir à 260 euros. Ma vieille copie usée jusqu’à la corde n’atteindra sans doute jamais pareil prix, raison de plus pour ne pas chercher à la vendre.
Rudy Bennett qui fut le chanteur de ce groupe la chante encore.
1970 – John Stewart / Marshall Wind. John Stewart c’est un ancien du Kingston Trio qui entama une carrière de soliste, mais aussi de compositeur (Daydream Beliver pour les Monkees c’est lui). Ce single extrait d’un album, est un essai de le faire remarquer en France, sans grand résultat. Il obtiendra un hit international en 1978 avec « Gold ».
1971 – Présence / Le Jour S’est Levé. Un de ces nombreux groupes pop à la française. Beaucoup connurent une existence éphémère, mais il y en a quelques-uns qui deviennent des collectors par la suite. Le groupe Présence en fait partie sans doute plus par le fait qu’il a eu deux chanteurs connus dans ses rangs. Le premier était plutôt en déclin, Erick Saint Laurent, qui eut quelques titres assez connus cinq ans plus tôt. L’autre est une vedette en devenir, Daniel Balavoine. C’est se second qui apparaît dans ce titre. C’est un disque relativement rare sans être rarissime.
1970 – Ange / Israel. Beaucoup plus rare et aussi plus recherché, le premier enregistrement du groupe Ange. Avant de devenir un leader de la pop française, le groupe avait timidement enregistré un 45 tours sur un tout petit label. Musicalement c’est plus fouillé que le précédent, on peut aisément le classer dans la musique progressive. En valeur sur le marché, il peut se vendre 3 à 4 fois plus cher.
1971 – Total Issue / Rustique. Un autre groupe français que je trouve assez classe. Des musiciens venus du jazz et qui se lancent dans quelque chose de plus pop. Un 45 tours rare extrait d’un album quasi mythique. Parfois je me dis que plutôt que de mettre toujours l’accent sur la pop anglaise ou américaine, nos chers programmateurs radios passaient souvent à côté de belles choses. Si j’avais entendu cela à l’époque, j’aurais sans doute couru acheter l’album.
1967 – The Blues Magoos / We Ain’t Got Nothin Yet. Ah celui-là, il fallait bien qu’il devienne un collector. Pratiquement tout ce qui a été publié en France sous forme de EP et qui concerne la musique psychédélique peut se classer dans le plutôt rare ou très rare. Dans le lot, cette publication est sans doute une des plus courantes, ce qui ne veut pas dire que vous allez en trouve un exemplaire dans toutes les brocantes. Il existe quelques clips d’eux, mais comme le son est médiocre, voici un clip plus banal, mais de qualité.
1966 – Cream / I’m So Glad. Le groupe Cream est apparu assez tôt pour bénéficier des publications en EP’s, support qui fait tout le charme des productions françaises pour les collectionneurs internationaux. N’allez pas croire que c’est par philosophie que ce fut le cas. Non, c’est plus mercantile, cela permettait de vendre le double de marchandise et rapporter plus. Gain pour l’acheteur, souvent de belles pochettes qui résistent bien à l’épreuve du temps. Pour Cream, il y en a trois, le premier étant certainement le moins courant, mais il annonce déjà tout le charme et l’importance qu’aura ce groupe.
*****