








Alexandre Balthazar Grimod de La Reynière (1758 – 1838), fut un de ces personnages qui traversa l’histoire en se singularisant de ses contemporains. Cela commença dès sa naissance, car il naquit avec des mains qui n’avaient pas de doigts, Cela lui évita sans doute quelques remontrances de la part de ses parents, car il ne fut jamais surpris en train de mettre ses doigts dans son nez, mais pour la suite c’est assurément un handicap, dont il s’en accommoda plutôt bien. Il fut avocat, journaliste, feuilletoniste, écrivain. Ses parents étant des gens aisés, on lui fit fabriquer des mains artificielles pour conjurer ce coup du sort. Il les cachait sous des gants qu’il portait toujours. Il en profita par la suite pour faires quelques bonnes plaisanteries qui consistaient à mettre ses mains sur un tuyau de poêle chauffé à blanc, narguant l’assistance d’en faire autant. Son enfance, puis son adolescence révéla toute l’ampleur de son personnage. Ayant fait de bonnes études. Il commença à fréquenter les milieux du théâtre et de la littérature, s’intéressant aux auteurs mais aussi dans ce qui se passait derrière les coulisses où il ne manquait pas d’approcher les jolies actrices. Il avait la réputation de souffler le chaud et le froid, pouvant prendre fait et cause pour un gueux dans son métier d’avocat, ou ne pas hésiter à tuer lors d’un duel un bourgeois qui l’avait provoqué.
Mais sa véritable passion était ailleurs, il adorait manger et éleva l’art de la cuisine à hauteur d’institution. Il amèna à sa table des philosophes, des gens de lettres et des artistes, il les invite à des déjeuners bi-hebdomadaires fort appréciés de gourmets tels que Andrieu et de gens d’esprit comme Rétif de La Bretonne, Palissot, Beaumarchais, etc. Il va lui-même choisir les denrées à la Halle où les marchands le surnomment le « fermier général de la cuisine ». Il publiera par la suite les premiers articles et livres sur la gastronomie qui firent longtemps autorité, sorte de best-sellers de l’époque.
On remarqua que quand il était à table, il engloutissait des quantités phénoménales de nourriture. On en trouva la cause, il avait le ver solitaire. On le soigna et il guérit. Mais il préféra se déclarer incurable, ainsi il pouvait continuer de se goinfrer en passant pour un malade.
Mais une de ses plus fameuses entourloupes eut lieu en l’an de grâce 1812. Ses plus fidèles amis reçurent un faire-part ainsi rédigé :
Un sadique avait décédé de faire partir le convoi funéraire à l’heure précise où à l’époque on envisageait de passer à table. Dieu sait combien de temps cela durerait, et puis quelle idée de nous avertir le jour même, on a pas que cela à faire, non mais je vous dis. Malgré tout, il y avait quand même quelques personnes, l’air triste devant tant de malheur, vous pensez mourir si subitement. A l’heure dite, on fait entrer les personnes présentes dans un salon, tandis que des personnages à l’air triste s’agitent le mouchoir à la main. Un signal retentit, c’est sans doute l’heure de départ du convoi. il faut sortir. On attend derrière une porte qui finit par s’ouvrir. Alors apparaît dans une lumière resplendissante une table somptueusement garnie avec un Grimod de La Reynière tout sourire, qui les invite à passer à table. Ce jour-là, il sut qui étaient ses vrai amis. Il ne renouvela pas l’expérience 26 ans plus tard, car là, il mourut vraiment.
Un tel personnage ne peut se résumer en quelques lignes, mais voici pour couper court quelques extraits de L’Almanach des gourmands. Le livre énumère saison par saison et mois ce que l’on y mange. Bon appétit !
Et un peu d’humour 1914
Source gallica.bnf.fr / BnF / DP