En passant

Musique Emporium (4)

Quatrième partie de notre voyage dans les sixties allemandes.

Casey Jones & The Governors. Ce groupe est assez important dans l’histoire du beat allemand, car il a obtenu une popularité assez conséquente. Mais Brian Casser alias Casey Jones et ses Governors sont bel et bien des Anglais. Avant de rencontrer le succès en Allemagne, il forma sur la scène de Liverpool avec Cass & The Casanovas et Casey Jones And THe Engineers, une sorte de plaque tournante qui vit défiler quelques futures célébrités, notamment des membres pour les futurs Big Three, Merseybats, Manfred Mann et le clou du spectacle, Eric Clapton. Dans une version du groupe propre à l’Allemagne, ils enregistrèrent pour le label Bellaphon et Golden 12 une série de singles et d’albums dont une reprise de « Don’t Ha Ha » de Huey Piano Smith qui fut un succès prisé par les teenagers allemands. EIle existe en deux publications, également éditées en France  sur deux EP’s, l’une pour Bellaphon (parue chez President), l’autre pour Golden 12 (parue chez Riviera). Ils connurent d’autres succès, entre reprises et originaux, le plus souvent composés par le chanteur. En 1967, Casey Jones quitta le groupe pour en fonder un autre, Gaslight Union, assez éphémère. Au fil des ans, le groupe original se reforma pour divers concerts. Aujourd’hui encore, bien que largement octogénaire, Casey Jones est décédé en 2022.

1965 – « Don’t Ha Ha », leur plus grand succès.

1965 – Une plutôt bonne reprise de « Love Potion Number Nine » des Coasters.

1966 – Parmi les reprises, il adapta le « Mirza » de Nino Ferrer devenu « Come On And Dance ».

1965 – Une reprise qui n’est tout à fait aléatoire de « Jack THe Ripper ». Le titre original créé par Screaming Lord Sutch en Angleterre est accompagné par les Savages. Justement Casey Jones durant sa période anglaise enregistra des bandes restées longtemps inédites dans lesquelles il était accompagné par les Savages.

1967 – Avec Gaslight Union, un de ces titres qui sonnaient un peu rétro, « Silly Mills Lilly Peppercorn ».

Ian & The Zodiacs. Continuons dans la lancée des groupes anglais qui trouvèrent une partie de leurs rêves réalisés dans les nuits de Hambourg, celui d’avoir du succès. Ils eurent quand même la possibilité d’enregistrer quelque chose en Angleterre, publié par Oriole. Mais c’est en Allemagne qu’ils firent vraiment connaissance avec la notoriété, trois albums et une série de singles vinrent couronner le tout. Je dois dire que j’ai une affection particulière pour le groupe, car ils furent vraiment de bons interprètes et se défendirent également bien avec quelques titres originaux de bonne facture. Sous le nom de Koppycats, ils publièrent également deux albums de reprises des Beatles, destinées aux disques à prix réduit. C’est aussi parmi les rares artistes du label Star-Club a avoir eu à l’époque un album publié aux USA. Le groupe fut vraiment actif jusqu’en 1967, mais comme beaucoup d’autres de cette école, il y eux des reformations sporadiques au moins jusqu’à la mort du chanteur – guitariste Ian Edward en 2007. Parcourons un peu cette discographie.

1965 – Pas trop habituel dans leur répertoire, la reprise d’un standard du blues assez bien réussie, mais très « beat ».

1965 – Reprise du titre de Dionne Warwick « This Empty Place »

1964 – Reprise du succès de Dave Berry. Pour eux, il eut une conséquence inattendue, il fut no 1 au Texas ! Ce qui justifia un album US.

1965 – Un instrumental popularisé par les Sounds Incorporated.

1965 – Un très bel original « Why Can’t It Be Me ».

1966 – Aussi étonnant dans leur discographie, une reprise de « Nature Boy », un succès de Nat King Cole, et c’est assez réussi.

1966 – Un puissant original « No Money No Money ».

1966 – This Won’t Happen To Me, un autre original.

Pour illustration sous le pseudo des Koppycats, ma préférée des Beatles.

The Monks – Ce groupe est largement entré dans la légende, et pas mal de monde les considèrent comme le premier groupe punk. Musicalement c’est assez proche et dix ans avant les Ramones ou les Sex Pistols. Si passablement de groupe anglais ont occupé la scène allemande, eux sont américains. Ce n’est rien d’autre que des GI’s stationnés en Allemagne et qui décident de se réunir pour former un groupe. Ce qui est innovateur, c’est qu’ils ne cherchent pas à concurrencer les orchestres locaux avec de jolies mélodies ou en reprenant des classiques du rock. Non, leur musique est surtout basique et les vocaux très loin de l’opéra. Leur aspect scénique est aussi calculé, ils adoptent la tonsure des moines catholiques, ce qui est sans doute plus rapide que d’attendre que les cheveux poussent, mais un rien provocateur alors que tout les garçons rêvent d’une belle et longue chevelure. Ils sont plus devenus une grande légende qu’un groupe couronné de succès de son vivant. Polydor tenta quand même la sortie d’un album et quelques singles qui restèrent un peu dans les oubliettes. On peut facilement deviner que leur musique ne fut guère prisée des adolescents allemands de l’époque, même s’ils furent un de ces groupes « dont on causait », la vente des disques resta très en retrait. Mais à chaque explosion d’un nouveau mouvement musical, les encyclopédistes recherchèrent les racines. Longtemps après être retournés dans leur patrie, on les redécouvrit à la faveur du punk pour les considérer comme ancêtres de cette musique. En fait, la différence avec les autres groupes qui frisèrent cette musique, c’est qu’eux ne firent que cela. Cette nouvelle notoriété leur donna envie de refaire quelques réapparitions spécialement dans les années 2000, notamment avec les Sonics, le seul groupe américain que peut prétendre avoir eu une démarche semblable. La légende est encore vivante, par contre il ne reste plus grand monde encore en vie du groupe original.

L’album original de 1966, très très rare, les copies peuvent dépasser les 1000 euros

En live 1966

Cuckoo

I Can’t Get Over You

Complication

En studio

1966 – I hate you

1966 – Black Monk Time

1966 – Blast Off

The Moon Riders – Les groupes instrumentaux existent aussi en Allemagne. En général, ils sont dérivés soit des Shadows, soit des Tornados, En voici un exemple, les obscurs Moon Riders qui enregistrèrent deux singles avec des titres originaux sur le label Bellaphon, on retrouve dans les titres la notion de spatial chère aux Tornados. Deux singles apparemment assez recherchés par les collectionneurs virent le jour.

1965 – Moon Dance

1965 – Moon Fever

The Somebodies – Tico Tico. Un autre exemple instrumental plus dans le style Shadows, mais le groupe n’a de loin pas la même notoriété. Le titre est quand même intéressant, une reprise de l’air brésilien « Tico Tico », une mélodie qui demande quand même une certaine virtuosité. On trouve uniquement ce titre sur un album compilation de 1965 publié par Polydor « Beat City », comme celui que je vous propose à la suite.

The Tremors – What Would I Do. Un autre atterrisage à Hambourg, cette fois-ci des Ecossais. Un album et quelques simples, dont j’ai pu retrouver celui-ci, un assez bon original très beat. C’est un titre que j’ai du plaisir a réécouter de temps en temps. En 1971, toujours en Allemagne, le groupe se mua en Light Of Darkness, et enregistra un album de hard rock aujourd’hui très recherché.

Manfred Mann – Sie. Comme passablement d’artistes anglais, Manfred Mann enregistre dans une version allemande un de leurs titres pas très connu « She » qui devient « Sie ». C’est une manière de fabriquer des collectors pour plus tard.

 

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En passant

Musique Emporium (2)

Seconde partie de notre voyage dans les sixties allemandes. Parlons un peu d’un groupe légendaire qui a écrit un beau chapitre à part dans l’histoire de la musique.


The Liverbirds – Quatre jeunes anglaises de Liverpool sont fascinées par l’ambiance musicale de la ville, notamment les Beatles qu’elles rencontrent par la suite. Elles ne savent pas jouer une note mais décident de s’acheter des instruments, guitares, basse, batterie. Elle s’entraînent et finissent par se débrouiller plutôt bien. Après quelques changements de personnel, nous trouvons Valerie Gell, guitare solo (décédée en 2017); Pamela Birch, guitare rythmique (décédée en 2009), Mary McGlory, guitare basse;  Sylvia Saunders, dynamique et souriante, batterie. C’est cette formation qui partira sur la route du succès. Elles essayent de s’imposer, elles sont même présentées à Brian Epstein le manager des Beatles, mais rien de concluant n’en sort. Pourtant, un groupe de rock entièrement féminin à l’époque, c’est presque une révolution. Sans trop de résultats positifs sur place, elles finissent par arriver à Hambourg au Star-Club. Elles deviennent très populaires et enregistrent deux albums et quelques singles pour le label Star-Club. Elles ont aussi l’occasion de voyager à travers l’Europe et même au Japon. Musicalement elles n’ont rien de minettes qui chantent des trucs à la mode. Elles puisent dans le répertoire de Bo Diddley, Chuck Berry, Muddy Waters et même des Yardbirds. Je n’irai pas jusqu’à dire que leur reprises sont les meilleures que j’ai entendues, mais cela dégage un certain charme, féminin dirons-nous. Pamela Birch, la guitariste rythmique, composa quelques titres dont un fut même repris par Johnny Kidd « It’s Gotta To Be You » et surtout l’excellent « Why Do You Hang Around Me ». Lee Curtis, que je vous ai présenté dans le premier chapitre, m’a raconté une anecdote à propos d’elles, je l’avais branché sur le sujet. Quand elles arrivèrent à Hambourg au Star-Club, cela ne passa pas inaperçu parmi les musiciens qui hantaient le coin. La technique du groupe demandait sans doute quelques petits réglages. Alors tous les musiciens expérimentés s’empressaient pour leur prodiguer des conseils. sans doute ce n’était pas complètement désintéressé. La discographie est essentiellement centrée sur l’Allemagne, mais il y eut des publications aux USA, en Espagne, en Hollande, au Japon, mais rien dans leur Angleterre natale. Toutes les publications originales, spécialement les albums, sont de beaux collectors. Le groupe se séparera en 1968, mais il y eut quelques reformations par la suite. A l’exception de la batteuse, les autres restèrent en Allemagne. Mary McGlory épousa Frank Dostal, un ancien Rattles et Wonderland. Il composa aussi des hits pour le duo disco Baccara. En 2019, Liverpool se décida enfin à rendre un hommage au groupe sous forme d’une comédie musicale « Girls Don’t Play Guitars », à l’origine une affirmation que John Lennon aurait prononcée quand elles rencontrèrent les Beatles. Les deux survivantes sont bien entendu impliquées dans la réalisation du show. Etrangement, tout le monde semble découvrir leur existence.

Live – Peanut Butter. Cette chanson que l’on peut considérer comme une de leurs plus populaires est la reprise d’un titre créé en 1961 par un groupe de r’n’b noir américain les Marathons. Il fut également repris en France par Danyel Gérard.

Live – Why Do You Hang Around Me, un original de Pamela Birch.

1965 – Version studio. C’est le premier titre que j’ai entendu d’elles et qui m’a donné envie de m’y intéresser de plus près.

. Live – Diddley Daddy de Bo Diddley,

Around And Around, de Chuck Berry. Cette séquence fut tournée pour les besoins d’un film « Hurra, die Rattles kommen », dans lequel les Rattles essayent de tourner un film à la manière des Beatles. Les Liverbirds apparaissent dans ce film ainsi que Casey Jones & The Governors. C’est donc du cinéma.

Too Much Monkey Business de Chuck Berry.

1965 – Leave All Your Old Loves. Un original de Pamela Birch.

He Hardly Ever Call Me Honey. Une autre obscure perle composée par Doc Pomus.

Before You Accuse Me de Bo Diddley.

Mona de Bo Diddley.

For Your Love des Yardbirds. J’ai fait découvrir cette version à Jim McCarty, le batteur des Yardbirds, dont il ignorait jusqu’à l’existence.

Un petit concert avec les deux survivantes à Liverpool dans la « Cavern 2019 » interprétant « Peanut Butter » et « Diddley Daddy ». Un vrai moment de nostalgie pour moi qui suis un fan depuis toujours.

Une interview à propos du show.

Un reportage de 16 minutes avec les deux survivantes qui racontent un peu leur histoire.

Nous ne sommes jamais devenues aussi célèbres que les Beatles, mais nous étions des amies et nous sommes restées des amies – Sylvia Saunders

2025

Les deux survivantes bientôt octogénaires, avec la complicité de deux « jeunettes » décident en 2025 de remettre ça. Après avoir écrit un livre, elles reprennent le chemin des studios pour quelques nouveaux enregistrements. A l’évidence, les grand-mères ne sont pas bonnes pour la maison de retraite, en 4 semaines plus de 650000 vues !

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The Blizzards – Ce sont les Yardbirds qui m’ont fait indirectement découvrir ce groupe. Dans les années 1980, un fanzine allemand « Gorilla Beat » avait consacré quelques lignes sur le groupe. J’avais notamment noté qu’ils avaient enregistré en allemand une reprise de « Heart Full Of Soul » des Yardbirds devenu « Ohne Dich ». En bon fan, je collectionne un peu tout ce qui concerne leurs titres en langues étrangères, ce qui ne veut pas dire que j’ignore les reprises en anglais. Après quelques recherches, j’ai fini par mettre la main sur une copie du single allemand. De fil en aiguille, j’ai découvert que le groupe avait enregistré cinq 45 tours et un album, tantôt en anglais, tantôt en allemand. C’est un pur produit du beat allemand, ils sont originaires de la Saxe, mais quelques titres sont loin d’être ridicules et peuvent même concurrencer les productions anglaises du genre.

1966 – Ohne Dich – La reprise des Yardbirds.

1965 – I’m Your Guy –  Un original de 1965, vis à vis de la production anglaise c’est loin d’être ridicule. A mon avis leur titre le plus fouillé.

Extraits de l’album de 1965, titres originaux. Un joli collector dans sa publication originale et de très bon titres. Une pochette assez décadente pour l’époque.

I Will Always Love You

 Be Mine

Faithless Sleep

Dr Jekyll

Mr Goofy

Blizzards – Un instrumental qui aurait pu être enregistré par les Ventures sans être meilleur

A suivre