Quartier de Montparnasse, juste à côté du cimetière du même nom s’étale le boulevard Raspail. Au numéro 270, une maison d’apparence bourgeoise. Rien, mais absolument rien, ne la distingue d’une autre maison du coin. Ah si les murs pouvaient parler! En août 1901, deux dames séjournent dans cette maison. Elles sont Anglaises et appartiennent à la bourgeoisie de leur pays. L’une d’elles connait assez bien Paris, car son appartement sert à loger périodiquement de jeunes compatriotes féminines venues potasser notre belle langue et essayer de comprendre quelque chose quand on parle l’argot. Elle est rejointe par une amie durant ce bel été. Jusque-là rien de particulier, pourtant elles vont être à l’origine d’une histoire qui défraya la chronique et qui fit couler beaucoup d’encre, spécialement dans les bouquins qui la racontent. Il y a tant de chose à voir à Paris que l’on décide d’aller à Versailles. Nous sommes le 10 août, il fait chaud et le temps est orageux. Elles visitent le château puis vont se balader dans les nombreux parcs qui l’entourent. Elles s’égarent dans les allées en cherchant le petit Trianon. En cours de route, elles croisent des personnages bizarrement vêtus, des homme et des femmes qui ont l’air de s’habiller selon une mode ancienne. Sans l’avouer sur l’instant, elle ressentent une impression de malaise et d’angoisse qui vont crecendo, surtout en croisant un bonhomme qui les regarde méchamment. Un autre plus avenant leur débite des paroles peu compréhensives, dont elles retiennent juste qu’il faut tourner à droite. Elles finissent leur errance brusquement entourées par une noce.
De retour à la maison, elle parlent de leur journée est constatent un fait troublant, bien qu’étant ensemble, à certains moments elle n’ont pas vu tout à fait la même chose. Une des visiteuses, ayant plus tard vu un portrait de Marie-Antoinette lui trouve un ressemblance certaine avec une des personnes aperçues pendant leur promenade. Quelques mois plus tard, pour un tas des raisons, étant persuadées d’avoir fait un voyage dans l’espace temps, elles approfondissent leur connaissances et retournent même à Versailles. Après avoir bien réfléchi, elles décident de publier un livre relatant leur aventure, mais sous un pseudonyme. Il sortira en 1911 et deviendra pratiquement une sorte de best-seller de l’époque et sera plusieurs fois réédité. Ce n’est que bien plus tard, après la mort des deux dames que l’on connaîtra leur vrai nom, Eleanor Jourdain, Charlotte Anne Moberly.
Une édition première édition française de 1959, préfacée par Jean Cocteau, et augmentée dans les éditions suivantes, fera une analyse pointue de cette histoire entre le possible et l’impossible. Les voyages dans le temps existent peut-être, le livre n’écarte pas cette possibilité. Il est un fait certain, l’histoire est racontée sur le site officiel de Versailles. Il semblerait que la fameuse reine est une habitué des apparitions imprévues, spécialement au mois d’août.
Mais si vous assez un soir au 270 boulevard Raspail sur le coup de minuit, regardez bien si vous ne voyez pas le fantôme des Anglaises, on ne sait jamais.
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Paris est une ville très mouvante, ce que l’on voyait il y a quelques années n’est peut-être plus là. Parfois, avec un peu de chance, on arrive à s’accrocher à un bout d’histoire avant qu’il disparaisse. J’ai un exemple sous la main. Lors de mes premières escapades à Paris, cela remonte bientôt à 50 ans, il m’est arrivé de passer mes soirées à Pigalle, l’excuse était toute trouvée j’avais un hôtel rue Lepic. Le quartier était beaucoup plus vivant qu’aujourd’hui. Il y en avait pour tous les goûts, restaurants, boîtes de nuit, prostituées qui papillonnaient autour de la place dans les rues adjacentes. Un de mes endroits favoris était une salle de jeu située au 44 boulevard de Clichy. L’intérêt de cette salle était surtout le fait que l’on y trouvait les premiers jeux d’arcade électroniques. Entre la bagnole qu’il fallait conduire sur un circuit truffé de pièges, ou les extraterrestres qu’il fallait dégommer à coup de pistolet lançant des rayons mortels, il y avait de quoi faire. Deux pépés fumant la pipe, officiaient à l’entrée pour faire de la monnaie, car bien sûr la pièce de cent balles nourrissait les machines. L’endroit n’existe plus bien sûr et depuis longtemps, aujourd’hui c’est un magasin qui vend du cannabis et ses dérivés, à usage médical bien entendu. Pourtant lors de mes première visites, j’ai pu attraper un bout de cette histoire qui disparaissait déjà. Au-dessus de l’entrée, il y avait une enseigne un peu effacée sur laquelle était écrit Minuit Chanson, ce qui aurait pu passer alors pour le nom de l’endroit. Plus tard c’est en lisant un roman de René Fallet Pigalle, que j’ai trouvé le nom et l’endroit mentionnés. Comme l’histoire se passe pendant l’occupation, cela devait donc être quelque chose de plus ancien. Alors recherches…
L’endroit fut couru depuis les années 1920, car moyennant un jeton l’on pouvait écouter un disque via un de ces bon vieux gramophones, chose que tout le monde était loin de posséder. Ainsi ceux qui n’avaient pas le sou pour aller voir une vedette au music hall se consolaient ainsi. Le peintre anglais Edward Burra rattaché au mouvement surréaliste a immortalisé l’endroit. Cette fois-ci le nom est justifié, même s’il ne reste que quelques poussières de souvenirs.

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Pour une fois nous allons pénétrer dans un église, pas tant pout y prier, mais pour découvrir un fait insolite de l’histoire de France. Allons sur l’île Saint-Louis, la plus petite des deux îles sur la Seine au coeur de Paris. Vous ne risquez pas de vous y perdre, elle fait un peu plus de 100 mètres de large sur 500 mètres de long. Comme ce n’est pas très pratique d’y aller à la nage, vous pouvez y emprunter un des ponts qui vous y mènera. En son centre la rue Saint-Louis en l’ile la traverse de part en part. Au 19bis de la rue se trouve l’église qui nous intéresse, elle a d’ailleurs le nom de la rue.
En entrant dans lieux, en cherchant un peu, vous tomberez sur un bénitier. Il a son histoire. C’est Louise de La Vallière qui en est à l’origine. Inutile de rentrer dans les détails de sa biographie, mais qu’elle qu’elle fut la première maîtresse officielle de Louis XIV probablement la seule qui l’aima pour sa personne plutôt que son titre. Quand son étoile commença à pâlir au profit de La Montespan, elle s’enfuit de la cour et se réfugia dans un couvent. Louis XIV vint la rechercher et la ramena à la cour, elle pensa que tout allait s’arranger. Pour remercier les soeurs du couvent elle fit façonner ce bénitier et en fit le don, sans doute aussi un peu par superstition, elle imagina que Dieu protègerait ses amours. Rien de cela n’arriva vraiment, mais la marquise étant très pieuse et sachant qu’elle avait vécut dans le péché décida d’entrer en religion. Elle prononça ses voeux le 3 juin 1675 et devient Louise de la Miséricorde dans l’ordre des carmélites. Elle mourut en 1710. Madame de La Vallière ne nous a pas seulement légué une manière de nouer sa cravate, mais aussi un bénitier…
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Dans le prolongement du Pont Neuf, le pont le plus à l’ouest de l’île de la Cité, en direction sud, vous pénétrez dans la rue Dauphine. Pas besoin d’aller loin, arrêtons-nous au début de la rue au no 2. Je me demande s’il y a beaucoup de gens qui savent que c’est devant cette maison que mourut accidentellement, le 19 avril 1906, que mourut Pierre Curie la tête écrasée par la roue d’une charrette. tirée par des chevaux. Ironie de l’histoire, presque simultanément, un terrible tremblement de terre ravagea San Francisco.
Sources . Wikipédia, B.N.F, Street view, DP


















