En passant

Exploration en terre musicale inconnue (50)

Au temps du vinyle, la production phonographique française est assez minimaliste par rapport à un pays comme les USA. Cela ne veut pas dire qu’elle n’existe pas. Malgré tout, une immense partie de cette production restera dans l’ombre, par manque de soutien de la presse spécialisée, par manque de diffusion radiophonique, par manque promotion. Je me souviens d’avoir vu chez les disquaires des représentants de maison de disques faire la promotion de nouveautés du catalogue. Ils n’avaient rien de différent des autres représentants, sauf qu’ils vendaient ou faisaient la promotion des disques au lieu de brosses ou d’assurances. Il y avait ce qui était en demande, les fameux succès du moment, et des trucs moins connus ou inconnus qu’il fallait essayer de refiler au disquaire en vantant la marchandise, charge à lui d’en souligner les mérites auprès d’une clientèle dont il connaissait les goûts.
Malgré cela une très grande partie de cette production est restée inconnue, ne s’est pas ou mal vendue, c’est en général ces disques qui font le bonheur des encyclopédistes, même certains sont devenus de très estimables pièces de collection. Allons faire un tour dans ces publications dont la plupart vous sont inconnues, autant les chansons que les artistes, à moins que vous n’ayez été un chasseur de disques averti pour quelques uns d’entre eux. Toutes les publication dont je parle ici ont bien été éditées en France et sont uniquement des 45 tours.

1961 – The Rivieras / Refrigerator. Il existe deux groupes américains partant le même nom. Celui-ci est la version noire à tendance r’n’b. Cet EP paru en 1961 est une assez belle rareté dure à dénicher.

1964 – The Rivieras / California Sun. Voici la version blanche, il s’agit cette fois d’un groupe de surf. Leur reprise de « California Sun » créé par Joe Jones, leur valut un beau succès qui faillit être no 1 si les Beatles n’occupaient pas déjà cette place. En France, on connaît plutôt ce titre via l’adaptation des Chaussettes Noires, et encore ce ne fut pas à proprement parler un succès. Ce EP des Rivieras est assez rare.

1969 – Rocher Band / Ma Kate Ke Oyo.  Un des nombreux disques destinés aux Africains résident en France. En général, ils sont assez rares, du pas trop rare au très rare, termes auxquels on peut aussi coller de pas très recherché à très recherché. Depuis que la musique ethnique est devenu un truc culturel, ici le Cameroun, ces disques autrefois méprisés nous font remonter aux racines de la musique moderne. Ce disque est un collector moyen, mais pas très courant.

1963 – Bob B. Soxx And The Blue Jeans / Zip-A-Dee Doo-Dah. Ce n’est sans doute pas la publication française la plus recherchée concernant Phil Spector, mais elle n’en est pas moins du genre assez rare. Tout le charme de ses productions de la grande époque.

*****

1970 – Bjorn & Benny / She’s My Kind Of Girl. Ce sont les débuts d’Abba, la partie mâle est mise en évidence, mais le groupe est déjà formé et n’a pas encore son nom définitif, en attendant les dames font les choeurs. La chanson appartient à la musique d’un film « Inga » et l’on peut déjà reconnaître une certaine classe à ces deux compositeurs qui feront fureur plus tard. Cette rare publication bénéficie de tout l’attrait qu’elle peut présenter aux plus fous collectionneurs d’Abba.

1966 – Hootenanny Singers / Finns Det Liv Så Finns Det Hopp. Puisque l’on est dans Abba, restons-y encore un peu. Dans ce que l’on peut considérer comme premières publications françaises du pré-Abba, le pompon revient aux deux EP’s des Hootenanny Singers, un groupe folk suédois à succès dans lequel on retrouve Bjorn Ulvaeus. Sur le deuxième EP, encore plus fort, on trouve une composition, la première, qu’il a écrite avec son futur collègue d’Abba, Benny Anderson. C’est chanté en suédois, mais le groupe éclectique a aussi enregistré une version de « La Mamma » de Charles Aznavour chantée en espagnol et en suédois. Ces publications n’eurent aucun succès en France et sont bien évidemment rares. Petite anecdote pour 1965, la formation Les Célibataires adapta une chanson du groupe, « Darlin » (il en existe une version en suédois), composée par Ulwaeus, sous le titre « Regarde Regarde ». J’ai mis ce titre en-dessous, la versions des Célibataires n’étant pas Youtube. Bjorn Ulvaeus n’est pas sectaire, il lui arrive de retrouver ses anciens potes et de chanter avec eux. Récemment, il a écrit un texte sur Greta Turnberg dans lequel Il affirme que l’humanité a plus besoin de personnes comme elle que de vieux messieurs comme lui.

Soyons fous, voici leur version de « La Mamma ».

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1960 – The Fireballs / Torquay. Un classique de la guitare électrique, cependant nettement moins connu que d’autres. Il eut un succès modéré aux USA et moindre internationalement. Le groupe devra attendre 1963 et Jimmy Gilmer & The Firebals pour être no 1 avec « Sugar Shack », cette fois-ci vocal. L’édition française sur un EP Top Rank est très rare. Par contre le succès de 1963 paru chez London en EP est plus courant, mais comme il est partagé avec le « Wipe Out » des Surfaris, on peut imaginer qu’il est plus recherché pour la présence de ce surf instrumental.

1967 – The Hesitations / You Can’t By Pass Love. Si on observe les publications françaises en EP’s qui sont dédiées à des artistes noirs, on remarque que la plupart sont bien cotés et aussi rares. Cette publication des Hesitations, un groupe de soul music n’échappe pas à la règle, il atteint vite la centaine d’euros.

1967 – Just Us / What Are We Gonna Do. Dans les encarts publicitaires des disques Vogue, on voyait souvent la mention de ce disque publié en EP. Il s’agit d’un duo américain dans lequel on trouve Chip Taylor, plus connu comme compositeur de « Wild Thing » que les Troggs empruntèrent aux Loved Ones pour en faire un succès retentissant. Quand on a ce titre en tête, les morceaux qui figurent sur ce disque paraissent assez fades. Un rare et petit collector.

1966 – The Young Rascals / Good Lovin’.  Première publication française pour ce groupe qui cartonna bien aux USA. C’est encore un de ces disques qui n’est pas d’un rareté absolue, mais sans doute une des pièces les plus recherchées de la discographie française. En plus le titre ne manque pas de punch.

1967 – Jimi Hendrix / Purple Haze – Disque de poche. Une des pièces les plus exotiques de la discographie française de Jimi Hendrix. En 1967, Barclay lance un truc éphémère, le disque de poche. Cela consiste en un disque de 15 cm qui tourne en 33 tours avec 3 titres par face. La durée des morceaux est ramenée à 2 minutes. Ce fut un bide complet et des 6 artistes publiés sous ce format, seul celui consacré à Jimi Hendrix attire vraiment les collectionneurs, parfois pour un assez bon prix.

1966 – The Knickerbockers / Lies. Puisque le batteur de ce groupe et aussi la moitié du duo des Righteous Brothers, à partir de 1968 jusqu’en 1973, Jimmy Walker, vient de décéder récemment, je peux parler de cet EP. J’avais échangé avec lui quelquefois sur la Toile, je lui avais même fourni un scan de cette fameuse rare et unique pièce de la discographie française, 2 ou 300 euros c’est assez courant. En plus, je ne l’avais pas encore chroniqué dans cette rubrique, bien que j’ai parlé plusieurs fois de ce groupe dans ces colonnes.  Ce titre figure certainement dans les 20 ou 30 disques que j’ai le plus écoutés dans ma vie, cela fait 54 ans que je l’écoute. On l’a souvent comparé à une parfaite imitation des Beatles, au point qu’un petit malin a fait un fake très réussi des Beatles interprétant la chanson (voir le clip en dessous). R.I.P Mr Walker.

 

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2 réflexions sur “Exploration en terre musicale inconnue (50)

  1. Bonjour M. Boss,
    je ne connaissais pas l’existence de ces disques de poche ….une curiosité, je n’ai jamais eu l’occasion d’en voir un !
    The Knickerbokers …je connaissais cette Fake vidéo avec les Beatles, mais c’est vrai on pourrait se faire prendre facilement sans être très connaisseur sur le répertoire Beatles , montage super bien fait avec presque une bonne synchronisation du chant avec la bouche.
    Bonne semaine
    cooldan

  2. Hello Cooldan,
    La vie de ces disques de poche est éphémère, j’en ai vu un ou deux à l’époque dans les magasins, mais je ne voyais pas trop l’avantage par rapport à un EP traditionnel, ils coûtaient à peu près le même prix. pour deux chansons de plus toutes raccourcies à 2 minutes. J’en possède un seul, les Young Rascals. Même dans les foires aux disques, ils sont peu visibles même invisibles, Nous sommes en 1967, l’année de la transition entre le EP et le single, Barclay est le plus réticent à abandonner le EP, pour lui le single est destiné aux jukeboxes et rien d’autre. Un cas typique de 1967, c’est la publication uniquement en single de « Whiter Shade Of Pale » de Procol Harum, une vente énorme. On estima que Decca/Deram France perdit un ou deux millions en le sortant uniquement en single. Il était d’ailleurs emballé dans une si belle pochette, identique à celle d’un EP, que bien des vendeurs croyaient qu’il s’agissait d’un EP et le vendaient au même prix. J’ai vu souvent ce cas dans les magasins, moi-même je failli en être victime. La première fois que je l’ai entendu à la radio, je croyais que c’était un nouveau Spencer Davis Group, tant la voix de Gary Brooker ressemblait à celle de Stevie Winwood. Barclay et son truc de poche a sans doute essayé d’attirer un autre public pendant cette transition, mais sans succès.
    Bonne fin de semaine.

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