En passant

Inventaire musical à la Prévert (36)

Les visiteurs qui viennent régulièrement ici connaissent mon côté versatile en musique. Je suis capable de m’émerveiller sur un tas de musiques qui n’ont pas grand chose en commun. Mes copains d’école doivent encore se souvenir que je leur parlais de trucs qui étaient encore complètement inconnus pour eux. C’est sans doute la première fois qu’ils entendirent parler des Yardbirds, de John Mayall, de Cream. Un copain de cette époque que j’ai revu récemment me l’a rappelé : « En musique tu avais toujours une longueur d’avance ». Je n’y suis en fin de compte pour pas grand chose, j’avais juste la curiosité d’écouter chez le disquaire du coin, des disques qui ne passaient pas à la radio, et surtout d’avoir la faculté de trouver cela génial. Quand mes potes écoutaient Johnny ou Cloclo, j’achetais mes premiers disques de musique psychédélique. Cela ne m’empêchait pas d’écouter des chanteurs plus abordables ou les groupes anglais qui pullulaient à l’époque, Kinks, Small Faces, Who et autres. Vers 1969, j’étais déjà un peu saturé de musique pop et sans le vouloir vraiment, je cherchais déjà d’autres tendances. Il y a pas mal d’albums ou d’artistes qui pavent un peu le chemin pour la suite et qui vous aident à ouvrir les yeux et les oreilles. J’avais frissonné sur deux ou trois albums du genre, les premiers MC5, Stooges, Blue Cheer, musique qui préfigurait la venue du punk avec quelques années d’avance. Cette musique était musicalement assez brute, plus rythmique que mélodique, on était assez loin de ce que proposait un groupe comme les Moody Blues, musique élaborée en utilisant tous les artifices des studios. Je les écoutais aussi, je les vénère encore aujourd’hui, mais mon côté versatile était déjà présent. En 1971, un autre album vint confirmer cette tendance personnelle à écouter de la musique plus déjantée, celui de Stack Waddy, originaire de Manchester.
Ce groupe anglais fut découvert par John Peel, un producteur anglais qu’il n’est plus besoin de présenter aux spécialistes. Impressionné par leur attitude scénique remuante et anticonformiste, il n’est pas rare que le chanteur vomisse sur la police ou descende de scène pour secouer les auditeurs passéistes. Il les signe sur son fameux et éphémère label Dandelion (il signa aussi Gene Vincent), pour les faire accoucher d’un album où sans doute une césarienne fut prescrite par le docteur Peel.
L’album ne contient presque que des reprises, des titres qui conviennent très bien à ce qu’ils veulent faire avec, des versions saignantes éructées par un chateur la bave au lèvres, peu destinées aux minettes qui fréquentent Carnaby Street. C’est en musique le contraire de ce qu’est à table un plat diététique, ici c’est un plat de lentilles bien bourratif accompagné d’un lard bien gras. Quand il m’arrivait autrefois d’animer quelques discothèques, je passais parfois en fin de soirée un titre où l’autre, quand l’alcool commençait à faire quelques effets. Le résultat était flagrant, on se défoulait beaucoup plus avec Stack Waddy qu’avec Boney M.
En fait, le groupe n’eut qu’une existence brève le temps d’enregistrer deux albums dans la même veine, mais il y eut au fil du temps quelques réincarnations la dernière vers 2007. Voici ce premier album dans son intégralité. Le second pourra faire l’objet d’un autre article dans le futur. Et surtout merci au disquaire qui me le proposa il y a 50 ans, Là où il est, j’espère qu’il est sorti du purgatoire !

Roandrunner (Bo Diddley)
Bring It To Jerome (Bo Diddley)
Mothball (original du groupe)
Sure ‘Nuff ‘N’ Yes I Do (Captain Beefheart)
Love Stors (Jethro Tull)
Suzie Q (Dale Hawkins)
Country Line Special (Cyril Davies)
Rolling Stone (Muddy Waters)
Mystic Eyes (Them)
Kentucky (original du groupe)

Les légendes de la discographie française

Durant les sixties, la discographie française de distingua par le nombre impressionnant de publications qui furent faites sous la forme de EP, c’est à dire quatre titres, deux par face. Le principe de base était un peu mercantile, on vendait deux fois plus de marchandise sur la réputation d’un titre principal ou d’un succès, le 45 tours simple avec deux titres était réservé à la promotion et aux jukeboxes. L’avantage principal de ces EP’s demeurait dans le fait que ces éditions étaient présentées dans une pochette avec le plus souvent une photo de l’artiste et un emballage cartonné et plastifié plus résistant à l’épreuve du temps. L’Angleterre et les USA eurent beaucoup moins recours à ce genre de publications. Le plus souvent, la règle était le 45 tours simple emballé dans une simple pochette à trous permettant de voir l’étiquette du disque. Aujourd’hui ces fameuses disques EP’s français, surtout ceux concernant des artistes étrangers, sont recherchés par les collectionneurs du monde entier car ils sont uniques dans leur genre et peuvent parfois atteindre des sommes folles s’ils sont très rares. Au fil des semaines, je vous en présenterai quelques uns parmi ceux qui attirent justement les collectionneurs. Ils seront présentés avec la pochette, éventuellement avec un scan de ma collection personnelle si je ne trouve rien de satisfaisant, les titres qu’ils contiennent, et le plus haut prix atteint par une enchère sur Ebay.
The Sorrows – Pye / Vogue EP 2410. Publié en 1965. Meilleure enchère sur Ebay 259 euros.

Take A Heart
We Should Get Along Fine
Baby
Teenager Letter

2 réflexions sur “Inventaire musical à la Prévert (36)

  1. Bonjour M. Boss,
    Encore une découverte pour moi, je ne connaissais pas Stack Waddy ! ça ne m’étonne pas qu’en fin de soirée que sa musique, sa voix rauque, permette de se lâcher complètement , « Country Line special » , « Rolling Stone » « Mystic Eyes » , « Kentucky » en sont des exemples, même bien à jeun je me suis régalé.
    Bonne semaine
    cooldan
    PS : cette série avec les pochettes françaises et la meilleure enchère sur Ebay , montre bien l’intérêt de nos Ep’s
    .

    • Hello Cooldan,
      L’attirance des collectionneurs pour les éditions françaises est bien réelle. A part les trucs plus ou moins courants, les artistes étrangers édités en France sous cette forme sont très prisés. Même une partie des chanteurs français attirent les amateurs, Jacqueline Taiëb, Catherine Ribeiro (période Barclay), les Op’4. et en général la plupart des artistes qui figurent dans les compilations « Swinging Mademoiselle ».
      Content que vous appréciez Stack Waddy, c’est un de mes disques de chevet.
      Bonne suite de semaine

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