dimanche en manches

Le chauffage est à coin, training, pull, couverture sur les jambes, Le Boss se les gèle malgré tout. Dehors il doit faire -10, le tout accentué par un petit vent du nord qui souffle des glaçons. Alors pour se réchauffer allons faire un tour sur les plages de Californie avec le mouvement musical qui lui est associé, le surf!
Ce mouvement musical qui fera date dans l’histoire de la musique est la transition entre le rock and roll des années 50 et le déferlement de la Beatlemania à partir de 1963. Disons que il n’a pas comemncé à un date précise, ni fini de la même manière. Grosso-modo, il atteint le sommet de sa popularité entre 1961 et 1965. Le groupe phare de cette musique est bien sûr les Beach Boys, ce ne sont pas les plus puristes, et surtout ils ne furent pas les seuls. La paternité de cette musique revient en grande partie à Dick Dale (voir mon ancien article) Quand je dis cela, je veux surtout distinguer la manière de jouer cette musique, car elle est particulière. Basée principalement sur la réverbération par amplification du son de la guitare et jouée plutôt sur les cordes basses, Fender de préférence. Cela donne ce son qui fait parfois pout pout ou pip pip, reconnaissable entre mille. Dick Dale est certainement un des génies de la guitare du 20ème siècle, pas seulement comme interprète mais comme créateur. Si certains disques de surf peuvent ne pas sonner comme ceux Dale, c’est que le surf est aussi lié à un état d’esprit et à un sport très ancien qui consiste à glisser sur l’eau à l’aide d’une planche. Musicalement le surf est étroitement lié à un style de voitures trafiquées que les Américains appellent le hot rod (piston chaud), qui peut aussi avoir une connotation sexuelle. Planches ou bagnoles, une manière de vivre sous le soleil de Californie. Voyons à travers quelques clips quelques étapes essentielles de cette musique dans ses années de gloire. Soleil et musique, on a bien besoin…

Commençons par le Boss, pas moi l’autre,  et deux de ses titres célèbres dont le fameux « Misirlou »

Les premiers viennent en suite, les Beach Boys

Un des premiers hits, the Regents – Barbara Ann, que l’on peut classer dans l’esprit surf. Repris 4 ans plus tard avec succès par les Beach Boys.

En 1961, un des premiers titres qui placent le style hot rod sur orbite c’est le fameux « Stick Shift » des Duals. C’est probablement un des rares titres de ce genre enregistré pas des Noirs.

Les Trashmen trouvent le roi du surf, face B de leur fameux « Surfin Bird », titre d’appel pour le surf, mais en réalité l’un des premiers disques authentiques de punk.

Pour une bonne part, le surf est instrumental. Une des plus fameuses réussites de 1963, « Pipeline », terme de surfeur qui désigne une vague qui forme un tube quand elle roule sur elle-même et dans lequel ils adorent se glisser. Créé par les Chantays, des jeunes tout juste sortis de l’école.

Même style, même année, un titre rival « Wipe Out, moquerie destinée au surfeur éjecté de sa planche. C’est joué par les Surfaris.

Tout le monde se met au surf. Les Tokens qui eurent un hit monstrueux avec la version anglaise du « Lion Est Mort Ce Soir », interprètent une Suzie qui a l’air d’aimer les voitures.

Les Ventures, le plus populaire groupe instrumental au monde surfisent leur hit de 1960 en version 1964. Un arrangement intelligent qui réécrit presque le titre.

Les Anglais sont plus réfractaires à ce style. Mais ici et là une exception, les Dakotas, accompagnateurs de Billy J Kramer mettent en boîte « The Cruel Sea », qui sera rebaptisé « Cruel Surf » pour les Américains. A noter que c’est la face B du single des Ventures que je vous ai proposé précédemment.

Les chanteuse de surf sont plus rares, mais on peut quand même repêcher Annette Funicello, vedette des studios Disney

Pure pépite de pur surf instrumental « Movin » par les Astronauts. Tous les ingrédients du son surf sont la-dedans.

Un hit de bonne facture dont le titre est significatif « California Sun » par les Rivieras. Repris en France par les Chaussettes Noires sans Eddy Mitchell.

Comme toutes les musiques le surf a ses nostalgiques. Dans les années 80, un très bon groupe de revival Jon & Nightriders dans « Dept Charge »

Sous l’oeil attentif de Nokie Edwards, lead guitar des Ventures, une toute jeune japonaise joue « Walk Don’t Run »

Dick Dale, le fou surfant sur sa guitare!

dick dale

Le surf est un style de musique qui sera considéré par certains comme une sorte de rock and roll édulcoré. En général, les rockers de la première heure regardent cette musique avec une certaine hauteur. Il est sûr que c’est une musique beaucoup plus douce, moins bruyante. Comme elle est née en Californie, on peut entendre dans certaines chansons une influence latine, le Mexique n’est pas si loin. Ce qui est sûr, elle est la transition entre le rock basique et un développement dans la recherche sonore qui va prendre le pas. On retrouvera des influences de surf dans la musique à Jimi Hendrix ou des groupes comme Iron Butterfly. Ce qui est certain, c’est que le pionnier de la surf music fut Dick Dale.
Dick Dale (Richard Mansour) est né en 1937. Il n’est pas vraiment un Américain, mais son père est libanais et sa mère polonaise. C’est seulement en 1954 que ses parent émigrent aux USA, en Californie. Bien vite il se découvre une passion pour le surf, pas la musique attendez qu’il l’invente, mais le sport. Il est aussi attiré par celle-c et apprend plusieurs instruments dont la guitare. Comme il est gaucher et par manque de moyens, il joue sur une guitare pour droitier à cordes inversées, ce qui lui permettra un attaque particulière qui ne sera pas étrangère à son image sonore. Quand il adoptera des guitares pour gaucher, il conservera les cordes inversées. Tout reste à créer. Son but avoué et de recréer en musique les sensation du surfeur sur la vague. Il s’y attelle et commence à mettre au point son jeu qui consiste surtout à jouer sur les notes basses de la guitare avec un effet de réverbération poussé à fond, ce qui donne ce son vrombissant. Il aura l’occasion aussi avec sa marque de guitare, Fender, d’expérimenter et mettre au point diverses techniques d’amplification et de réverbération. En 1961, il se lance avec un premier disque « Let’s Go Strippin », qui est le premier vrai disque de surf, accompagné par son groupe les Del-Tones. Il le publie sur son propre label, Deltone, car il est aussi un homme qui se méfie du showbiz, et il le sera toute sa vie. Suivent plusieurs disques et un album « Surfer’s Choice » en 1962, qui sera distribué nationalement pas Capitol. Devant, la popularité grandissante de cette musique, Dale est obligé de concéder une meilleure distribution, impossible avec un petit label. Cette même année sort le titre qui fera sa gloire « Miirlou », un vieil air d’origine grecque, mais populaire dans les pays arabes. C’est son oncle qui joue de l’oud, un instrument à corde d’origine arabe, qui lui inspira de mettre au point cette chanson dans son style. Il l’a jouait sur une seule corde de son instrument. Bien vite le surf devient très populaire et est adopté par pas mal de monde. Des groupes instrumentaux, les Surfaris, les Chantays auront leur heure de gloire. Des groupes vocaux, certains morceaux de Dick Dale sont vocaux, Jan et Dean et bien sûr les Beach Boys, qui finiront d’exporter cette musique dans le monde entier. Dick Dale continuera d’enregistrer plusieurs albums au cours de cette première moitié des sixties. L’invasion des groupes britanniques, Beatles et autres, portera un coup fatal au surf, qui passera au second plan. Ce n’est pas la mort de cette musique, bien loin de là, elle sera toujours liée avec la fameuse planche et la nostalgie. Pour Dick Dale, l’infortune ne sera pas tellement musicale, mais on lui diagnostique un cancer du rectum. Il s’en sortira, mais pour un long moment ses activités musicales seront mises en veilleuse. Il continuera malgré tout à se produire sur scène et participer à des activités musicales. On le voit notamment sur l’album solo de Keith Moon des Who. En 1979, autre coup du sort, il manque de perdre une jambe suite à une infection, en se blessant dans une eau polluée. Depuis lors, il est devenu un militant actif écologiste. Les années passent, il enregistre des albums en 1983, 1993, 1994. Mais un coup de chance va relancer sa carrière via le cinéma. La fameux film « Pulp Fiction » de 1994 intégrera « Misirlou » dans le générique du film. Un tas de spectateurs trop jeunes pour avoir connu l’heure de gloire du surf, redécouvriront son créateur. Depuis il n’arrête plus. Il ressort un excellent album en 1996 « Calling Up Spirits » où il se montre très virulent dans sa technique de jeu. Il reprend « Third Stone From The Sun » de Jimi Hendrix. L’année précédente il a adapté en version surf un extrait du « Carnaval Des Animaux » de Camille Saint-Saëns, pour une animation dans un parc Disneyland. Il tourne, tourne et tourne encore, recueille les compliments et les honneurs. Il visite plusieurs fois l’Europe où on le reconnait enfin, ce qui n’a pas trop été le cas dans les années 60. En 2008, il subit une nouvelle attaque de son cancer, il se retire de nouveau pour un temps, mais il a l’air de s’en sortir une nouvelle fois, ce qui augure de nouvelles tournées pour bientôt. Son jeune fils Jimmy fait maintenant partie de son orchestre, c’est beau la famille.
Un peu tous les styles de musique moderne ont leurs héros, on peut dire de la surf music qu’elle n’en a qu’un. Mais il est de taille, la taille de la plus grosse vague de surf que les rivages californiens ont vue.

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