2 livres pour 250 grammes

Freddy Buache – Buñuel – – 1990 – L’Age d’Homme

Ignorer Buñuel et son cinéma, c’est un peu comme manger un steak sans songer qu’il peut s’accompagner de frites. Si je suis passionné de cinéma, pas la daube que veut nous servir Hollywood aujourd’hui, c’est en découvrant des réalisateurs comme lui que je me suis mis à l’aimer vraiment. Le cinéma américain a eu son heure d’or, je pense à Chaplin et quelques autres, mais je lui ai toujours trouvé un air convenu. Imaginez ces héros qui traversent le désert, qui crèvent de soif depuis trois jours, mais qui sont toujours bien rasés, quel suspense. La richesse des diverses cultures de l’Europe a toujours permis un mélange détonnant et étonnant. Le cinéma est la parfait miroir de cette diversité. L’Allemagne de Lang, de Murnau, de Wiene est peut-être la plus prestigieuse. La France de Renoir, de Carné, de Duvivier peut presque lui damner le pion. L’Italie viendra plus tard, le fascisme est né tôt là-bas, mais De Sica et sa suite s’y mettront de belle manière. L’Espagne des années 30 n’a pas grand chose à nous offrir si ce n’est Buñuel, mais il est de taille, de la taille de La France et des Surréalistes qui l’accueillent. Il y sera consacré, il partira, il reviendra. Son cinéma qu’il soit d’ici ou d’ailleurs ne sera jamais très conventionnel. Les criminels y sont des saints, les curés des monstres, les femmes sont obscurs objets du désir. Par certains côtés il sera un cinéaste fétichiste, les chaussures, les bas, les corsets seront de la parade, devenant objets visibles du désir.
Freddy Buache, retraité conservateur de la Cinémathèque suisse analyse le personnage à travers son oeuvre de belle manière, soulignant au passage tout ce que nous n’avons pas vu ou pas compris dans ses films, son cinéma est parfois un labyrinthe de pensée. Merci à lui.

Georges Simenon – La Chanbre Bleue – 1963 – Le Livre de Poche

Du Simenon sans Maigret et pourquoi pas. On allie tellement l’écrivain à son héros que l’on oublie parfois qu’il existe un autre auteur, un peu plus coquin. C’est notre fidèle visiteur, Valmont, merci à lui, qui m’a mis sur la piste sur cette petite perle née dans une huitre aux aventures meurtrières. Contrairement à Columbo, on ne connaît pas l’assassin dès le début, même plus, on ne sait pas s’il y a eu meurtre ou pas. On s’en doute, car il y a tout l’appareil policier et judiciaire qui apparaît et disparaît au fil du récit. Mais que se passe-t-il dans cette petite bourgade perdue dans un coin de France? C’est le lecteur, bonne poire, qui va peut-être trouver  matière à son meurtre imaginaire en découvrant l’histoire du personnage principal. Mais en sont-ils capables, en réalité ou en imagination pour le lecteur? Tout commence dans une chambre bleue et…

Petula Clark – Balade avec une baladine

On ne peut échapper aux chansons de Petula Clark, un jour ou l’autre l’une d’entre elles aura franchi le seuil de la maison par la radio, la télé ou la chaîne hi-fi. Je crois bien volontiers qu’il y en a peu qui ont fermé l’oreille. Dans les sixties, c’est une des rares qui pouvait plaire autant à papa et maman qu’à leur progéniture. C’est bien sûr une grande star internationale, une des plus grandes, elle a mené de front sa carrière dans plusieurs pays, mais elle a aussi composé une partie de son répertoire. Sa voix est belle, délicieuse avec son petit accent quand elle chante en français, son répertoire est vaste, éclectique. Elle chantait du twist quand ce n’était plus tout à fait de son âge. Elle interprétait les Beatles, Gainsbourg, Vian quand ce n’était pas encore tout à fait à la mode et de bon ton de la faire. Soixante-dix ans de carrière, ça compte dans une vie, surtout quand celle-ci brille de mille feux.
Quand on est une star, la règle c’est qu’il existe des livres pour raconter leurs carrières. Le plus souvent mercantiles, on y parle de tout et de rien, surtout de rien. Pour une fois, nul de tout cela, un livre, un vrai, voulu par l’intéressée avec la collaboration pour son écriture de Françoise Piazza, au titre juste Petula Clark une baladine . Très bien documenté, rempli de photos sorties de l’album familial, il nous rappelle les principales étapes de sa carrière. La petite fille timide qui chantait sur les ondes de la BBC pour soutenir le moral des troupes quand les bombes tombaient sur Londres. Ses débuts d’actrice, car elle fut actrice avant d’être une vedette du disque. Son arrivée en France, son mariage, sa famille, ses rencontres, ses honneurs, sa vie quoi! A l’heure ou beaucoup de vedettes pensent qu’il est à la mode de se foutre de son public avant de finir dans le caniveau, voici un sourire qui s’adresse à chacun, en remerciement du long chemin sans qui l’un ne serait pas l’autre. Elle est certainement une recordwoman du sourire sur les photos, sauf quand elle chante des chansons tristes. C’est une indice pour ceux qui veulent faire une longue carrière. Un livre qu’il faut parcourir avec ou sans nostalgie. Sans même se poser la question: « Que fais-tu là Petula? ».

Petula Clark – Une baladine. Editions Didier Carpentier